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Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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messire ?
    — D’Angleterre. Du Cheshire, si tu veux en savoir plus. Et toi ?
    — De Normandie… J’achève mes enfances en Périgord.
    — Vas-tu y demeurer ?
    — Non. J’allais repartir pour mon pays dans quelques jours.
    — Eh bien, il te faut guerpir sans tarder sitôt que tu seras sorti d’ici. Le terroir où tu as vécu n’est plus sûr à compter de cette nuit… Le Périgord tout entier n’est plus sûr.
    L’avait-il été un jour ? se demanda Ogier. Maintes fois, il avait entendu son oncle tonner contre les traîtres. Il n’était pas surprenant que les routiers et les Anglais pussent, en certains lieux, avancer aisément. Ils avaient des complicités un peu partout, et surtout le long de la marche de Guyenne. Après avoir essayé de se rallier Fargandy d’Estissac, Taleyrand de Grignols, Mathe d’Albret [237] , Édouard III avait voulu mettre de son côté le Puy-Saint-Front, Bergerac, Mont-de-Dôme. En vain. Et tous les bons seigneurs du pays s’étaient réjouis. C’était loin dans le temps déjà… Douze ans après, Raymond de Montaut, sire de Mussidan, et Bernard d’Albret n’avaient pas craint de proclamer leur ralliement aux Goddons. Albret, qui voulait l’héritage de sa sœur Mathe, s’était fait accompagner, pour l’obtenir, du sénéchal de Gascogne tandis que ses partisans, commandés par Raymond de Montaut, s’emparaient de Saint-Astier. D’autres s’étaient joints à eux. Même invisible et lointaine, l’Angleterre exerçait encore, sur certains seigneurs, une espèce de fascination.
    — Quoi que vous puissiez penser, messire, vous n’aurez rien sans mal en Périgord, continua le damoiseau en se contraignant à rire. Tenez, lorsque j’y suis arrivé, votre roi venait d’envoyer, sur ces terres où il fait bon vivre, Guillaume Longuespée et Hugues de Vivonne pour recevoir la foi de ceux qui voudraient se donner à lui. Ils sont venus chez mon oncle et en sont partis au grand galop [238] .
    — C’est que ton oncle est un sot. Il a tout à gagner à être des nôtres !
    — Rien que le déshonneur, messire !… Avant le Périgord, vous avez mis avec Montfort la Bretagne à feu et à sang, et je crois que vous continuez… Toutes ces batailles ne vous ont donc pas rassasiés ?… Ici, ce n’est pas la Bretagne. Nous aurons à cœur de vous prouver que vous êtes moins forts qu’il vous semble !
    Sous cet aiguillon, le routier s’agita :
    — Damoiseau, je te souhaite de ne jamais connaître notre force !
    Ogier ferma ses paupières. Dormir… Dormir tellement il se sentait las… Et tandis que le silence l’enveloppait, Anne apparut dans ses pensées. Avait-elle chaud ? Avait-elle peur ? Pensait-elle à lui ? Thibaut la respectait-il ?
    — Combien êtes-vous, messire ?
    — Que t’importe !… Dans quelques semaines, en dépit de tout ce que tu penses, le pays nous appartiendra. Bergerac se soumettra sans doute avant dimanche. Ensuite, nous prendrons Langon : Aymon Lyon, l’écuyer de Derby, mènera l’assaut… La ville cédera !
    — Pourquoi pas le Puy-Saint-Front ou, si vous préférez : Périgueux, tant vous avez grand appétit ?
    — Pour le moment, c’est comme un bon plat qui fermente. Nous sommes peu pressés de l’avaler.
    — Un jour, notre souverain vous refoulera !
    L’inconnu eut un rire compatissant :
    — Votre roi est un idiot. Toutes ses entreprises échouent, tu le sais bien ! Au début de son règne, il a guerroyé contre son vassal, le comte de Flandre. Des milliers de morts pour rien… Il s’est tourné vers son second vassal pour le duché d’Aquitaine : Édouard III… Le vassal, désormais, va dominer ce roi que vos grands seigneurs ne sont pas allés chercher sur les marches d’un trône, mais dans des grimoires abandonnés on ne sait où…
    — Messire ! Même s’il est le petit-fils du roi de Fer, personne en ce royaume ne veut de votre Édouard !
    — Personne ?… Damoiseau, sache ceci : le nombre de nos alliés grossit de jour en jour.
    — Par la contrainte ou l’intérêt, non par le cœur !
    — Vois-tu, cette guerre me peine. Est-ce d’ailleurs une guerre, après tout ? Nos souverains sont de la même famille, et mieux que ça : de deux familles aussi françaises l’une que l’autre.
    — Holà, messire !… Je ne vous suis plus !
    — Je me demande ce que tes maîtres ont pu t’enseigner !
    — À faire la guerre.
    — Sache au moins pourquoi tu

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