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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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assurément pas une partie de plaisir !

II
     
     
     
    Tout d’abord Alcazar avait armé ses lèvres (515)  ; maintenant, il armait résolument sans que le poids de l’homme fervêtu, sur son dos, y fût pour quelque chose.
    –  Par Notre-Dame de la Motte-Broons, grommela Guesclin, tu peux dire, Castelreng, que tu possèdes un cheval plus têtu qu’une mule du Pape.
    Tristan jugea inutile de préciser que la mule du Saint-Père n’avait ni dos ni jambes ni rien. C’était une sorte de sandale que sans doute il devrait baiser si Urbain V, assis sur sa haute chaire, lui accordait une audience. Il s’approcha de son coursier, caressa son chanfrein et ses naseaux soyeux et doucement, comme s’il savait être compris, il approcha sa bouche de l’oreille blanche et chauvie :
    – C’est un rustique. Ne t’arme ni contre lui ni contre le mors.
    Il vérifia si la baverelle était en place et, tourné vers Guesclin :
    – Nous pouvons y aller. Souviens-toi de ta pro messe. N’abroche pas ce cheval ou Dieu nous soit témoin : je saurai t’en punir.
    Un rire. C’était celui d’Orriz, l’ombre fidèle, qui tenait dans son poing la bannière à l’aigle noire.
    – Nom d’un chien, il prend son cheval pour une gentilfame !
    Tristan ignora ce mistenflûte que Guesclin avait, semblait-il, élevé à la dignité prétorienne – ce qui était la meilleure façon de l’offenser.
    – Nous partons ?
    – Oui, Castelreng. Où as-tu mis ton estranière 193  ?
    – Je n’en ai nul besoin. Celle que voilà suffit.
    Avant d’enfourcher Malaquin, que lui avait cédé son beau-père, lequel chevauchait Pampelune, braqué un moment sur le mors, Tristan leva l’index vers la bannière des Argouges, qui avait été confiée à Paindorge : d’azur à deux lions d’or affrontés. Guesclin cracha dans leur direction :
    – Je ne puis souffrir ces bêtes !
    Ogier d’Argouges sourit avec une sorte de compassion pour tant – précisément – de bêtise éhontée :
    – Leurs griffes font plus mal que les avillons de l’aigle.
    Tristan s’inquiéta : « Si Alcazar s’arme contre ce cul vert, nul doute qu’il l’abrochera en dépit de sa promesse. Guesclin cherra le cul par terre comme à la joute de Chauvigny ! » En fait, il ignorait s’il avait chu, mais ce dont il était certain, c’était que le Breton y avait subi une brossée dont il se souvenait encore.
    – Messeigneurs, cessez donc de vous amignarder, dit-il clignant de l’œil à son beau-père. Si quelque routier pouvait ouïr vos propos, je crois qu’il s’ébaudirait au détriment de l’un ou de l’autre…
    – Tu l’as dit, mon gendre. Je me tais. Les chevaliers qui nous observent sont juges de ma patience.
    Les nobles étaient prêts à partir. Le Breton les inspecta de loin, heureux de les dominer du regard et laissant à ses cousins le soin de régler l’ordre de marche. Les prud’hommes chevaucheraient ensemble en faisant ventiler leurs bannières, bien qu’il fît quasiment nuit. Les hobereaux suivraient, puis l’écuyerie et enfin les cranequiniers et le reste.
    – Avançons, dit Guesclin.
    Alcazar obéit à la voix. Tristan se vit contraint de trotter immédiatement derrière, entre son beau-père et Paindorge sur Tachebrun. Les soudoyers de Gratot restaient immobiles, empêchant, par leur indécision, la bonne avancée de la troupe.
    – À l’arrière ! cria d’un seul tenant le Bègue de Villaines.
    Ils obéirent. Tristan suivit du regard leur retraite.
    Les mailles et les plates de fer luisaient faiblement. Les heaumes, bassinets et cervelières branlaient en jetant des lueurs qui s’éteignaient et ressuscitaient sous les frondaisons clairsemées. On allait devoir progresser lentement, car ils étaient proches, au dire d’un coureur que Guesclin avait lancé en avant et qui revenait, haletant.
    – Des milliers… des milliers. Certains viennent à votre rencontre.
    – À cheval ?
    – Non, Bertrand, ils piètent autour d’un grand homme… Un chevalier d’Angleterre haut de plus de sept pieds.
    « Calveley », songea Tristan, cependant que Guesclin s’écriait :
    – Je le connais. Prudence, compères. C’est un semeur d’embûches.
    Il continua d’avancer, l’épée au poing, prêt à bouteculer tout ce qui lui semblerait hostile. Tristan crut le sentir frissonner sous ses fers. Au pas des chevaux, la plupart hodés, la troupe suivit, docile, entre des arbres aux branches

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