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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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sérénité. Il en fut rassuré.
    – Hugh, dit Ogier d’Argouges à Calveley, voici mon gendre… Paindorge, son écuyer. Mais je ne suis rien d’autre, ici, qu’un homme du roi de France parmi ses pareils… C’est lui, Bertrand, qui détient le commandement.
    S’il ne le savait déjà, Calveley dut comprendre qu’il ne fallait point trop titiller l’orgueil du Breton, cependant qu’un doute effleurait Tristan : son beau-père n’avait-il pas commis une faute en se montrant très accort à l’égard de ce grand Anglais dont la courtoisie envers Guesclin semblait des plus affectée ? Il n’eut guère le temps d’y songer davantage : on reprenait l’avancée, cette fois parmi des curieux qui peu à peu composaient une multitude dont nul ne pouvait savoir – pas même Shirton et Calveley – si elle était chaleureuse ou hostile.
    –  Je sais, Bertrand, ce qui t’amène. Guerroyer contre les Mahomets de Grenade et de Benemarin (518) c’est le prétexte. La vérité c’est que ton suzerain veut placer le potron du Trastamare sur le trône de Castille. Argent, absolution de nos péchés par le Pape… Une fois hors de France, ton Charles croit-il que nous n’y pourrons revenir pour occuper les châteaux que nous avons conquis ?
    – Sans doute. J’ai délogé moult Anglesches des murailles qu’ils hantaient indûment et suis prêt à recommencer. Dis-moi plutôt quels larrons sont avec toi.
    – Matthieu de Goumay, Norman Swinford, William Ludlow, Jean d’Évreux. D’autres… Je leur ai dit à tous que je te recevrais de bon cœur s’ils voulaient bien y consentir, et que nous boirions du bon vin que j’ai en mon pouvoir. Nous t’avons accordé un sauf-conduit avec joie.
    – Mon héraut me l’a remis. Où logez-vous ?
    – Dans un hôtel dont nous sommes devenus propriétaires.
    Deux gros rires se mêlèrent. Shirton leva les yeux sur Ogier d’Argouges :
    – Content de te revoir.
    – Et moi !… Sais-tu toujours tenir un arc comme personne ?
    – Oui.
    –  Et Tom, le balbuzard ?
    – Mort il y a douze ans. Je l’ai pleuré.
    Tristan suivait morose. Où était Luciane ? Que faisait-elle ? Ermeline et Guillemette avaient enfanté sans qu’il eût le temps de savoir de quoi. Il les revoyait, ces femmes. Toutes belles à leur façon. La nuit tombait là-bas comme ici, mais il n’y avait ni cris ni cliquetis malsains ni cette abondance de piques et d’épieux. Une armée répandue dans un val au bout duquel on pouvait distinguer une petite cité. Il s’y était commis sans doute maints crimes de toutes sortes. Incurables et scandaleuses façons de traiter son prochain. Et cette perniciosité des guerriers d’aventure atteindrait bientôt, en Espagne, des sommets épouvantables.
    – Il y a aussi le Chevalier Vert, annonça Calveley. Te souviens-tu, Bertrand, de la plaine d’Auray 196  ?
    – C’est bien la pire de mes remembrances !
    – Tu as un beau cheval, dit Calveley alors que Guesclin mettait pied à terre.
    – Il est vrai qu’il est beau.
    Redoutant quelque sotte et violente vengeance dont son coursier eût pâti, Tristan n’osa révéler qu’il en était possesseur – ce que Calveley vérifierait assez tôt. D’ailleurs, comme il abandonnait sa selle pour confier Malaquin à Paindorge, Guesclin lui tendit les rênes d’Alcazar avec une violence telle que Calveley comprit tout sans qu’un mot, un regard l’eût informé.
    – Place ! Place ! hurla-t-il. Me faudra-t-il tirer l’épée pour nous frayer un passage !
    Tristan vit enfin l’épée de l’Anglais. Dans son fourreau de bois couvert d’un cuir écorché, qui ne tenait que par les viroles, c’était une arme large d’une main et dont le pommeau en tronc de pyramide eût atteint son aisselle s’il avait demandé à Calveley de la lui prêter pour en évaluer la longueur et le poids.
    – Place ! Place !
    La foule grossissait. Tout en rassasiant sa curiosité, elle proférait des hurlements, des «  Hou ! Hou ! » , des injures stridentes, abominables, envers ces « gens du roi » engagés dans son cloaque. Çà et là, une carogne dépoitraillée ricanait, poings aux hanches, et interpellait ses compagnes, de l’autre côté de la voie ouverte par Calveley. Elles étaient grosses, sans rien qui pût exciter un homme sensé. Leurs visages fanés s’emperlaient de sueurs. Ténèbres et chassie engluaient leurs regards. Des rires pointus comme des estocs sortaient de

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