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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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succession mâle, Philippe VI, oncle de Charles de Blois, s’était montré partisan de l’accession de Jeanne, incitant aussitôt Édouard III – qui revendiquait la couronne de France au nom de la succession féminine – à soutenir Jean de Montfort.
    — L’ami, vous qui étiez à Rennes, il ne faut pas moisir là !… Dites-moi votre nom.
    — Godefroy d’Argouges.
    Ogier se réjouit qu’il n’y eut, dans cette ferme réponse, aucune formule révérencieuse. Et si son père s’agenouillait encore, c’était pour prendre le pouls du blessé.
    — Argouges !… C’est donc vous ! Le seul chevalier qui, par deux fois contre moi, s’est élancé lance basse !… Vous avez vieilli, je l’avoue. Des malheurs ?
    — À cause de Blainville.
    — Je ne sais plus où vous m’avez désheaumé…
    — Fougères.
    — … comme plus tard vous avez désheaumé Guesclin, ce goret… Ah ! ma doué, la Bretagne était alors indivisible.
    Montfort reprit son souffle puis, avec un bref sourire :
    — Je rends grâce à votre vaillance : vous vous êtes battus à plus de deux contre un !… Bon sang, si nous avions eu notre épée…
    Le blessé toussa et gémit tandis qu’une éruption de boutons translucides, une sueur de douleur, inondait son visage :
    — Emmenez-moi. S’il ne voit pas revenir Blérancourt et ses gars, Blainville enverra le reste de sa racaille à ma recherche. Et là, vous serez à sa merci : il lui reste quinze soudoyers et quinze Navarrais commandés par Diego de Lerga dont il prétend que l’aisance à manier l’épée est effrayante…
    Le regard d’Ogier tomba sur les mains appuyées contre les plaies : longues, épaisses et nues, elles étaient plus proches de celles d’un huron que de celles d’un prince. Tout autour, le sarrau se maculait de rouge. « Après celui de tant de Bretons, le voilà versant enfin son propre sang pour sa cause ! » Il aida son père à se relever, puis se pencha :
    — Messire… commença-t-il.
    Et il se tut, sa pitié pour le blessé réduisant à rien la détestation qu’il devait au traître. S’il comprenait que cet homme eût voulu s’approprier le duché de Bretagne en arguant de son bon droit, il jugeait inadmissible que, voyant lui échapper ce fief immense, il fût devenu, pour le conquérir, le féal préféré d’Édouard III.
    — Laissons tout ainsi et partons, dit Godefroy d’Argouges. Nous ferons un détour par les bois afin qu’on perde nos traces… Ah ! je vois d’ici la hure de Blainville quand quelque vergogneux [153] de sa compagnie lui annoncera la mort de Blérancourt et des neuf autres…
    Il rit, cette fois franchement. D’imaginer la surprise et l’ire de son ennemi l’emplissait d’une joie terrible. Peut-être, maintenant, se sentait-il capable d’attaquer au lieu de se défendre.
    — Hâtons-nous, Père. S’il sait à qui devoir cette déconfiture, les représailles qu’il exercera contre nous seront cruelles… au moins dans leurs intentions !… Nous devons nous y préparer… Thierry, Raymond, amenez les chevaux… Les nôtres.
    — Plus les deux gris, mon fils… et le noir : ils sont miens. Et ils ont souffert : voyez leurs flancs !
    — Soit, dit Ogier en rengainant Confiance. Mais de cette façon, ce démon, son Ramonnet et leur troppelet [154] de sicaires sauront de qui leur vient cette embûche… Ils vont s’interroger à votre sujet, messire Montfort. Les uns penseront que vous avez fui sans vous soucier de votre compagnon – votre écuyer, sans doute ? – ; les autres que vous êtes atteint et soigné à Gratot… Nous allons, Champartel et moi, vous hisser sur mon cheval. Je monterai derrière vous et vous soutiendrai.
    Montfort cessa de préserver ses plaies. Son regard, après les avoir considérées, signifia : « Vais-je succomber ? » Godefroy d’Argouges écarta les déchirures du sarrau tandis qu’Ogier observait ce visage immobile sous lequel le mouvement de la pomme d’Adam révélait la souffrance.
    — Vous êtes bien atteint, mais nullement en danger.
    — Mon compagnon est mort ?
    — Hélas ! dit Thierry en amenant Marchegai. Il a été estoqué à cinq reprises.
    — Sans toi, mon gars, j’aurais subi le même sort.
    « Qui était ce garçon ? » se demanda Ogier, insensible à cette louange mitigée. « Montfort va-t-il nous révéler son nom ? »
    Le Breton voulut se lever. Il retomba en gémissant, et de colère contre

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