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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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mêle. Je ne peux supporter de voir des synagogues s’élever entre des églises. C’est une énormité qui attente à ma vue !… Pourriture juive ! Ils sont tous laids !
    Il était bien placé pour parler de laideur ce rustre qui, ignorant le latin tout comme le français qu’il parlait péniblement sans savoir ni le lire ni l’écrire – tout comme le breton, sans doute – avait pris pour devise : Dat virtus quod forma negat (399) . Il était bien placé, ce disgracié, pour vilipender cette gent-là !
    –  Tous laids, affreux, effrayants !
    –  Tous laids ? s’étonna Tristan auquel cette calomnie arracha un sourire.
    Quand on commandait à des milliers de truands plus horribles les uns que les autres, pouvait-on se montrer aussi absolu ? Les yeux de Tristan flamboyèrent, une coulée de sueur mouilla son dos tandis qu’un souvenir brûlait sa mémoire. Il le révéla sans ambages :
    –  Il y en a des beaux, des quelconques et des laids. Comme chez-nous. Or, je vais te confier une chose… Un jour, à Paris, il y a deux ans, alors que je sortais de Notre-Dame, j’ai vu venir vers moi deux jeunes Juifs. On ne pouvait s’y tromper : ils portaient la rouelle 46 sur des vêtements noirs d’excellente coupe, et des plus propres. Pour ne pas salir sa robe, la Juive l’avait exhaussée avec une troussoire qui brillait contre une de ses cuisses…
    –  Tu vois ! s’exclama Guesclin. Tu as regardé ses cuisses. Pas son grand nez pointu et ses longues oreilles !
    –  Ils étaient dignes tous deux… Vingt ans, pas davantage. Ils respiraient la santé, l’amour, l’honnêteté…
    –  Les Juifs sont malhonnêtes ! Tous !
    –  Je les ai remirés 47 , admirés, poursuivit Tristan, sans crainte, entre haut et bas. Le jeune homme était beau, glabre, et ne t’en déplaise, sa femme était jolie… Un sac était entre eux qu’ils portaient chacun par une anse.
    Il ne fut guère surpris qu’à des traits oubliés depuis longtemps se fussent substitués ceux de Teresa. Il n’en devint que plus hardi :
    –  Ils tranchaient, j’ose le dire, sur la foule gorgée d’hosties qui m’entourait – car je venais d’ouïr la messe – et dont j’eusse pu avoir honte, surtout lorsqu’elle fut grossie par les mendiants crasseux qui, chaque dimanche, souillent les parvis de nos lieux saints !
    –  Tu blasphèmes ! gronda Guesclin. Ces jeunes Juifs, c’étaient, à eux deux, une exception… Deux grains de je ne sais quoi dans une fanega (400) d’ivraies. Ces gens-là sont sales. Pis encore : répugnants. C’est pourquoi il faut purger le genre humain de leur présence… Ce jour-là, avais-tu avalé une hostie ?
    –  Si nous faisions, toi et moi, le compte de celles que nous avons avalées, ce serait en ta défaveur.
    Des rougeurs tavelèrent cette face bouffie de dogue humain dont une Castillane était éprise. Elles ne devaient rien aux ombres du dais qui surplombait le Breton.
    –  Tu m’incagues 48 , Castelreng, dit Guesclin d’une voix paisible. Ma parole, cette petite pute t’a enjuivé ! Tu l’as tâtée, percée de ton braquemart…
    Et avant que Tristan pût exprimer sa rage :
    –  Ici, jadis, sous le règne d’un grand roi, deux Juifs outragèrent un Christ vénéré en le frappant d’un coup d’épieu. Alors, un miracle eut lieu : un sang vif coula de la navrure. Effrayés, les profanes enterrèrent l’image sainte dans l’écurie de la maison de l’un d’eux, près d’un village dont je ne sais plus le nom… On découvrit les sacrilèges. On les lapida. Par vengeance, d’autres Juifs oignirent les pieds de Jésus d’un poison terrible : celui qui pieusement les baiserait tomberait roide mort aussitôt son baiser… Alors, pour éviter des trépas innombrables, le Christ perdit ses pieds.
    –  Ah ? fit Tristan. Des gens de Guadamur aussi par la bénignité de tes hommes.
    –  Ce n’est pas tout !… Quand les Mahomets prirent Tolède, des Chrétiens emmurèrent Jésus dans son ermitage, lui laissant une petite lampe et très peu d’huile. Eh bien, quatre cents ans plus tard, le saint dépôt fut découvert et la lampe brûlait toujours. On le connaît sous le nom de Christ de Lumière… Qu’en dis-tu 49  ?
    –  Rien… Continue de m’éclairer.
    Mieux valait répondre ainsi que de s’ébaudir d’une telle sornette à propos d’une lampe inépuisable.
    –  Cette Juive, reprit Guesclin en quittant son siège et en marchant

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