Les "Larmes" De Marie-Antoinette
Ferrals, et emportant avec lui un fabuleux saphir qui devait servir de rançon à la femme qu’il aimait alors. Une très étrange prise d’otage qui s’était achevée de façon plus étrange encore {13} ! Cette fois, son cœur n’était pas engagé, même s’il s’avouait sensible à la beauté de la jeune Caroline, et cela ôtait un peu d’intensité au drame qu’il vivait ce soir. Au fond, c’était à Pauline qu’il devait peut-être de n’avoir pas éprouvé pour la jeune fille ces coups de flamme dont Lisa ne l’avait pas complètement guéri et qu’il se reprochait ensuite avec sévérité bien qu’ils n’entamassent en rien son amour pour sa femme. Il est vrai aussi qu’en l’occurrence le remède était pire que le mal. Le souvenir de sa nuit avec Pauline s’effacerait difficilement… si tant est qu’il y parvienne un jour. Le plus affreux était qu’il n’en éprouvait aucun regret sinon celui de devoir y renoncer à jamais. Un remords ? Discret, alors !
Tout en philosophant avec lui-même, Aldo avait roulé. Peu de monde sur la route de Saint-Germain, encore moins quand il l’eut quittée pour plonger dans les bois où il eut vite fait d’atteindre le croisement indiqué sur la carte. Il y avait là trois petites maisons et un poste d’essence d’ailleurs fermé. Un homme habillé comme un ouvrier, coiffé d’une casquette et le visage caché par un foulard sombre vint se placer dans la lumière jaune des phares puis se remit en marche en lui faisant signe de le suivre. Ils s’engagèrent ainsi dans l’allée d’un jardin fermée par une barrière. Au bout du chemin était un hangar dans lequel Aldo rangea la voiture auprès d’une camionnette en tôle ondulée dont l’arrière était ouvert.
— Descendez ! ordonna l’homme à la casquette. Prenez la serviette et montez ! ajouta-t-il en désignant l’autre véhicule à l’aide du pistolet dont il était armé. Il n’y avait rien d’autre à faire qu’à obtempérer et Aldo se retrouva assis à même le métal au milieu de pots de peinture et du matériel qui allait avec.
— J’aurais préféré finir le trajet dans l’autre voiture, soupira-t-il. C’était nettement plus confortable.
— Peut-être, mais de là-dedans on ne voit rien. Asseyez-vous où vous pourrez et tenez-vous tranquille !
Les portes refermées, c’était en effet l’obscurité totale. À tâtons, Aldo se chercha une place qu’il trouva entre deux pots sentant affreusement l’huile de lin et la paroi à laquelle il s’adossa en pensant avec mélancolie qu’après un séjour dans cette boite, son smoking serait probablement fichu. C’était sans doute une réflexion frivole mais elle permettait au moins de ne pas s’appesantir sur la tournure que prenaient les événements. Ce changement de moyen de transport ne lui disait rien qui vaille même si c’était, après tout, de bonne guerre. Il aurait fallu être simple d’esprit pour indiquer aussi clairement l’endroit où devait avoir lieu l’échange. Dès que la camionnette se fut ébranlée, il pria pour que la destination définitive ne soit pas trop éloignée. On s’engagea dans ce qui ne pouvait être qu’un chemin de terre et, avec les cahots, le matériel au milieu duquel il était logé, se retrouva animé d’une vie propre.
— Je vais en sortir en loques et couvert de bleus, sans compter l’odeur ! grogna-t-il après qu’un pot, posé sans doute sur un autre, fut tombé sur l’une de ses jambes. Par chance il ne devait pas être plein ce qui rendit le contact moins douloureux. « J’espère que pour ramener Caroline ils me trouveront autre chose… »
Heureusement, on atteignit bientôt une route asphaltée sur laquelle l’engin roula sans trop de sursauts. Aldo en profita pour s’établir de façon moins aléatoire dans le coin le plus éloigné de la porte, les genoux remontés, les pieds calés sur une échelle et la précieuse serviette serrée contre son estomac.
On roula ainsi un temps qui lui parut affreusement long. Beaucoup plus d’une heure certainement avant de retrouver ce qui devait être un autre chemin vicinal si l’on en jugeait par les bonds des pots de peinture !… Enfin, tout se calma et la camionnette s’arrêta. Les portes s’ouvrirent et la lumière violente d’une puissante lampe électrique arriva dans les yeux de Morosini qu’elle aveugla.
— Descendez ! ordonna une voix rude qu’il n’avait pas encore
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