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Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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sûres que j’ai besoin de toi pour atteindre mon but.
    — Où veux-tu te rendre ?… Pourquoi ?… Quelle personne veux-tu retrouver ?
    — Voilà que tu t’engrignes ! Pour le moment, je ne puis t’en dire davantage… Sache que je ferai tout ce que tu voudras pour que tu m’emmènes.
    — Tout ?
    —  N’as-tu donc pas compris ce que je t’accorderai ?
    Il la repoussa doucement. Sa proposition était si inattendue, si énorme… Elle le regardait bien droit, un sourire frémissant aux lèvres.
    — Je dois tout à Guillaume, dit-il, et je le trahirais pour tes beaux yeux et tes promesses ? Allons donc ! De plus, as-tu pensé à ce que sont les grands chemins ? On y risque à chaque détour une mésaventure pire encore que celle dont tu as souffert présentement. Et comme tu es belle…
    — Répète ! exigea-t-elle, les yeux étincelants.
    — J’ai dit : comme tu es belle…
    —  Tu ne m’avais jamais louée ainsi !
    Elle laissait le regard du garçon pénétrer le sien sans ciller, sans que son visage eût quitté cette expression de joie et d’expectative qu’il y avait apposée.
    — Laisse-moi t’accompagner, Ogier… Si je te plais, tu ne le regretteras pas…
    Il la repoussa doucement, mais lui abandonna sa main blessée.
    — Entre nous, rien n’est possible. Didier l’avait oublié, pas moi : nous sommes proches cousins… parents…
    — Parents !
    Un rire était sorti des lèvres de Tancrède. Brusquement, cette gaieté s’interrompit. Elle demanda, en considérant cette paume crevée, enflée, d’où le sang gouttait toujours, tachant ses doigts :
    — Et si je n’étais pas la fille de Guillaume ?
    — Têtebleue !… Que dis-tu là ?… Que vas-tu chercher encore ?
    Leurs ombres s’emmêlaient sur la paille, près du corps de Saint-Rémy. Marchegai hennit d’une façon plaintive, comme s’il réprouvait leurs propos.
    — Je dis ce qui est, Ogier. Mais tu n’en sauras pas plus…
    Cette fois le garçon se dégagea brutalement :
    — Tais-toi ! Tu sais que je ne peux t’emmener… Ton père, pour moi, c’est Guillaume… Ne viens rien casser, rien salir entre lui et moi.
    Il observa les chevaux autour d’eux pour ne pas répondre au regard suppliant de la jouvencelle. Le spectacle de ces colosses paisibles le ravit une fois de plus. Cependant, cette pesante et grave tranquillité des bêtes ne fit pas naître en lui, comme à l’accoutumée, le désir de seller Marchegai et de descendre galoper dans les basses terres ; et bien que le trouble dans lequel Tancrède l’avait plongé se fut évanoui, il était encore incapable de se mouvoir et d’agir nettement.
    — Ne te courrouce point, cousine, si je refuse ta présence. C’est pour ton bien que je te parle ainsi.
    — Tu n’entreprendras pas seul ce long chemin… D’autres que toi pourront veiller sur moi… Sans doute en seront-ils heureux.
    Elle glissa un regard suggestif vers son épaule, son sein, sa hanche. Il détesta ce procédé, voulut s’éloigner mais elle l’étreignit si étroitement qu’il sentit contre lui la chaleur de son ventre.
    — Emmène-moi, beau cousin… Tu me feras passer pour un damoiseau… J’ai tout prévu, je t’en parlerai.
    — Non, dit-il en contraignant sa voix à la douceur. Pour ton bien et celui de ton père, il me faut partir sans toi… Allons, ne fais pas cette tête-là ! Et tu devrais t’en aller maintenant avant que quelque palefrenier n’arrive et te trouve en cet état.
    Elle dénoua son étreinte et jeta un regard vers la porte. Elle s’inquiétait ; Ogier en fut heureux. Elle voulut à nouveau saisir la main blessée ; il la lui refusa :
    — Non… Mes doigts remuent, c’est l’essentiel.
    Il s’approcha du logis de Beaucent et, considérant la paille aplatie :
    — Je vais regonfler ça en quelques coups de fourche.
    Il se baissa, ramassa un fragment de tissu :
    — Prends ça, cousine.
    Et comme à proximité, il découvrait sa jambe tout entière :
    — As-tu les frémaillets qui maintenaient ta robe ?
    Il ne la regardait plus, mais il savait qu’elle avait son ventre à la hauteur de sa joue. Il vit ses mains glisser le long de ses cuisses et de ses mollets, compter les broches.
    — Oui, quatre… On peut dire que tu penses à tout.
    Il se releva :
    — Si Griveau trouvait ici quelque chose qui t’appartienne, il te dénoncerait…
    Tancrède fit quelques pas en arrière. Elle trébucha contre le

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