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Les Essais

Les Essais

Titel: Les Essais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Montaigne
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naissans lors en moy : Je
souffrois l'arrest de leurs horribles conclusions, bien à mon
aise ; et en demeurois de tant plus obligé à Dieu de sa grace,
et mieux instruict de la vanité de cet art.
    Il n'est rien qu'on doive tant recommander à la jeunesse, que
l'activeté et la vigilance. Nostre vie, n'est que mouvement. Je
m'esbransle difficilement, et suis tardif par tout : à me
lever, à me coucher, et à mes repas. C'est matin pour moy que sept
heures : et où je gouverne ; je ne disne, ny avant onze,
ny ne souppe, qu'apres six heures. J'ay autrefois attribué la cause
des fiebvres, et maladies où je suis tombé, à la pesanteur et
assoupissement, que le long sommeil m'avoit apporté. Et me suis
tousjours repenty de me rendormir le matin. Platon veut plus de mal
à l'excés du dormir, qu'à l'excés du boire. J'ayme à coucher dur,
et seul ; voire sans femme, à la royalle : un peu bien
couvert. On ne bassine jamais mon lict ; mais depuis la
vieillesse, on me donne quand j'en ay besoing, des draps, à
eschauffer les pieds et l'estomach. On trouvoit à redire au grand
Scipion, d'estre dormart, non à mon advis pour autre raison, sinon
qu'il faschoit aux hommes, qu'en luy seul, il n'y eust aucune chose
à redire. Si j'ay quelque curiosité en mon traictement, c'est
plustost au coucher qu'à autre chose ; mais je cede et
m'accommode en general, autant que tout autre, à la necessité. Le
dormir a occupé une grande partie de ma vie : et le continuë
encores en cet aage, huict ou neuf heures, d'une haleine. Je me
retire avec utilité, de cette propension paresseuse : et en
vaulx evidemment mieux. Je sens un peu le coup de la
mutation : mais c'est faict en trois jours. Et n'en voy
gueres, qui vive à moins, quand il est besoin : et qui
s'exerce plus constamment, ny à qui les corvées poisent moins. Mon
corps est capable d'une agitation ferme ; mais non pas
vehemente et soudaine. Je fuis meshuy, les exercices violents, et
qui me meinent à la sueur : mes membres se lassent avant
qu'ils s'eschauffent. Je me tiens debout, tout le long d'un jour,
et ne m'ennuye point à me promener : Mais sur le pavé, depuis
mon premier aage, je n'ay aymé d'aller qu'à cheval. A pied, je me
crotte jusques aux fesses : et les petites gens, sont subjects
par ces ruës, à estre chocquez et coudoyez à faute d'apparence. Et
ay aymé à me reposer, soit couché, soit assis, les jambes autant ou
plus haultes que le siege.
    Il n'est occupation plaisante comme la militaire :
occupation et noble en execution (car la plus forte, genereuse, et
superbe de toutes les vertus, est la vaillance) et noble en sa
cause. Il n'est point d'utilité, ny plus juste, ny plus
universelle, que la protection du repos, et grandeur de son pays.
La compagnie detant d'hommes vous plaist, nobles, jeunes
actifs : la veuë ordinaire de tant de spectacles
tragiques : la liberté de cette conversation, sans art, et une
façon de vie, masle et sans ceremonie : la varieté de mille
actions diverses : cette courageuse harmonie de la musique
guerriere, qui vous entretient et eschauffe, et les oreilles, et
l'ame : l'honneur de cet exercice : son aspreté mesme et
sa difficulté, que Platon estime si peu, qu'en sa republique il en
faict part aux femmes et aux enfants. Vous vous conviez aux rolles,
et hazards particuliers, selon que vous jugez de leur esclat, et de
leur importance : soldat volontaire : et voyez quand la
vie mesme y est excusablement employée,
    pulchrùmque mori succurrit in armis
.
    De craindre les hazards communs, qui regardent une si grande
presse ; de n'oser ce que tant de sortes d'ames osent, et tout
un peuple, c'est à faire à un coeur mol, et bas outre mesure. La
compagnie asseure jusques aux enfans. Si d'autres vous surpassent
en science, en grace, en force, en fortune ; vous avez des
causes tierces, à qui vous en prendre ; mais de leur ceder en
fermeté d'ame, vous n'avez à vous en prendre qu'à vous. La mort est
plus abjecte, plus languissante, et penible dans un lict, qu'en un
combat : les fiebvres et les caterrhes, autant douloureux et
mortels, qu'une harquebuzade : Qui seroit faict, à porter
valeureusement, les accidents de la vie commune, n'auroit point à
grossir son courage, pour se rendre gendarme.
Vivere, mi
Lucilli, militare est
.
    Il ne me souvient point de m'estre jamais veu galleux : Si
est la gratterie, des gratifications de nature les plus douces, et
autant à main. Mais ell'a la penitence trop

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