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Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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robe ; maintenant qu’il avait à sa portée ces seins fermes aux tétins de la couleur et de la grosseur des noisettes, et qu’il pensait aussi à cet écu de bourre brune sur lequel le sexe de Didier s’était abattu, son esprit devait affronter une meute de sentiments inconnus, résolument contraires à l’honnêteté. Il avait jugé la concupiscence de Saint-Rémy intolérable. L’infinie compassion qu’il éprouvait pour Tancrède n’était-elle pas aussi délictueuse que cette malefaim d’amour qui avait conduit l’autre aux excès ?
    — Pars… N’aie aucune inquiétude.
    — Tu es bon… Meilleur que je ne le pensais.
    Entre eux, sans doute en raison de leur singulier accord devant les armures, puis de leur alliance contre Didier, un nouveau lien s’était formé, plus fort, plus agréable – tout au moins pour lui, Ogier – que celui du cousinage.
    — Pars, insista-t-il. Il ne faut pas qu’on nous trouve ainsi.
    Toujours transie d’émoi, Tancrède essaya d’ajuster, sur sa poitrine, les lambeaux de son vêtement. La pudeur et l’inanité de ce geste eussent fait sourire le damoiseau s’il n’avait aussitôt imaginé les poignes de Didier crispées sur ces rondeurs entre lesquelles le gros rubis du collier avait tenu bon. La jouvencelle se méprit sur l’expression du visage proche du sien.
    — As-tu mal ?
    — Non… Ne te fais aucun souci… Je souffre moins.
    Ogier mentait. « Pourvu qu’il ne m’ait pas tranché un nerf et que je puisse tenir un écu ! » Il étouffa un gémissement :
    — En vérité j’ai mal… mais je souffre pour toi.
    Tancrède effleura cette main gonflée de douleur, et d’où le sang gouttait, puis d’un doigt contourna la plaie de la joue.
    — Je suis bien près de toi, cousine.
    En fait, Ogier se sentait non seulement en harmonie délicieuse avec Tancrède ; il était également en accord avec cette pénombre fauve qui semblait engloutir la plupart des architectures de l’écurie pour ne laisser paraître que l’essentiel : ces murs blêmes hachurés par l’ombre des râteliers, ces lourdes solives entrecroisées d’où tombait çà et là quelque licol ou quelque étrivière, et surtout ces puissants chevaux dont le silence et l’immobilité constituaient peut-être un hommage à la réaction du meilleur d’entre eux : Marchegai.
    — Personne ne saura jamais… N’as-tu pas mal, toi ? Pour t’assommer, il a dû cogner fort !
    — Si, j’ai mal. Mais ça passera… Comment vas-tu annoncer cette mort ?
    — Je vais dire à ton père que j’ai surpris Didier s’apprêtant à piquer Marchegai avec une fourche et que nous nous sommes battus… Je lui raconterai comment mon destrier a fait justice. Nul témoin ne pourra contester mes dires.
    — Tu es bon.
    C’était une halte imprévue dans une journée chargée d’événements. Et une comparaison s’élaborait, au plus profond d’Ogier, entre le plaisir qu’il avait éprouvé en contemplant l’armure milanaise, puis en voulant la pénétrer, et les sensations de possession que sa cousine, à son insu, provoquait en lui.
    « Non, se dit-il pour ramener ses sens au calme, tu ne l’aimes pas… Il y a du maléfice dans l’air… Saint-Rémy t’a jeté un sort avant son trépas, ou bien c’est elle qui t’envoûte ! »
    Il ne savait comment dissiper ces impressions de tendresse et de désarroi, et s’étonnait d’être également fasciné par ce regard où, après la détresse et la fureur, se lisaient la reconnaissance et des bénignités inconnues.
    — Pars, dit-il. Nous nous verrons comme convenu à la vesprée.
    — À quoi bon attendre !
    — Attendre quoi ?
    Était-ce par inconscience ou par perversité qu’elle excitait en lui ces velléités d’attouchements ? Elle ne tenait plus les pans de son fasset, et de nouveau il voyait entièrement sa poitrine.
    — Pars !
    Il avait trop envie de caresser ces mamelons, d’en évaluer la texture, d’en sucer même les tétins ! C’était comme une de ces faims qui vous assaillent au retour des longues chevauchées, et vous creusent, vous enfièvrent, vous agitent d’inextinguibles tremblements jusqu’à ce qu’elles soient assouvies.
    — Je veux partir avec toi.
    Tancrède avait baissé la tête ; il eut ses cheveux sur les lèvres.
    — À Gratot ? Tu n’y songes pas !
    — Non, cousin, pas jusque-là… Je te quitterai en chemin… Les voies que je veux emprunter sont si peu

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