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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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restâmes silencieux un long moment, examinant le plafond, puis je lui demandai :
    — Cela vous est-il déjà arrivé ?
    — Quoi donc ?
    — D’avoir un amant avec qui vous parliez ?
    Il se mit à rire.
    — Oui, peut-être pas aussi franchement qu’avec vous, mais cela m’est arrivé.
    Il sembla sur le point d’ajouter quelque chose puis se ravisa, pinçant les lèvres et soufflant par le nez.
    Je savais (je ne pouvais l’ignorer) qu’il mourait d’envie de savoir comment Jamie était au lit, en dehors de ce que je lui avais montré malgré moi pendant la nuit. Je devais reconnaître que j’étais très tentée de le lui dire, ne serait-ce que pour ramener Jamie à la vie pendant de brefs instants. Mais ce genre de révélation avait un prix : non seulement la sensation de trahir Jamie mais la vergogne de me servir de John, qu’il le souhaite ou pas. Les souvenirs de ce qui s’était passé entre Jamie et moi dans notre intimité ne seraient plus jamais partagés mais ils n’appartenaient qu’à nous et je n’avais pas le droit de les donner à un autre.
    Avec un temps de retard, il me vint à l’esprit que, pareillement, les souvenirs intimes de John n’appartenaient qu’à lui.
    — Je ne voulais pas être indiscrète, m’excusai-je.
    Il fut amusé.
    — Je suis flatté, madame, que vous vous intéressiez à ma vie privée. Je connais bien des mariages conventionnels où les époux choisissent sciemment de tout ignorer des pensées et des aventures de leur conjoint.
    Je me rendis soudain compte que, sans que ni lui ni moi ne l’ayons voulu, il existait désormais une réelle intimité entre nous. Cela m’intimida. Ce constat en amena un autre ; à savoir qu’une personne dont les reins fonctionnaient normalement ne pouvait rester indéfiniment allongée en buvant de la bière. Il sentit mon inconfort et se leva. Il enfila sa robe de chambre puis alla chercher mon peignoir. Je constatai avec surprise qu’une âme bienveillante l’avait déposé sur le dossier d’une chaise.
    — D’où est-il sorti ? demandai-je en indiquant du menton le long vêtement en soie.
    — Mais, de votre chambre je présume, me répondit-il, déconcerté, avant de comprendre ce que j’avais voulu dire. Ah, ce doit être Mme Figg qui l’a apporté quand elle est venue préparer le feu.
    L’idée que Mme Figg m’ait vue dans le lit de lord John, dormant comme un loir, nue, échevelée et ronflant, voire bavant sur l’oreiller, me parut le comble de l’horreur. D’ailleurs, le seul fait que je me sois trouvée dans son lit était terriblement embarrassant, indépendamment de mon allure.
    — Nous sommes mariés, me rappela-t-il.
    — Euh… oui, c’est vrai.
    Une autre idée me vint. Peut-être cela n’avait-il pas été un spectacle aussi inhabituel pour Mme Figg. Recevait-il des femmes dans son lit de temps à autre ?
    — Vous dormez avec des femmes ? C’est-à-dire… euh… vous voyez ce que je veux dire ?
    Il arrêta un instant de se coiffer et se tourna vers moi.
    — Pas de mon plein gré.
    Il déposa son peigne en argent et s’enquit avec une politesse exquise :
    — Avez-vous d’autres questions de ce genre à me poser avant que je ne demande qu’on me monte mes chaussures ?
    En dépit de la fraîcheur, je sentis le feu me monter aux joues. Je resserrai un peu plus le peignoir en soie autour de moi.
    — Puisque vous le proposez, oui. Je sais que Brianna vous a dit ce que nous… étions. Vous le croyez ?
    Il me dévisagea un instant sans répondre. Il n’avait pas le don de Jamie de cacher ses sentiments et je perçus l’irritation provoquée par ma question précédente laisser la place à l’amusement. Il m’adressa une petite courbette.
    — Non, mais je vous donne ma parole que je me comporterai en tout point comme si c’était le cas.
    Je restai quelques instants sans voix puis acquiesçai.
    — D’accord.
    L’étrange bulle d’intimité dans laquelle nous venions de passer la dernière demi-heure éclata et, bien que j’aie été celle qui posait les questions indiscrètes, je me sentis subitement comme un escargot hors de sa coquille, non seulement nue mais terriblement vulnérable, tant physiquement qu’émotionnellement. Extrêmement troublée, je murmurai un au revoir et me dirigeai vers la porte.
    — Claire ?
    Je m’arrêtai, une main sur la poignée. Il ne m’avait encore jamais appelée par mon prénom. Il me fallut faire un effort pour me tourner

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