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Les disparus

Titel: Les disparus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Mendelsohn
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répondu Jäger et qu'elle a secoué la tête en me disant qu'elle
n'avait jamais entendu ce nom, j'ai été incapable de mentionner le studio de
photographie de la famille Schneelicht, les beaux-parents de mon grand-oncle
qui avaient vécu dans sa ville à elle, Stryj, où peut-être il y avait eu
autrefois une petite chance qu'ils se rencontrassent, elle et eux. Une chance
qui, pour moi, aurait un moyen de lier le passé lointain, dans lequel mes
parents paraissaient désespérément et irrémédiablement gelés, au présent
limpide où se déroulait cette rencontre, ce moment transparent qui, comme
quiconque aurait pu le voir clairement, contenait cette vieille femme aux
cheveux blancs appuyée sur une canne et moi, qui contenait le bruit et la
réception, et une soirée ordinaire d'automne dans une ville en paix.
     
     
    En dépit de certaines
erreurs occasionnelles, j'avais toutefois appris, au cours de toutes ces années
passées à envoyer des lettres, des demandes, à faire des interviews et des
recherches sur Internet, beaucoup de choses sur Bolechow qui n'étaient pas
fausses. Par exemple : Ils y étaient depuis qu'il y avait un Bolechow! Combien
de temps ça représentait exactement ? Il est possible de le savoir au jour près
ou presque.
    Si vous êtes un Juif américain d'une certaine génération, la
génération qui, comme la mienne, avait des grands-parents immigrants au début
du XX e siècle, vous avez probablement
grandi en entendant des histoires sur le « pays », sur les petites
villes ou les shtetls dont venaient votre grandpa, votre grandma, ou
votre nana ou votre bubby ou votre zeyde, le genre de petite
ville célébrée par des auteurs comme Isaac Bashevis Singer et dans Le Violon
sur le toit, le genre d'endroit qui n'existe plus. Et vous pensiez
probablement, comme je l'ai pensé pendant longtemps, que c'était des endroits
modestes, tous pareils plus ou moins, avec peut-être trois ou quatre mille
habitants, avec un alignement de maisons en bois autour d'une place, des
endroits auxquels nous sommes maintenant prêts à attribuer un charme sépia,
sans doute parce que si nous pensions aux parties de ping-pong, au volley-ball,
au ski, aux films et au camping, il serait encore plus difficile de penser à ce
qui est arrivé à leurs habitants, puisqu'ils paraîtraient moins différents de
nous. Le genre d'endroit si ordinaire que peu de gens auraient jugé qu'il
valait la peine qu'on écrivît à son sujet, jusqu'à ce que cet endroit et tous
les autres comme lui fussent sur le point d'être effacés, leur caractère
parfaitement ordinaire paraissant, à ce moment-là, digne d'être préservé.
    C'est en tout cas ce que je pensais de Bolechow. Et puis, un
jour qui n'est pas si lointain, mon frère aîné, Andrew, m'a envoyé, en guise de
cadeau pour Hannoukah, un volume très rare, publié par Oxford University
Press en 1922, intitulé The Memoirs of Ber of Bolechow (je dis
« cadeau » pour Hannoukah, mais en l'écrivant je me rends
compte que les mots ne sont pas vrais et certainement pas aussi près de la
vérité que mon grand-père l'aurait aimé : comme mes deux belles-sœurs ne sont
pas juives et que mes neveux et nièces reçoivent une sorte d'éducation
religieuse éclectique aujourd'hui très répandue, le cadeau que j'ai reçu était
une chose à laquelle j'ai pensé sans aucun doute à ce moment-là comme un cadeau
pour « les fêtes » ; non : permettez-moi d'être vraiment honnête ; je
suis sûr d'avoir pensé simplement que c'était un « cadeau de Noël ».
Le fait est que, chez moi, quand nous étions petits, nous ne fêtions pas
magnifiquement Hannoukah. Ce dont je me souviens pour l'essentiel, c'est
que ma mère, en dépit de l'érosion provoquée par le dédain de la religion chez
mon père, tenait à son éducation orthodoxe et mettait une serviette ou un
napperon sur la tête dans notre cuisine, le premier soir de Hannoukah, et
au moment où les enfants se rassemblaient autour de la table un peu
embarrassés, elle chantait en hébreu la bénédiction, à moitié oubliée, au-dessus
des bougies. Quand sa mémoire lui faisait défaut pour certains mots, elle
enchaînait, sans la moindre gêne, en yiddish : Yaidel-daidel-daidel-dai, disait-elle.
La menorah en cuivre qu'elle utilisait était minuscule, simple et
démodée, et elle avait appartenu à sa mère ; à un moment donné, son père nous
en a donné une plus imposante, avec des lions de Judah qui rampaient

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