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Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II

Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II

Titel: Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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les aboiements des chiens devant l’entrée du camp.
    Nathalia s’était approchée, elle se penchait et ses cheveux frôlaient les joues de Sarah qui fermait les yeux. Nathalia parlait sans que Sarah comprenne mais cette voix était de vie.
    Le calme peu à peu, les mots de Nathalia qui redevenaient distincts.
    — On va faire une pétition au lycée, disait-elle, pour Monod, nous allons faire signer les profs, on verra bien qui se dégonfle. Tu signeras ?
    Sarah regarda longuement Nathalia.
    David Wiesel, sa lutte dans les rangs des communistes, son passé d’illusions et de risques, pourquoi le nierait-elle, qui devait porter la honte ? Eux ou nous ? Les complices des bourreaux ou David Wiesel ?
    — Ils parlent aussi de moi, dit Sarah.
    Elle lut le titre : Le passé trouble de l’épouse du ministre de De Gaulle. Elle continua, précise, détachant chaque syllabe : Sarah Berelovitz a-t-elle oui ou non travaillé pour l’espionnage russe ?
    Chaque mot lui donnait du courage et chaque coup d’œil à Nathalia la rassurait.
    — C’est Letel, dit-elle quand elle eut terminé de lire l’article. Il dirigeait le service de renseignements. Il a les dossiers. Il croit tenir tout le monde. Il veut briser Serge. Il va continuer, aller plus loin. La semaine prochaine, Berthet parlera de Charles Weber, de mon premier mari, de son suicide, c’est ainsi.
    — Que vas-tu faire, maman ? disait Nathalia.
    Longtemps qu’elle n’employait plus ce mot, maman, qu’elle le contournait, l’évitait en disant simplement Sarah.
    — Rien, murmura Sarah.
    L’émotion l’avait saisie à nouveau.
    — Tu as fait tout cela, maman, vraiment ? disait Nathalia.
    Elle avait la voix d’une petite fille à laquelle on raconte une fable. Sarah l’attira contre elle.
    — Il ne faut pas m’admirer pour ça.
    Sarah caressait les cheveux de Nathalia, glissait ses doigts dans les boucles, répétant à mi-voix comme on rêve : « Tu as de beaux cheveux. »
    — J’étais pleine d’illusions, reprenait-elle. Et puis, je te raconterai, ceux en qui j’avais confiance étaient des bourreaux comme les autres. Ils ont essayé de me tuer.
    Nathalia avait serré ses bras autour du cou de Sarah.
    — Tu ne regrettes pas ? demanda-t-elle.
    — C’est mon passé, dit Sarah. Mais j’ai cru comme une aveugle. Doute, doute d’abord, toujours.
    — Je t’aime, dit tout à coup Nathalia en l’embrassant.
    Sarah se tut.
    Elles restèrent enlacées plusieurs minutes.
    — Je suis idiote, dit Sarah.
    Elle se levait, se mouchait, essuyait ses joues.
    — Moi aussi, dit Nathalia. Deux idiotes.
    Elles rirent.
    Le soir seulement, quand Nathalia se fut couchée, Sarah se décida à téléphoner à Serge, s’étonnant qu’il ne l’eût pas appelée.
    Elle l’imaginait quai de Béthune, rageur, et quand elle l’entendit, au premier mot, elle sut qu’il était devenu un adversaire :
    « … Ignoble, disait-il, un coup de ce salaud de Letel. Il a gardé les dossiers. Une besogne de maître chanteur. »
    « … Ils vont continuer », avait dit Sarah.
    « … Nous ferons saisir le journal pour commencer, hurlait Serge. La solidarité ministérielle doit jouer ou alors… »
    « … Mais ce qu’ils écrivent est vrai », répondait-elle.
    « … Vous revoilà avec la morale – il jurait, criait, l’obligeant à écarter le téléphone de l’oreille – pourquoi vous êtes-vous mêlée de politique puisque vous… – il s’interrompait – Bonsoir. »
    Il raccrochait.
    Novembre, déjà, les flaques boueuses sur l’aire, les volets qui claquaient contre la façade du mas et quand le vent se levait, l’averse jetée sur les vitres. Serge ne donnait pas de nouvelles comme s’il avait craint de se compromettre. Sarah lui écrivait. Que dire à ces journalistes qui la harcelaient et qu’elle devait chasser sans colère ?
    Elle se réfugiait à Vence l’après-midi, chez Élisabeth Loubet. Certaines journées étaient inattendues, brûlantes d’une lumière intense et d’un soleil brutal. Elles restaient toutes deux dans le jardin, silencieuses, et parfois le mari d’Élisabeth, Marco Naldi, arrivant de Paris les surprenait se tenant par la main, paraissant endormies. Mais Élisabeth se levait, puis Sarah et tous trois commençaient à parler, de Serge bien sûr.
    « … Manœuvre bien montée », disait Naldi.
    Il dirigeait l’Agence de presse italienne, à Paris, suivait de près les

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