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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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devenus.
    Shirton n’ignorait rien : il se refusait à parler.
    –  Si tu as besoin de nous, Tristan, dit familièrement Calveley, je suis assez grand pour que tu me trouves. Je serai de ton côté. Tu es le gendre d’Ogier d’Argouges qui fut mon ami et celui de Jack Shirton. Mais hâte-toi : nous allons quitter cette armée de traîne-potence !
    Un homme traversait la cour. Tristan le désigna du doigt :
    –  C’est Couzic, l’exemple même de la mauvaiseté bretonne.
    –  Un de ceux, dit Shirton, qui boutèrent le feu à l’église de Briviesca. Il riait et sautillait avec son maître quand les Juifs, dedans, souffraient la géhenne.
    Tristan ne sut s’il devait accepter ou condamner tant de sérénité.
    –  Ne me regardez pas ainsi, dit l’archer. Je n’ai déposé ni un fagot ni une planche sur le seuil du saint lieu. Je ne me suis point opposé à cet ordal (398) car j’aurais pour rien perdu la vie. Contre cent un seul homme s’indigne et prend le large.
    –  C’est ce que j’ai fait, dit Tristan. Mais je porte le deuil de tous ces martyrs. C’est pour leur épargner un sort aussi funeste que j’avais protégé ces enfants depuis Burgos.
    –  Tu aurais mieux fait de les y laisser, dit Calveley. Guesclin voulait un nouvel holocauste. Enrique a préféré de l’or à de la cendre.
    –  Savez-vous où je puis trouver le Breton ?
    Shirton tendit la main vers une haute porte :
    –  Là-bas, derrière, vautré sur des coussins comme un satrape…
    – … ou une barragana  ! ricana Calveley. J’ajoute qu’il n’a pas quitté ses plates, comme s’il craignait d’être agressé.
    Les deux Anglais s’éloignèrent. Tristan se tourna vers le portail devant lequel Couzic l’observait, la diablerie dans les yeux et l’aversion aux lèvres.
    *
    –  Je t’attendais. Couzic vient de t’annoncer.
    Il était debout, en armure, et se voulait pachalesque à l’instar de cette salle immense dont les marqueteries du plafond et des murs brillaient aux lueurs du soleil qui, par de hautes baies, fluaient en tous sens. Son œil pétillait d’orgueil et de satisfaction ; sa grosse bouche semblait vouloir absorber son propre sourire. D’un soleret 44 négligent, il repoussa quelques coussins colorés avant de se carrer dans une haute chaire surmontée d’un dais de bois et de velours carminé. Les avant-bras sur les accoudoirs, ses grosses mains poilues crispées sur les museaux 45 à tête de lion, il se poussa en avant du dos et du menton :
    –  Décidément, tu es comme feu ton beau-père : toujours enclin à quelque déplaisance envers moi. Bourbon m’annonce, à Burgos, que tu es parti chasser l’arbalétrier qui a meurtri la reine Blanche et qui, nous sentant venir, s’en est allé à vau-vent ; mais en-fait, tu t’es accointé à une Juive… Oh ! Je sais que sur cent culs de femmes on ne pourrait trouver quel est le sien, mais tu t’es livré, en la forniquant, à une impureté…
    C’était au demeurant le discours d’un fou. D’un fou de haine. Tristan s’approcha d’un pas :
    –  Il faudra te faire soigner, Bertrand. L’abomination obscurcit ton cerveau. J’ai voulu soustraire cette jouvencelle à ton aversion et à celle de tes Bretons. C’est vrai. Rien ne dit que la dame que tu chevauches… non point la Tiphaine Raguenel, mais l’autre, l’Espagnole, n’a pas du sang juif dans les veines…
    Un rire. Une sorte de quinte de coquelucheux. Tristan sut qu’il avait touché juste.
    –  Je sais que tu t’es pris de passion pour les Juifs. On m’a dit qu’à Briviesca, toi, ton beau-père et vos hommes avaient réprouvé notre justice…
    –  Tu emploies des mots dont tu ignores le sens.
    –  Ah ! Ah ! Ah !… Tu voudrais me dispenser des leçons de langage ?… Le roi lui-même dont on loue la sapience, n’oserait m’en fournir. Les Juifs sont nos ennemis, sache-le une fois pour toutes : jeunes, vieux, femmes, enfants… Si ceux de Burgos n’avaient point contribué à notre bien-être, ils auraient vu la mort d’aussi près que ceux de Briviesca !
    –  Je suppose que cette indulgence n’a pas été à ton goût… Mais je suis sûr. Dieu m’est témoin, que tu vas chercher à te revancher sur d’autres.
    –  C’est vrai. Nul ne m’en empêchera. Pas même Enrique !
    –  Et ceux de Tolède ?
    La question embarrassa le Breton. Il l’éloigna d’un geste répulsif, puis :
    –  Tolède est une cité où tout se

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