Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
Vom Netzwerk:
compagnie que l’écuyer consentit à venir, régulièrement, s’aguerrir dans une salle d’armes de la paroisse de Saint-Germain-l’Auxerrois.
    Il lui semblait, depuis quelque temps, que son nouvel ami était soucieux.
    — Cornelio, tout va bien ? demandait-il avec insistance.
    — Bien sûr que tout va bien, répondait l’autre, agacé.
    La vérité, c’est que depuis la mort inepte du pauvre comte d’Enghien, le gentilhomme italien ne vivait plus. Le précédent de son parent Montecucculi l’avait rendu méfiant envers la justice – il est vrai parfois dangereuse – du roi de France. Il lui semblait que, d’une heure à l’autre, des commissaires désignés par le roi, à la requête de la famille, allaient venir s’assurer de sa personne, le conduire en geôle et, de là, chez le bourreau. Chose étrange : ce guerrier courageux, que rien au combat n’aurait pu faire ciller, se mettait à trembler à cette simple chimère.
    — Eh, Bentivoglio ! Votre garde !
    Leur maître d’armes était le maestro Caize, un vieux bretteur comme on n’en faisait plus, qui connaissait bien des tours et bien des façons, et aurait pu défier sans crainte tous les gentilshommes de Paris.
    — Maestro, demandait souvent Simon de Coisay, enseignez-nous donc votre botte secrète !
    — Un jour, peut-être...
    Mais le signor Caize réservait cet atout à plus nécessiteux. Les deux amis purent, du reste, en juger très vite.

    Le Ferrarais, échaudé par l’accident de La Roche-Guyon, voyait d’un mauvais œil le traquenard ourdi par le dauphin – avec la complicité de l’impitoyable Diane de Poitiers – contre le petit baron de Jarnac. C’est peu dire que Simon partageait son indignation.
    Aussi bien, quand il fut question d’organiser un duel judiciaire, les deux amis allèrent-ils trouver le « dameret » pour lui indiquer les services de leur brillant maître. Jarnac, l’inquiétude aidant, accepta l’offre des compères ; et c’est ainsi que l’on vit bientôt le maestro Caize livrer chaque soir la quintessence de son enseignement à un petit baron dont la silhouette aurait découragé n’importe quel autre maître.
    Tous, sauf le signor Caize...
    — À présent, lança-t-il un beau jour, je vais vous montrer ma botte secrète. Vous êtes prêt ?
    Cornelio et Simon, ravis, se firent tout petits ; ils espéraient passer inaperçus, et assister en cachette à ce pan interdit de la leçon d’escrime... Mais le maestro n’était point gâteux.
    — Eh, dit-il sans même tourner la tête. Voulez-vous sortir, tous les deux ?
    Ils quittèrent donc la salle, plus amusés que furieux.

    La disgrâce qui frappait Mme de Poitiers, et l’avait un temps exilée loin de la Cour, n’avait pu durer bien longtemps. Le dauphin, de retour de campagne, avait exigé de son père qu’il rapportât une décision dont on voyait bien, dit-il, qu’elle avait été dictée par Mme d’Étampes.
    Pendant les premiers temps de son retour, Simon se méfia de la sénéchale ; il attendait, d’une heure à l’autre, qu’on lui signifiât son renvoi de la maison du dauphin. Mais les jours passèrent, et les semaines, sans qu’on lui fît le moindre ennui. Il avait fini par baisser la garde, et ne manquait même plus une occasion de louer la magnanimité de l’amie du dauphin, quand le coup qu’il n’attendait plus le faucha de plein fouet.
    Un matin où, devant la salle d’armes, il attendait Cornelio pour croiser le fer, à leur habitude, un valet se présenta en son nom, porteur d’un billet où le Ferrarais, en termes désolés – semblait-il – conseillait à son ami de fuir la Cour avant que les foudres de la grande sénéchale ne vinssent à s’abattre sur lui. « Je la sais fort remontée, écrivait Bentivoglio, et l’on m’a dit et répété qu’elle avait demandé au dauphin plus que votre renvoi : votre tête au premier motif ! »
    Simon n’insista pas. Il n’avait nulle intention de s’accrocher, ni de se battre. Ce nouveau coup du sort le confortait dans l’idée qu’il avait passé l’âge – et surtout l’envie – de jouer les chevaucheurs au service de princes ingrats, quand ils ne se révélaient pas dangereux. Coisay, le village, les prairies, les bons chevaux de Picardie, depuis longtemps lui manquaient.
    L’écuyer fit promettre à son frère de lui donner souvent des nouvelles et de venir, le plus tôt possible, lui rendre visite là-bas, « chez eux » ;

Weitere Kostenlose Bücher