Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
toucher de quelque main de fer.
    Considérant de nouveau la magnifique enceinte, il éprouva le sentiment inattendu et malsain que ces tours, ces parois, ces portes fortifiées allaient engloutir Simon et Teresa plutôt que de les protéger. Responsable de leur sauvegarde, n’était-il pas judicieux qu’il décidât, contre toute attente, d’éviter une halte même brève dans la cité pour gagner lentement Guadamur ? Certes, ils étaient fourbus et les montures aussi, mais leur sécurité nécessitait un surcroît de fatigue. « Une nuit », se dit-il, résigné, en voyant Teresa ensommeillée penchée sur l’encolure de Babiéca. « Une nuit seulement ! » Mais où ? Chez qui ? Pedro del Valle pourrait-il les accueillir ? Il se pouvait qu’il fut un partisan de Pèdre ou, dans le cas contraire, qu’il détestât les Juifs.
    –  Je renonce, dit Serrano, à vous faire entrer par la porte de Bisagra : c’est la plus surveillée. Mieux vaut franchir le Tage au Pont d’Alcântara : la foule y est plus nombreuse et les hommes du guet plus rares… à moins que Pèdre ne soit encore en ville, ce dont je doute.
    –  Et pourquoi ? demanda Paindorge, inquiet.
    Le trouvère désigna l’immense bastille de pierre ocre touchée, embellie – si cela se pouvait – par les feux profus du soleil :
    –  Si Pèdre était encore à Toledo, tu verrais accrochées çà et là sur ces pierres moult têtes tranchées offertes en pâture aux cuervos. Il a dû passer vélocement… Il galope vers Séville ou Cordoue. Il les a peut-être atteintes s’il n’a pas été dévoré par des bêtes féroces ou piqué par quelque serpiente.
    –  Holà ! s’exclama Girard Lebaudy de l’arrière. Que nous dis-tu ?
    –  Je dis, compadre, qu’à quelques lieues de Toledo, en allant vers Cordoue, il existe une forêt immense, pleine de loups, d’ours, de tigres et surtout de serpents plus hideux les uns que les autres. Heureusement, nous n’irons pas jusque-là 19  !
    Ils ne regardaient plus les murailles, sauf Tristan. Paindorge le pria de détourner la tête et il vit un château en haut d’une colline escarpée ; un château neuf, rose lui aussi, et dont le donjon n’était qu’une grosse tour ; un château comme il eût aimé en posséder un – force et rêve mêlés, beauté simple et fervente.
    –  San Servando, messire. Voyez comme il contemple le Tage. Il fut construit par Alfonso VI en commémoration de la bataille de Badajoz contre les Mahomets… Il assure, dit-on, la défense du pont d’Alcântara… que voilà.
    Il était beau, ce pont, rose lui aussi. D’une longue foulée de pierre, il enjambait un fleuve aux eaux bleues, comme immobiles. Une tour s’y dressait à son extrémité. Paindorge la trouva plus belle que toutes celles du pont Valentré réunies. Et si la foule était dense et comme insoumise, il y avait effectivement moins de gens d’armes en ce lieu qu’ailleurs. La forteresse de San Servando contenait sans doute une garnison restreinte. On voyait, entre ses merlons, passer de loin en loin une tête ferrée. Nul ne pouvait savoir, sauf eux-mêmes – et encore ! – si ces hommes-là penchaient pour Pèdre ou pour Enrique.
    –  Vous le verrez ce jour d’hui ou demain : le rio Tajo contourne la cité comme une faucille ou un alfange.
    Bien que, par sa hauteur, un muret de granit empêchât la vue immédiate de ses eaux indolentes, on pouvait voir s’amorcer, dans la rocaille herbue de ses berges, la courbure du fleuve où se miraient les maisons riveraines. Un marchand de saucisses grillées avait planté son fourneau dans un décrochement du parapet. On le distinguait à peine, assailli par une meute d’enfants et d’adultes.
    –  Bon sang ! s’étonna Paindorge, il y a autant de gens que de mouches !
    L’odeur était épaisse, grisante. Tristan eut hâte de s’en éloigner pour passer sous la tour à deux issues, dont une herse interne renforçait la défense.
    –  Des murailles, des portes fortifiées, commenta Serrano. Je vous emmènerai, si nous avons le temps, voir celle de Bisagra… Le Cid et le roi Alfonso VI y passèrent après avoir vaincu les Mahomets qui l’avaient édifiée… Et les églises !… La cathédrale, certes, mais il y a Santo Tomé, Santo Domingo del Real, Santiago del Arrabal… Un nombre infini ! Une grand’foison, comme vous dites.
    –  Tant d’églises pour un seul Dieu…
    Tristan n’acheva pas. Cet hommage multiple

Weitere Kostenlose Bücher