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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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fini par passer même au second plan, le « ci-devant » grand amiral se voyait privé de toutes ses charges, à vie, dépouillé de l’essentiel de ses biens, incarcéré à Vincennes et taxé d’une amende énorme. C’est tout juste si la favorite, fidèle en amitié, avait obtenu que le condamné ne fût pas déchu de l’ordre de Saint-Michel et sa famille frappée d’infamie.
    Devant cette sentence implacable, le clan d’Étampes avait fait bloc. La plus noble initiative de la duchesse, en vue d’adoucir le sort de Brion, avait été le mariage de sa propre sœur, Louise, avec un neveu du ci-devant amiral. Guy de Chabot, baron de Jarnac, était un damoiseau fluet, pas très viril, et qui donnait l’impression, lorsqu’il accompagnait sa jeune femme, d’en être l’impudent petit frère. Louise de Pisseleu ne s’en plaignait pas, au demeurant, et s’amusait même à coiffer et parer son charmant mari comme elle eût fait d’une poupée.
    Dans les jours qui suivirent le mariage, tous deux passèrent leurs journées chez la favorite, à jouer avec le singe, à siroter des liqueurs, à faire sauter des osselets – quand ils ne mêlaient pas leur voix aux méchantes rumeurs de la Cour... Anne brocardait volontiers sa sœur.
    — Je vous ai trouvé un rude époux, dit-elle en les voyant un soir comparer leurs dentelles. Il vous défendrait contre mille, mais armé d’une épingle à chapeau !
    — Il me plaît bien ainsi, rétorqua Louise, piquée au vif.
    Guy l’embrassa pour sa peine.
    — Madame, intervint un huissier, il y a là un écuyer de la reine de Navarre...
    — Qu’il entre, bien sûr !
    Gautier de Coisay se présenta devant la duchesse, un peu embarrassé de n’avoir pas de message à transmettre. Mais elle sut se montrer engageante.
    — C’est agréable de vous voir, dit-elle. Il y a si longtemps !
    — Pardonnez-moi, madame, si je me suis permis de venir chez vous de mon propre chef...
    — Mais quelle bonne idée, au contraire !
    Comme lors de sa visite, cinq ans plus tôt, à l’hôtel de la rue Saint-Antoine, Gautier sentit que sa belle prestance ne laissait pas la favorite indifférente.
    — Vous êtes très aimable, vraiment, dit-il.
    — C’est ce qu’il se dit, en effet... Mais en quoi puis-je vous le prouver ?
    Ils s’isolèrent dans un cabinet voisin. Gautier commença par déplorer, pour la forme, la condamnation de l’amiral de Brion. Puis, baissant d’un ton, il en vint à ce qui le préoccupait : depuis que le roi, l’année passée, avait octroyé aux parlements tout pouvoir en matière de poursuite de l’hérésie, des familles entières de réformés se trouvaient traquées, arrêtées, persécutées.
    — Je sais cela, mon pauvre ami, soupira la duchesse d’Étampes. Mais je n’y peux rien, malheureusement !
    — Il se trouve, madame, que des gens d’armes sont venus, tout récemment, inquiéter ma famille à ce sujet, et...
    — Où vit votre famille ?
    — Tout près de Compiègne. Au château de Coisay.
    — Coisay... A-t-on arrêté quelqu’un des vôtres ?
    — Pas encore, madame, mais je voulais m’assurer...
    — De ma bienveillance ? Oh, pour ça, vous l’avez.
    Elle irradia l’écuyer d’un sourire plus que bienveillant – une véritable invite. Puis elle revint sur ce nom de Coisay, qui lui rappelait quelque chose.
    — Vous n’avez, je crois, aucun lien avec Simon de Coisay...
    — Simon est mon demi-frère. Mais il est bon catholique.
    Anne reçut ces deux nouvelles avec surprise. La première, surtout.
    — Votre demi-frère m’avait dit...
    — Vous connaissez donc Simon ? l’interrompit Gautier, étonné à son tour.
    — Je l’ai connu, naguère. À Lyon...
    Un sourire – fugace il est vrai – effleura les lèvres de la duchesse, mais elle ne raconta pas à Gautier comment son frère avait commencé une nuit dans son lit, avant de la finir... au-dessous !
    L’écuyer la trouvait plus troublante – plus désirable aussi – que jamais. Elle s’était approchée de lui et, comme on tournerait autour d’un objet d’art, le détailla du regard, puis du bout des doigts.
    — Ne restez plus si longtemps sans venir me voir, lui souffla-t-elle à l’oreille. Revenez...

Château de Pau.
    S ur la vieille forteresse de Gaston Phébus, en surplomb du Gave, les Albret avaient fait fleurir la plus agréable des résidences, avec des jardins, des terrasses, une belle cour bordée de façades à l’italienne, un escalier

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