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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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l’accepterait jusqu’à ce que certains que je connais lui fassent baisser ses braies pour voit s’il est ou non circoncis… Guesclin n’aurait point pitié même s’il s’agit d’un enfant. Il a pris autant de plaisir à occire les petits de Briviesca qu’à pourfendre ou ardre dans une tour leurs parents et grands-parents.
    – C’est un monstre.
    – C’est un chrétien qui a la faveur d’un roi catholique.
    Tristan se félicita d’avoir trouvé cette formule. Il avait omis, sciemment, de citer le Pape subjugué par le Breton. Il reprit, tout en se versant délibérément à boire :
    – Concernant Teresa, elle est faite comme les autres filles. Elle serait différemment menacée : il est des actes, des contraintes, des inconvénients de la nature qui différencient la femme de l’homme, même si elle en porte les habits. Même en coupant ses cheveux à l’écuelle…
    Tristan s’interrompit. Pourquoi envisageait-il les périls inhérents à une telle aventure alors qu’il eût dû, en affectant la commisération la plus vive, n’éprouver rien d’autre qu’un agacement sans frein ?
    – Messire, dit-il après avoir bu quelques gorgées définitives, la nuit nous portera différemment conseil. Je vais aller voir si l’un de mes hommes veille sur le sommeil des autres. Nous sommes… quel jour ?
    – Le 28 mars. Demain dimanche, c’est le sacre… Le dimanche des Rameaux…
    – Je ne suis pas tenu d’y assister. D’ailleurs, y serais-je qu’on ne m’y distinguerait point.
    – La future reine, dona Juana, est arrivée en superbe apparat, entourée des sœurs de don Enrique. On dit qu’elle a grand’hâte de voir votre Bertrand Guesclin… On doit festiner au Palais… On recommencera demain et, dans une semaine, des receveurs entourés d’hommes d’armes viendront nous trouver tous, sans exception, juifs riches et pauvres, en nous demandant un subside… Quel serait votre prix pour sauver ces enfants ?
    Le drapier revenait à son point de départ.
    – Messire, dit Tristan, les vraies bonnes actions sont gratuites, ou alors ce ne sont pour moi qu’une forme de commerce… À combien de lieues sommes-nous de Tolède ? Avez-vous accompli ce reze 393 quelquefois ?
    – Soixante-dix ou quatre-vingts lieues… J’ai fait dix fois ce chemin. Deux semaines de chevauchée sans qu’aucun des chevaux souffre de fortraiture 394 .
    – Nous ignorons tout du pays, des cités où passer… si elles sont ou non accueillantes.
    – Droit au sud… Lerma, Aranda de Duero, Boceguillas, Alcobendas, la petite cité de Madrid, puis Torrejôn de la Calzada et Toledo. Pèdre n’y sera plus, je vous en fais serment.
    Tristan soupira. Une solution s’offrait peut-être : précéder l’armée de quelques jours. Faire en sorte d’éviter les partisans du roi déchu. Chevaucher adoubé comme pour une bataille, donc accourcir les distances que les roncins, la mule et Alcazar étaient capables de couvrir.
    – Il faudrait que je reçoive mandement de partir en avant-garde avec mes hommes… Teresa sait-elle se tenir à cheval ?
    Il avait pensé dire : « Teresa sait-elle chevaucher ? » mais une image hardie avait traversé son esprit.
    – Elle sait… Son genet est à l’écurie.
    – Il faut que j’aie l’assentiment d’un de nos prud’hommes et que nous nous en allions aussitôt pour que Guesclin n’ait pas le temps d’élever un obstacle entre ce dessein et son commencement…
    – Et cet assentiment, qui peut vous le fournir ?
    Joachim Pastor se versa à boire et, désignant le pichet à Tristan, l’invita à se servir.
    – Je ne vois qu’un noble homme : le comte de la Marche… Reste le prétexte. ;
    –  En avez-vous un solide ?
    Tristan sourit, soulagé :
    – Je vais alléguer que, buvant dans une posada, l’on m’a mis sur les traces du meurtrier de la reine Blanche et qu’il me faut le suivre sans perdre de temps pour le lui livrer pieds et poings liés.
    – Ce sera un mensonge… bien que ce meurtrier existe.
    – Je sais… Le trouvère qui est avec nous m’a dit son nom : Juan Pérez de Rebolledo.
    – C’est ce qu’on dit à Burgos. Mais ils étaient plusieurs.
    – Sans doute… Ce nom-là produira son effet.
    Le vieillard se leva. Dans son nid de poils blancs, sa bouche souriait.
    – Ainsi, vous acceptez de sauver mes enfants !
    D’un geste, Tristan interrompit cette joie toute sertie de confiance :
    –  Les sauver ? Je

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