Les joyaux de la sorcière
destination : une étroite crique sablonneuse cernée de pins tordus par les vents et de rochers envahis de végétation. Et par chance il n’y avait personne mais ce n’était pas étonnant, toute l’activité du sud de l’île semblant se concentrer sur le Palazzo Ricci aux prises avec la fièvre des derniers préparatifs… Encouragés par un rayon de soleil se faufilant entre deux cumulus d’un blanc un peu grisâtre, on s’installa sur la plage. L’endroit ne manquait pas de charme encore que l’anse soit moins profonde que celle des Bascombe. Pauline prit le rôle de la mère de famille et s’occupa du campement provisoire tandis que John-Augustus déshabillé en un clin d’œil courait se jeter dans l’eau verte après que Nelly lui eut désigné, près de la pointe est, l’assemblage de rochers masquant le souterrain. Il nagea rapidement dans cette direction pour s’assurer qu’il n’y avait, de l’autre côté, aucun éventuel témoin indésirable. Adalbert et Nelly partirent « en explorateurs » en se donnant l’air de touristes prenant possession d’un endroit qui vient de les séduire. Nelly portait un sac de plage dans lequel se trouvaient les outils destinés à faire sortir les prisonniers. En outre sous leurs tricots chacun d’eux avait une arme glissée dans leurs ceintures de pantalon et de jupe.
À cinquante centimètres environ du niveau de la mer, la pierre qui fermait le souterrain était semblable à ses voisines : un bloc irrégulier coiffé de ronces qui dégringolaient le long d’un des côtés. Nelly s’en approcha puis chercha des yeux Belmont qui faisait la planche à une encablure. Il fit signe que tout était clair et elle plongea une main gantée au milieu des branches épineuses, trouva un levier de fer qu’elle montra à Adalbert. Un instant tous deux se regardèrent échangeant la même inquiétude : qu’allaient-ils trouver derrière le rocher ?
— Qui ne risque rien… commença Adalbert en sortant son pistolet qu’il arma. Allez-y, jeune fille. J’espère que ça ne fait pas trop de bruit ?
— À peine. Le mécanisme doit être régulièrement entretenu et ne déclenche aucune alarme. C’est préférable pour la discrétion de l’endroit. Fort Williams n’est pas si loin…
En effet le rocher sur lequel courait une fissure capricieuse s’ouvrit en deux morceaux inégaux découvrant une bouche obscure dans laquelle Adalbert se glissa en rasant la paroi sur laquelle il resta appuyé, la porte passée, pour observer l’intérieur. Il put voir que le couloir sablé plongeant en pente douce était nettement plus large que le passage rocheux… et qu’il était vide.
— Vous pouvez venir ! murmura-t-il. Il n’y a personne.
Nelly lui emboîta le pas, alluma sa lampe électrique et ils commencèrent leur exploration sans faire le moindre bruit. Ils s’aperçurent vite qu’un peu de jour filtrait ici et là au-dessus de leurs têtes, ce qui leur permit d’éteindre le pinceau lumineux révélateur. Un profond silence – celui toujours angoissant des souterrains – les enveloppait. Normal puisqu’ils étaient dans un repaire de contrebandiers et que ceux-ci s’activaient surtout la nuit – prudence oblige ! – et que pour cette bizarre communauté, ce jour d’épousailles devait être un jour férié.
— Dans un sens c’est une bonne chose, souffla Adalbert.
— C’est ce que je pensais : nous avons peut-être une chance de délivrer les prisonniers…
Cependant une déception les attendait quand ils parvinrent devant la prison d’Aldo : la grille était grande ouverte et l’occupant n’était visible nulle part…
— Allons voir si Betty est toujours là ! chuchota Nelly en reprenant son chemin vers le coude de la galerie. Elle saura peut-être quelque chose…
Elle était là cramponnée aux barreaux de sa cage, écoutant intensément ces bruits, cependant légers, mais que son oreille affinée par une vie quasi sauvage percevait plus aisément que d’autres encombrées pas le vacarme des villes. Nelly se précipita vers elle :
— Je vous amène un ami. Nous allons vous sortir de ce trou !
— Ce n’est pas le plus important vous m’avez apporté ce que je vous ai demandé ?
— La dynamite ? Oui mais…
— L’important pour moi, coupa sèchement Adalbert occupé à examiner la serrure, c’est ce qu’est devenu l’autre prisonnier. Le savez-vous ?
— Oui et non. Cette brute de
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