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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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de Nissac, intéressé.
    — C’est simple, monsieur le comte. Avant
que d’être envoyé aux galères en interminable cortège, les condamnés sont
regroupés en prison. Aujourd’hui, elles sont pleines et le départ aux galères
est pour bientôt.
    Nissac se décida sur l’instant et, se tournant
vers Le Clair de Lafitte :
    — Tu y vas de ce pas avec Frontignac et
cet excellent Fervac qui semble s’y connaître en hommes comme il sait être
apprécié des femmes. Il m’en faut trois, de talents les plus divers, qui
remplissent trois conditions sans doute impossibles : courageux, intelligents
et loyaux. Signale-leur si nécessaire que la mission sera longue et périlleuse.
Je te fais envoyer un ordre du cardinal te donnant tous pouvoirs face aux
geôliers et aux intendants. À plus tard !
    Il se leva brusquement et quitta « Le Coq
Hardi » d’un pas résolu.

7
    Seul dans une vaste pièce très richement
décorée, il regardait ses jardins et Paris qu’on allait bientôt se disputer à l’épée,
et peut-être au couteau et à la hache.
    Il ne portait point son masque d’argent. C’eût
été dangereux, ici, où il donnait si bien le change.
    Bien qu’il fût de la plus haute noblesse, son
visage reflétait parfois grande veulerie et, sans son riche habit, on l’eût
volontiers pris pour un homme des plus ordinaires.
    Il demeura un instant songeur : princes
de sang, princes de l’Église, haute noblesse, parlement et lie du peuple, qu’ils
s’étripent ! Que, pour contrôler un pouvoir qui ne l’intéressait plus que
par instants, tous ces fous fassent couler des rivières de sang en les rigoles
des rues… ainsi, le sang qu’il versait, lui, passerait inaperçu.
    Tout ce sang !… Dieu, qu’il en coulait de
tous ces jolis corps écorchés !
    Il fut pris de tremblements et s’agenouilla
devant un petit autel où, sur un fond d’un bleu pastel délicat, un Christ en
croix d’un ivoire très pur semblait le regarder avec grande pitié.
    Oui, il se sentait pitoyable. Bien davantage
victime que bourreau. Était-ce sa faute, tout cela ? Cette envie qui le
prenait, insidieuse, à la vue des beautés magnifiques qui paradaient à la Cour :
madame de Longueville, sœur du grand Condé, madame de Chevreuse, madame de Montbazon,
Anne de Gonzague princesse Palatine et combien d’autres ?
    Une cheville entr’aperçue, des hanches qui
tanguent, il n’en fallait pas davantage pour qu’arrive cette étrange et
inexplicable envie : posséder puis écorcher la femme désirée. L’écorcher, peut-être,
pour la punir de s’être fait désirer et pour que personne ne la possédât jamais
plus après lui.
    L’horrible racaille qui le servait connaissait
bien ses goûts : brunes ou blondes, on devinait dans leur regard terrorisé
à l’instant suprême qu’en temps ordinaire il n’en était pas ainsi. Toutes les
cinq, elles avaient dû toiser les hommes de haut sachant bien qu’il n’est de
meilleur remède pour provoquer le désir du mâle.
    Il sourit. Le désir ! Mais le désir, quelquefois,
suit de curieux chemins et évolue d’étrange façon. Ainsi, du désir de posséder
passait-il au désir de dominer, puis d’humilier, de tuer, d’écorcher !… Que
ne pouvait-il faire à ces femmes comme à ces lapins dont on retire la peau d’un
geste sec !
    Il joignit les mains.
    — Fou !… Je suis fou !… Pardon,
mon Dieu, pardon !
    Cinq. Cinq femmes en six mois.
    Comment lui était venue cette terrible idée ?
Peut-être avait-elle pris forme avec les débuts de la Fronde du parlement et
des désordres qui ne cessaient d’en découler.
    — Pardon, mon Dieu, pardon !
    Il ferma les yeux un instant, puis se cabra.
    Pardon de quoi, au fait ? D’y prendre un
tel plaisir ? Et pourquoi donc faudrait-il demander pardon pour le plaisir,
la seule chose qui vaille dans la vie ? Pourquoi ? D’où venait
pareille idiotie ? Pardon ? Pardon de rien !
    Ivre d’une soudaine colère, il se redressa d’un
coup et pointa un index tremblant vers le Christ en croix.
    — C’est toi !… C’est ta faute !…
C’est toi, l’ennemi !
    Il cracha sur le crucifix et son doigt
impatient chercha sous une moulure un bouton secret qu’il pressa aussitôt.
    Il entendit un déclic, un mécanisme joua et
tout un pan de mur bougea. Le Christ d’ivoire, les objets sacrés et leur fond
bleu pastel disparurent en un parfait demi-tour.
    L’homme sourit.
    — Nous voilà enfin chez nous,

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