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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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sud est l’œuvre des Andalous… Et cet art ne vaut ni le nôtre ni le vôtre. Et je ris quand certains prétendent que nous sommes les alliés des Mores contre les catholiques, car c’est une accointance impossible. Éternellement impossible.
    Teresa acquiesça.
    – C’est étrange, dit-elle, que votre Guesclin nous haïsse et laisse ces goyim en paix.
    – Cette étrangeté peut s’expliquer, damoiselle : il se prétend descendant d’un roi de Barbarie. Or, c’est bien un barbare.
    Joachim Pastor soupira :
    – Pèdre détestait et déteste encore la plupart des Mahoms. Devront-ils, un beau jour, s’exiler de l’Espagne ? Ils n’y ont rien fait d’autre que de tondre et raccourcir ceux qui n’étaient ni à leur semblance ni à leur goût. En dehors de la mosquée de Cordoue, de l’Alhambra et du Généralife, ils n’ont rien créé pendant des siècles. Nous avons, nous, nos synagogues qui sont nombreuses et belles ; les chrétiens ont leurs églises : Surgos, Salamanca, Saragoza, Santiago, Toledo, Sevilla… et d’autres qui sont toutes des splendeurs. Les Mahoms ne connaissent que le plâtre, la faïence, la mosaïque. Leurs merveilles sont dix ou douze gouttes l’eau dans un désert aussi aride que leur cerveau et leur cœur. Mais l’église d’Espagne est en partie pourrie.
    – On me l’a dit, messire. Un clerc qui a vécu à Calahorra…
    Un geste. Tristan s’interrompit. Lissant sa barbe du menton à sa pointe, le drapier poursuivit :
    – Enrique va recevoir sa couronne de mains sales, indignes. Nous que l’on dit fangeux, nous sommes d’esprit propre. De cœur généreux… quand c’est possible. C’est pourquoi on nous hait. Je crains que cette exécration ne se développe. Enrique serait bien capable de sceller une alliance avec les gens de l’Islam pour nous contraindre à fuir le pays lorsqu’il aura vidé nos coffres et ruiné nos maisons.
    – Vous me semblez craindre les Mahomets plutôt que de les haïr.
    – Je sais ce qu’ils valent d’un bout à l’autre de cette mer qui nous sépare de l’Arabie et cela jusqu’à la Turquie. Ils sont redoutables parce qu’ils naissent la fureur et la méchanceté dans le sang… Il m’advient de prier pour qu’aucun de ceux qui voient le jour ne ressemble à Timour-Beig (568) …
    Tristan dut avouer qu’il ne connaissait rien de cet homme.
    – J’en ai ouï parler, dit Joachim Pastor, par un parent qui revenait sain et sauf de Byzance. Non seulement il a fait ouvrir le ventre des femmes grosses de lui, desquelles il ne voulait point d’enfant, non seulement il en a fait estrapader d’autres par les seins, mais il a roué, brûlé vif, bouilli, crucifié, empalé…
    –  Pèdre, coupa Tristan, me paraît son élève. On le dit chrétien.
    Le vieux Juif releva la tête et parut surgir de ses pensées :
    – Le bel Enrique en fera autant. Il se peut qu’il son pire… Pire que Timour-Beig, non, c’est impossible, car c’est le sultan de l’horreur, mais pire que Pèdre, oui.
    Joachim Pastor avait-il atteint le terme d’une confession d’où l’espérance était exclue ? Sans doute n’était-il pas accoutumé à se livrer à de pareils propos car il semblait s’en repentir. Tristan qui l’observait au détriment de Teresa se demanda si les Juifs étaient des loudiers 391 et des artistes. Si leurs synagogues étaient aussi belles que le vieillard avait voulu le lui faire entendre. Il sentait sur cet homme et ses protégés une menace effective. De quelle espèce ? Était-il possible que les crimes commis à Magallon et Briviesca – et ailleurs sans doute, dans des cités moins importantes – pussent se renouveler ? La réponse était oui. Les Bretons de Guesclin bretonneraient encore.
    – Qui sait ce que l’Arabie enfantera dans les siècles des siècles, messire chevalier. Il y avait, sous le règne du père de Saladin, Nour-ed-Din, une race de Mahomets particulièrement austère et intransigeante et qui interprétaient l’Alcoran d’une façon étrange… C’étaient des Timour-Beig en réduction mais dont la multitude pouvait devenir terrifiante : les chiites. Nour-ed-Din les fit exterminer… Mais qui peut savoir s’ils ne ressusciteront point pour tenter de conquérir un jour un monde affaibli par ses dissensions ? Ce monde où nous vivons, livré à ses chaos, est une proie facile pour des fanâticos… Plutôt que de rendre l’Espagne grande et prospère, Pèdre et Henri la

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