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Les Essais, Livre II

Les Essais, Livre II

Titel: Les Essais, Livre II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Montaigne
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arma enim, membra militis
esse dicunt
. Mais quant et quant encore, ce qu'il leur falloit
de vivres, pour quinze jours, et certaine quantité de paux pour
faire leurs rempars, jusques à soixante livres de poix. Et les
soldats de Marius ainsi chargez, marchant en bataille, estoient
duits à faire cinq lieuës en cinq heures, et six s'il y avoit
haste. Leur discipline militaire estoit beaucoup plus rude que la
nostre : aussi produisoit elle de bien autres effects. Le
jeune Scipion reformant son armée en Espaigne, ordonna à ses
soldats de ne manger que debout, et rien de cuit. Ce traict est
merveilleux à ce propos, qu'il fut reproché à un soldat
Lacedemonien, qu'estant à l'expedition d'une guerre, on l'avoit veu
soubs le couvert d'une maison : ils estoient si durcis à la
peine, que c'estoit honte d'estre veu soubs un autre toict que
celuy du ciel, quelque temps qu'il fist. Nous ne menerions guere
loing nos gens à ce prix là.
    Au demeurant Marcellinus, homme nourry aux guerres Romaines,
remerque curieusement la façon que les Parthes avoyent de s'armer,
et la remerque d'autant qu'elle estoit esloignée de la Romaine. Ils
avoyent, dit-il, des armes tissuës en maniere de petites plumes,
qui n'empeschoient pas le mouvement de leur corps : et si
estoient si fortes que nos dards rejallissoient venans à les hurter
(ce sont les escailles, dequoy nos ancestres avoient fort
accoustumé de se servir) Et en un autre lieu : Ils avoient,
dit-il, leurs chevaux fors et roides, couverts de gros cuir, et eux
estoient armez de cap à pied, de grosses lames de fer, rengées de
tel artifice, qu'à l'endroit des jointures des membres elles
prestoient au mouvement. On eust dict que c'estoient des hommes de
fer : car ils avoient des accoustremens de teste si proprement
assis, et representans au naturel la forme et parties du visage,
qu'il n'y avoit moyen de les assener que par des petits trous
ronds, qui respondoient à leurs yeux, leur donnant un peu de
lumiere, et par des fentes, qui estoient à l'endroict des naseaux,
par où ils prenoyent assez malaisément haleine,
    Flexilis inductis animatur lamina
membris,
Horribilis visu, credas simulacra moveri
Ferrea, cognatóque viros spirare metallo.
Par vestitus equis, ferrata fronte minantur,
Ferratosque movent securi vulneris armos
.
    Voila une description, qui retire bien fort à l'equippage d'un
homme d'armes François, à tout ses bardes.
    Plutarque dit que Demetrius fit faire pour luy, et pour Alcinus,
le premier homme de guerre qui fust pres de luy, à chacun un
harnois complet du poids de six vingts livres, là où les communs
harnois n'en pesoient que soixante.

Chapitre 10 Des livres
    JE ne fay point de doute, qu'il ne m'advienne souvent de parler
de choses, qui sont mieux traictées chez les maistres du mestier,
et plus veritablement. C'est icy purement l'essay de mes facultez
naturelles, et nullement des acquises : Et qui me surprendra
d'ignorance, il ne fera rien contre moy : car à peine
respondroy-je à autruy de mes discours, qui ne m'en responds point
à moy, ny n'en suis satisfaict. Qui sera en cherche de science, si
la pesche où elle se loge : il n'est rien dequoy je face moins
de profession. Ce sont icy mes fantasies, par lesquelles je ne
tasche point à donner à connoistre les choses, mais moy :
elles me seront à l'adventure connues un jour, ou l'ont autresfois
esté, selon que la fortune m'a peu porter sur les lieux, où elles
estoient esclaircies. Mais il ne m'en souvient plus.
    Et si je suis homme de quelque leçon, je suis homme de nulle
retention.
    Ainsi je ne pleuvy aucune certitude, si ce n'est de faire
connoistre jusques à quel poinct monte pour ceste heure, la
connoissance que j'en ay. Qu'on ne s'attende pas aux matieres, mais
à la façon que j'y donne.
    Qu'on voye en ce que j'emprunte, si j'ay sçeu choisir dequoy
rehausser ou secourir proprement l'invention, qui vient tousjours
de moy. Car je fay dire aux autres, non à ma teste, mais à ma
suite, ce que je ne puis si bien dire, par foiblesse de mon
langage, ou par foiblesse de mon sens. Je ne compte pas mes
emprunts, je les poise. Et si je les eusse voulu faire valoir par
nombre, je m'en fusse chargé deux fois autant. Ils sont touts, ou
fort peu s'en faut, de noms si fameux et anciens, qu'ils me
semblent se nommer assez sans moy. Ez raisons, comparaisons,
argumens, si j'en transplante quelcun en mon solage, et confons aux
miens, à escient j'en cache l'autheur, pour tenir en

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