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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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ou te mécontenter ?… Te sens-tu prêt à foutre quelques Juives ? On dit qu’elles sont fort belles quand elles sont jeunes…
    – Occupe-toi de ton abbesse.
    – Je l’ai laissée à Perpignan… Je la reprendrai au retour !
    – Où l’as-tu donc abandonnée ? Dans un couvent ou un bordeau ?
    Tristan cracha sur les talons du routier qui courait vers une échelle dont un homme venait de tomber. Guesclin passa, sa hache familière à la main.
    – Or, en avant ! hurla-t-il à la multitude qui grouillait au pied d’une courtine.
    Comme Tristan s’approchait du Breton, il put entendre :
    – Douce Vierge Marie, assaillons ce jour d’hui ces païens comme nos pères assaillirent ceux de Jérusalem, Alexandrette et Satalie !
    Une pluie de pierres, de cailloux, d’eau bouillante tombait des hauteurs toujours inaccessibles. Cette averse atteignit un prud’homme : Eustache de la Houssaye. On ne l’avait guère vu en chemin. Paindorge aida cet homme au bras dextre rompu à franchir le fossé, puis revint devant les échelles.
    – Messires, dit-il à Tristan et à son beau-père, ils finiront par céder. Nous sommes maintenant des milliers. Ils ne sont que quelques centaines.
    On entendait, dans les hurlements, les frappements des marteaux et des houètes 339 . Si les échelades échouaient, la base des murs finirait par céder. Guesclin ne cessait point d’encourager ses hommes :
    –  Allons, mes bons gars ! Je veux vous voir les premiers au-dedans ! Les Anglais, si vous ne vous hâtez, entreront dans la juiverie sans nous !
    Les Bretons redoublèrent d’ardeur au moment où celle des assiégés s’alentissait : il y avait, à certaines embrasures, des éclaboussures sanglantes. Bientôt, un Breton jaillit au mitan de l’une d’elles, suivi d’un autre et de Guesclin, la hache haute. D’autres montèrent et lancèrent des cordes à leurs compères. Ceux-ci, l’arc au dos, se hissèrent au faîte de la muraille.
    – Notre-Dame Guesclin ! cria l’un d’eux.
    – Calveley ! dit un autre. Commande à tes routiers de nous laisser des Juifs !
    – Attendons pour monter, dit Ogier d’Argouges. Vois, Tristan : Audrehem n’y est pas disposé… La lutte est trop chaude, là-haut, pour qu’il y veuille prendre part !
    –  Putas ! Hijos de putas !… À la puerta !
    On entendit tonner le gros huis d’une porte.
    – Espagnols forcenés, donnez-nous vos Juifs et nous ferons la paix avec vous !
    Guesclin, toujours. Et son cousin Budes, au faîte d’une échelle, fulmina, l’épée dressée :
    – Donnez-nous aussi vos Mahomets !
    Ogier d’Argouges tapota de sa main gantée de fer l’épaule de son gendre :
    – Montons ou ces démons nous prendraient pour des couards.
    Sitôt sur le chemin de ronde, Tristan s’immobilisa, le dos contre un merlon. Son beau-père en fit autant. Il y avait du sang sur les dalles et quelques débris de cervelle : une hache avait crevé une tête. Ils n’avaient point fourni un coup de lame. Par un Breton blessé à l’épaule, ils apprirent que les Anglais, après avoir vaincu les défenseurs d’une seconde enceinte qui protégeait la juiverie, commençaient à pourchasser les circoncis. Des enseignes aux couleurs des assaillants se déployèrent, dont l’aigle de Guesclin, et le vent les frotta comme pour les nettoyer du sang qui les maculait. Le Breton brandit sa hache barbouillée sur le corps d’un défenseur puis, après avoir assemblé quelques chefs dont Audrehem enfin là :
    –  Nous sommes, messires, en la semaine où Jésus fut peiné sur l’arbre de la croix. Ce sont les Juifs qui commirent ce meurtre. Nous en avons à portée de nos armes car les Anglais ne les occiront pas tous. Descendons de ces murs, côté ville… Tenez, voilà qui me paraît de bon augure.
    Une députation des défenseurs de Briviesca venait d’apparaître au détour d’une rue. Sitôt à son niveau, Guesclin et les capitaines marchèrent dans sa direction.
    – Restons, dit Ogier d’Argouges. D’où nous sommes, nous voyons mieux.
    – Je n’ai même pas envie de voir, dit Tristan, le fiel à la bouche.
    Il ne savait s’il aimait ou détestait les Juifs. En fait, ils lui étaient indifférents. La fureur de Guesclin lui semblait monstrueuse.
    – Il traite de haut ces vaincus, commenta Ogier d’Argouges. Bras croisés, bassinet en tête mais la ventaille grande ouverte comme si elle aboyait de tout son fer. Tu te dois

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