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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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chevauchée :
    — Nous y voilà !
    Insolent, redoutable, Augignac levait dans la nue tumultueuse sa haute corolle gris de cendre, hourdée de loin en loin [43] . Une bannière délavée flottait au sommet du donjon où remuaient des hommes.
    — Cette bastille sans fossé, sauf sous son pont-levis, a très mauvais aspect. Gardons-nous : si quelques bons arbalétriers ont reçu commandement de nous accueillir, il est bon de nous tenir… à carreau !
    Cela dit, Briatexte consulta Ogier. Son sourire quelque peu moqueur le courrouça :
    — Dieu me préserve de devenir couard !… Je suis prudent… J’ai tellement vu de traîtrises qu’au soleil, je me méfie de mon ombre.
    Artus glissa ; Ogier flatta l’encolure de Marchegai :
    — Je compte aussi sur toi, l’ami, murmura-t-il. Et ce pâtre qui ne cesse de forhuer [44] me donne des agacins par tout… le corps !
    Piteuse calembourdaine. Il ne s’en réjouit point car l’inquiétude, soudain, lui plombait bras et jambes. Il regretta de s’être prématurément couvert de fer. Mais Renaud lui aurait-il accordé le temps de s’apprêter pour combattre ? Il se tourna vers Oradour, vers l’obscur crêpelage des forêts sur lequel pesait une brume funèbre. Reviendrait-il là-bas en fin de matinée ? Il se sentait triste et comme déforci, incapable de dominer une sorte de langueur à laquelle il ne pouvait fournir un nom. Le plancher des hourds, soutenu par de massives jambes de force, crépitait sous l’effet de maints piétinements : le château tout entier voulait voir le tençon.
    — N’avançons plus, messire, conseilla Champartel.
    Ogier n’en avait pas l’intention. Il pouvait à loisir évaluer sa petitesse face à cette forteresse hostile en laquelle Tancrède avait langui une nuit dans l’ignorance, peut-être, de sa venue. Vivrait-il ce soir ? Et même, vivrait-il longtemps ? Atteindrait-il l’âge de son oncle ? De son père ?
    « Se battre, songea-t-il. Se battre encore ! Chamailler contre ce fredain [45] qui envie mes éperons ! »
    La passion des armes sans la magnanimité qui parfois les abaissait, n’était en vérité que monstruosité. Pourtant, s’il avait volontiers épargné Briatexte, il ne fléchirait pas devant Renaud !
    — Les voilà ! dit Raymond.
    Le pont venait de s’abaisser ; deux armures de fer le franchissaient au trot. Quatre hommes les suivaient, vêtus en bourgeois.
    — Renaud à l’avant, Tancrède à l’arrière, sur Broiefort, commenta Ogier sèchement.
    Elle portait cette armure milanaise qu’il avait, lui aussi, tant convoitée. Comme l’avait-elle obtenue ?
    Dans l’ouverture du bassinet noir, une moue tordit la bouche de Briatexte :
    — Pas de héraut d’armes. Des destriers sans houssement… Aucun clerc pour veiller au respect des règles… Rien de ce qui se fait d’ordinaire. Des dévergondés convoitant un butin : c’est ainsi qu’il faudra vous battre !
    — Certes, messire… Mais quel butin !… Et puis, dévergondé , n’en êtes-vous pas un ?
    La malice de Thierry arracha un sourire à Ogier. Ensuite, il se porta, seul, à la rencontre du petit groupe, et sans presque regarder Renaud dont le heaume et le haubert lui parurent toutefois des plus solides, il poussa Marchegai en direction de la jouvencelle, singulièrement à l’aise dans son habit de fer.
    Il la salua, non sans un soupçon de mépris. Sous la ventaille relevée, le visage rose demeura immobile. « Ainsi, on la prendrait pour saint Michel vivant ! » Mais ce n’était qu’une fille mômée en guerrier.
    — Comment t’ont-ils traitée ?
    — Assez vilainement.
    Fouillant le regard vert dont il était enveloppé, Ogier n’y trouva rien d’autre qu’une sérénité froide, revêche, et qu’il connaissait bien.
    — Pourquoi n’avez-vous pas suivi la voie que vous aviez choisie, Jean et toi ?
    — Il était trop mal pour que nous fassions un détour… Peu après Thiviers, nous avons failli être rejoints… Nous avons chevauché dans le lit d’un ruisseau pour égarer la meute.
    — Je t’avais demandé de partir avec nous !… Jean est mort bêtement.
    — Hardiment, beau cousin !… Les goujats d’Augignac se sont mis à trois contre lui…
    — Et cette armure ? Pedro ne te l’a sûrement pas donnée !
    — Elle me sied. Je l’ai voulue dès le premier jour où nous l’avons vue… Il l’avait offerte à Guillaume qui l’avait refusée. Je l’ai

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