Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789
les sectes
… cette
loi, sur laquelle nous ne saurions vous peindre notre douleur et
notre peine, en voyant
l’erreur prête à s’asseoir à côté de la
vérité.
»
On trouve encore en 1789, dans les cahiers du
clergé, une protestation du clergé de Saintes, contre cet édit,
permettant aux parents de constater sous une forme purement civile
la naissance de leurs enfants, « ce qui expose, dit-on,
les enfants même nés catholiques à ne pas être
baptisés »
.
Pour l’Église, en effet, c’est porter atteinte
à ses droits, que d’accorder, sans son entremise, un état civil aux
non-catholiques. Le Girondin Barbaroux, au contraire, estime qu’il
est essentiel de donner ; même avec l’intervention de
l’Église, un état civil à son fils, il le fait baptiser et
dit : « Le baptême
n’est rien
aux yeux du
philosophe, mais la cérémonie,
quelle qu’elle soit
, par
laquelle on transmet son nom à son fils, est bien intéressante pour
un père. »
L’évêque de la Rochelle, s’insurgeant contre
la loi, défend même aux prêtres de son diocèse, de faire une
distinction entre leur qualité d’officiers d’état civil et leurs
fonctions de ministres de la religion catholique et leur dit :
« Comment pourriez-vous déclarer,
même au nom de la
loi
, légitime et indissoluble, une union contractée contre les
règles et les ordonnances de l’Église ? Ne craignez point de
déclarer à ceux qui se présenteront devant vous, que votre
ministère est spécialement et même uniquement réservé aux
fidèles. »
Cette injonction faite par un évêque aux curés
de son diocèse, était la démonstration péremptoire que l’on ne
pouvait laisser au clergé catholique la moindre part dans la tenue
des registres de l’état civil. Ce n’est cependant qu’en 1792 que la
loi décida que les officiers de l’état civil n’auraient plus aucun
caractère religieux, conformément aux principes ainsi posés par la
constitution de 1791 : « La loi ne considère le mariage
que comme
un contrat Civil.
Le pouvoir législatif établira
pour tous les habitants,
sans distinction
, le mode par
lequel les naissances, les mariages et les décès seront constatés,
et il désignera les officiers publics qui recevront et conserveront
ces actes. »
Le mandement lancé par l’évêque de la Rochelle
contre l’édit qui se bornait, ainsi que le déclarait Louis XVI,
à donner dans Son royaume un état civil à ceux qui ne
professent point la vraie religion
, fut déféré au conseil du
roi et condamné à être supprimé sur ces sévères conclusions du
procureur du roi :
« C’est en abusant des droits du
sanctuaire
, c’est en profanant la mission apostolique, qu’un
évêque, en discutant une loi qu’il ne doit que respecter, ose
exciter dans son diocèse la résistance à un édit à jamais
mémorable… La discipline de l’Église et l’instruction des fidèles
imposent aux évêques le devoir de publier des mandements, mais ce
devoir doit se circonscrire dans les limites de la police
ecclésiastique. Quand le zèle des prélats, dans des cas très rares,
s’étend jusqu’aux lois civiles,
ce ne doit être
,
suivant l’esprit du christianisme
,
que pour en
recommander l’exécution
. »
Les évêques de nos jours, quand ils parlent
des lois civiles dans leurs mandements, n’oublient-ils pas aussi
trop souvent qu’ils ne devraient le faire que pour recommander
l’exécution de la loi ?
Je ne parle pas bien entendu de l’évêque
député qui, à la tribune, a déclaré que si la loi, retirant aux
fabriques pour le donner aux communes, le monopole, et par
conséquent le bénéfice des inhumations, était votée par les
chambres,
il jurait de ne pas lui obéir.
M. Freppel
peut impunément oublier à la tribune de la chambre ce que l’esprit
du christianisme lui commande de faire, comme évêque ; mais
si, dans un mandement, il reproduisait l’emprunt oratoire qu’il a
fait à Mirabeau, le gouvernement de la république, bien que plus
patient que celui de Louis XVI serait bien obligé de lui rappeler
que le rôle d’un évêque n’est pas de prêcher la
désobéissance à
la loi
.
Dans le projet d’édit qui avait été soumis à
Louis XVI, il y avait une clause permettant aux pasteurs de jouir
de tous leurs droits civils comme les autres protestants ;
lors de la publication de l’édit, cette clause avait disparu, comme
entraînant, en fait, l’abolition de peines
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