Les disparus
soutenant
la bougie centrale. C’était après que la plupart d'entre nous étions partis
pour l'université et j'imagine donc que c'était une époque où ma mère observait
le rituel annuel, toute seule devant cet objet imposant. Même si, lorsque mon
grand-père était encore en vie, elle l'appelait, je m'en souviens, en Floride à
l'instant où elle s'apprêtait à allumer les bougies, et chantait la bénédiction
pour lui au téléphone, de sorte quelle n'était pas vraiment seule après tout...
Mais pour nous, comme je le disais, ce n'était pas vraiment une grande fête, et
la distribution des cadeaux a disparu après notre petite enfance. J'ai donc été
surpris et impressionné lorsque mon frère aîné a recommencé à envoyer des
cadeaux soigneusement choisis à chacun de nous, il y a quelques années).
The Memoirs of Ber of Bolechow est la première
traduction en anglais d'un manuscrit de quatre-vingt-dix feuillets environ,
couverts d'une belle écriture cursive en hébreu, typique des Juifs éduqués du XVIII e siècle, écrit au tournant du XIXe4par un Juif polonais
du nom de Ber Birkenthal, habitant de Bolechow. Ber Birkenthal, qui a vécu de
1723 à 1805, période tumultueuse de l'histoire de la Pologne et, comme le
montrent ses Mémoires, de Bolechow, était un homme remarquable – un sage
d'une grande réputation dont la tombe, au cimetière de Bolechow, allait devenir
un site de pélerinages. Ber était le fils d'un marchand de vin aux idées
avancées et à l'esprit ouvert qui avait encouragé, dès le plus jeune âge,
l'appétit intellectuel de son fils précoce – lui permettant même d'étudier
le grec et le latin avec les prêtres catholiques du coin, chose inouïe qui devait
par la suite déclencher, brièvement, des soupçons sur l'allégeance à sa propre
religion. L'enfant précoce devint un adulte précoce : marchand de vin prospère,
mais aussi érudit profond et éclectique, capable de lire le polonais avec
autant de facilité que l'allemand et l'italien, l'hébreu, le grec et le latin,
de se plonger aussi joyeusement dans la lecture du grand livre italien
d'histoire universelle, les Relazioni universali, publié pour la
première fois entre 1595 et 1598 (qu'il commença à traduire en hébreu), que
dans les arcanes des textes de la Cabbale qui le fascinaient, tels que le Hemdat
Yamin de Nathan Ghazzati, le soi-disant prophète du faux messie Sabbataï
Tsevi ; Ber de Bolechow était par conséquent un homme qui personnifiait les
énergies libérales, universalistes qui ont contribué à la création de la Haskalah, le grand mouvement des Lumières juives, au cours du XVIIIe siècle,
mouvement qui s'est épanoui à l'époque du philosophe Moïse Mendelssohn, le
grand-père du compositeur.
L'éditeur, au XX e siècle,
des Mémoires de Ber Birkenthal, un certain Vishnitzer, nous apprend que la
ville de Bolechow, où est né Ber, est située dans la partie orientale de la
province connue sous le nom de Galicie, qui s'étend de Cracovie, à l'ouest,
jusqu'à Lemberg (L'viv aujourd'hui), à l'est. Cette partie de la Galicie est
très proche des montagnes des Carpates, qui constituent une formidable barrière
naturelle face à la Hongrie qui s'étend au sud (cette barrière peut être
franchie, toutefois, comme je l'ai appris de la bouche d'une vieille femme qui,
jeune fille en 1943, a traversé toutes les Carpates à pied, de Bolechow à la
Hongrie, où les Juifs du coin, qui n'avaient pas encore vu la guerre, ont eu du
mal à croire les raisons de la fuite désespérée de cette jeune fille). La terre
de la province de Galicie sur laquelle a été fondée la ville de Bolechow avait
appartenu à un noble polonais, Nicolas Giedsinski ; en 1612, Giedsinski avait
posé les fondations de la ville et lui avait accordé une charte. Dans cette
charte, le seigneur polonais avait établi les lois destinées aux trois
communautés qui coexistaient là : les Juifs, les Polonais et (comme le dit la
charte) les « Ruthènes », qui est le nom qu'on donnait autrefois aux
Ukrainiens. Vishnitzer souligne que les Juifs s'étaient installés dans cette
région avant qu'une véritable ville y naisse, mais une communauté stable s'est
développée seulement après 1612, quand la charte accordée par Giedsinski a
donné des libertés et des droits égaux aux Juifs.
Vishnitzer poursuit en décrivant les rares privilèges dont
jouissaient les Juifs de Bolechow au moment de sa fondation, il y a près
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