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Les guerriers fauves

Les guerriers fauves

Titel: Les guerriers fauves Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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vous êtes parti pour le château d’Anaor, près d’Enna. C’est là que vous avez vécu avec votre mère.
    — Né à Palerme dans le palais de mon père, répéta Tancrède. Mais vous m’avez dit que ma mère était une esclave... Qui suis-je alors ?
    — Tout ce que vous pourrez apprendre ne changera rien à ce que vous êtes, Tancrède. C’était un des objets de mon enseignement pendant toutes ces années.
    — Mais pourquoi mon père m’a-t-il caché ? Pourquoi sommes-nous partis, vous et moi ?
    — Votre père était un chef de guerre et un homme de bien. Il était appelé au plus haut des destins, mais la seule chose qu’il ne pouvait faire, c’était épouser la femme de son choix : votre mère, que pourtant il a aimée plus que tout.
    Il y avait tant de révélations dans les paroles d’Hugues... mais surtout une sonorité terrible. La gorge serrée, Tancrède hésitait :
    — Vous employez le passé en parlant de lui. Dois-je comprendre que, comme ma mère...
    Hugues allait répondre.
    — Non ! s’écria Tancrède en se levant brusquement. J’ai trop attendu, mais surtout, j’ai trop espéré.
    La voix du jeune homme se brisa. L’Oriental s’était levé à son tour. Il aurait voulu saisir le jeune homme dans ses bras et le serrer. La portière de toile était retombée. Il entendit les pas qui s’éloignaient, l’appel de la sentinelle.
    Il s’assit sur le bord du lit, la tête dans les mains, se maudissant de sa maladresse et des souffrances qu’il infligeait à celui qu’il aimait comme un fils.

33
    Ombres noires et basses sur l’eau, des barques avançaient sans bruit. Elles s’arrêtèrent à quelque distance de la rive, puis accostèrent avec un choc mou. Les hommes se séparèrent en trois groupes. Aucun mot n’avait été échangé. Celui qui semblait être le chef partit avec une dizaine d’hommes sous le couvert des arbres, cinq autres restèrent près des embarcations tandis que les derniers se dévêtaient rapidement et, leurs couteaux entre les dents, se coulaient dans l’eau glacée du fleuve.
    D’abord comme un furieux, puis avec plus de calme, Tancrède avait marché au hasard jusqu’à ce qu’une silhouette encapuchonnée apparaisse à quelques pas de lui.
    Instinctivement, il se cacha. La forme avait disparu dans les roseaux de la berge. Les yeux du jeune homme s’étrécirent. Les nuages poussés par le vent s’étaient éloignés, la pluie s’était arrêtée. Des étoiles s’allumaient dans le ciel, la clarté de la lune illumina le visage de celui qui revenait vers lui : le pèlerin de Saint-Jacques, maître Richard, cet homme qu’Eleonor n’aimait pas et qui la poursuivait de ses assiduités.
    Il retournait vers le camp d’un pas rapide.
    Le cri d’une chouette retentit au loin.
    Il sembla à Tancrède que des silhouettes bougeaient dans les sous-bois qui venaient mourir près des murs de la grange dîmière. La lune se cacha à nouveau derrière les nuages, dérobant le monde à sa vue.
    Quand elle réapparut, il n’y avait plus rien.
    Il haussa les épaules, se moquant de lui-même. Il avait dû rêver. Ses pensées revinrent à ses parents. Il n’était donc qu’un bâtard comme Bjorn. Le fils d’un seigneur et d’une esclave orientale. Il quitta le couvert et se dirigea vers le fleuve, regardant sans les voir les reflets argentés qu’agitait une légère houle. Une roche plate se dressait au milieu des roseaux, il s’y assit en tailleur et ferma les yeux, plus désemparé qu’il ne l’avait jamais été.
    Dans le campement, Hugues s’était redressé d’un coup. L’appel de la chouette s’était répété une seconde fois. Il n’arrivait pas à trouver le sommeil et il décida de sortir. L’air et une marche nocturne lui feraient du bien. Il enfila ses bottes, saisit son cimeterre, passa son poignard à sa ceinture et, jetant son mantel sur ses épaules, sortit de la tente.
    La portière à peine retombée, il s’arrêta net.
    Le silence était trop parfait. Les oiseaux de nuit s’étaient tus. Sous les tentes, rien ne bougeait et même les sentinelles restaient invisibles. Il cherchait des yeux les bateaux quand un grognement retentit derrière lui. L’Oriental se retourna et se trouva face au chien d’Eleonor.
    — Eh bien, que fais-tu là, toi ? murmura-t-il. Où est ta maîtresse ?
    La bête restait immobile à l’observer, ses yeux vairons réverbérant la lueur argentée de la lune et, malgré lui,

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