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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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d’une voix pâteuse, sonore, trahissant chez lui un excès de boisson. Boulin, aide-moi donc !
    Terrés en leur vile cachette, les deux pendards étaient tout dégrisés. Ils comprirent qu’un valet de chambre aidait le monarque à se préparer pour la nuit.
    — Vous me réveillez, sire, feignit la duchesse d’Étampes. Mon bal s’est fini tôt.
    — Je vois cela... Tout le monde vous aura donc abandonnée ?
    — Le dauphin était fatigué ; d’ailleurs, nous le sommes tous.
    Le souverain grommela. Puis il émit un petit cri douloureux.
    — Aïe ! Je vais mieux, mais ce n’est pas guéri.
    Sous le sommier, les deux intrus échangèrent une grimace. Ils plaignirent sincèrement leur belle partenaire lorsque, afin surtout de les protéger, ils l’entendirent se sacrifier avec un entrain digne d’Iphigénie... Mais leur sollicitude n’alla pas jusqu’à l’abstinence ; et tandis qu’Anne expiait là-haut pour eux trois, ils achevèrent ici-bas – dans le silence – ce qu’ils avaient si ardemment commencé.
    1 - Voir La Régente noire .
    2 - En quelque sorte un « trône-à-porteurs », conférant de la solennité aux apparitions publiques du souverain pontife.
    3 - Il s’agit d’un jeu de cartes.

Chapitre III
    D’un dauphin l’autre
    (Eté et Automne 1536)

Vallée du Rhône
    U n coche d’eau convoyait, depuis Vienne, la sœur du roi et sa maigre suite en direction des camps retranchés du Midi. Vus du Rhône, les villages qui s’égrenaient sur les berges donnaient le sentiment de havres inutiles. Mme du Lude, vieille amie de Marguerite, et qu’indisposait une chaleur chaque jour plus pesante, s’inquiétait déjà du terme de ce voyage.
    — Ne pensez-vous pas, ma chère, que nous devrions faire halte dans un de ces charmants villages, et attendre là, tranquillement, votre époux ?
    Car officiellement, on ne s’était ainsi embarqué que pour voler au-devant d’Henri d’Albret, roi de Navarre, qui rentrait de Béarn avec des gens de pied tout frais pour son beau-frère. Mais en vérité, Marguerite envisageait ce périple comme un tour d’inspection de l’armée de défense... Et plus que tout, elle entendait bien rencontrer le grand maître de Montmorency.
    — Cet homme sera, tôt ou tard, le vainqueur, disait-elle. Et que font généralement les vainqueurs ? Ils négocient ! Alors nous aurons besoin de lui pour qu’on n’oublie pas la Navarre au traité, et que soient défendus les intérêts de ma fille.
    La petite Jeanne d’Albret n’était-elle pas infante de Navarre – autant dire seule héritière légitime de ce petit royaume ?
    Voilà pourquoi la plus puissante adversaire du maréchal en était, depuis peu, devenue l’inconditionnelle. Marguerite l’avait certes beaucoup défié ; elle s’était opposée à sa politique de paix avec l’Empire et, trouvant à son personnage trop d’influence sur le roi, n’avait pas ménagé ses efforts pour l’en éloigner. Elle avait même, dans un accès récent d’acharnement personnel, obtenu que la propre sœur du grand maître, pourtant au service de la reine, fût écartée de la Cour !
    Seulement cela, c’était du passé.
    Car à présent que Montmorency mettait tout son talent à préparer la guerre, la reine de Navarre n’avait pas de termes assez élogieux pour vanter les bienfaits d’un stratège digne – elle le clamait – des Anciens. Elle approuvait sa refonte des régiments sur le modèle des antiques légions, admirait l’ordre, la netteté, l’efficacité régnant dans ses camps inspirés des castra romains ; surtout elle savait louer à qui de droit l’intelligente stratégie de la terre brûlée, adoptée par celui que les lettrés de Lyon ne nommaient déjà plus que Fabius Cunctator 14 .
    — Où sommes-nous ? demanda-t-elle au capitaine de son escorte, Galiot de Genouillac. Le camp d’Avignon est-il loin ?
    Le vieux soldat qui, dix ans plus tôt, avait déjà suivi l’amazone dans son odyssée espagnole, ne savait trop quoi répondre.
    — À ce train-là, madame, il nous faudra bien une semaine.
    La sœur du roi se referma comme une huître ; silencieuse, elle remâchait toutes sortes de duretés mentales contre l’inconvénient de voyager dans la compagnie peu martiale d’une douairière et d’un barbon !

    Une bonne surprise l’attendait à l’escale de Pont-Saint-Esprit. À peine le coche avait-il touché la rive, qu’un chœur de soldats allègres hurla :

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