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Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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eussent voulu voir décollé par le géant à tête noire qui, sa grosse lame sur l’épaule, pénétrait dans la chapelle.
    Précédant son oncle et Blanquefort, Ogier s’était précipité vers son père. Il le débarrassa de son linceul.
    — Ah ! dit-il, c’est fini… Vous voilà libre.
    L’expression d’hébétude ou de résignation qui, depuis le début de la cérémonie, contractait la figure de Godefroy d’Argouges avait disparu. Sous sa barbe crasseuse, la tendresse et l’humilité se disputaient ses traits.
    — Mon gars ! Tu as vu… Pourrais-je survivre à tant d’abaissement ?
    — Il le faut, Père !
    Ogier saisit son couteau et coupa les liens tendus sur la poitrine oppressée.
    — Vous avez de bons compagnons… À défaut de les voir quand le suaire vous couvrait, vous avez pu ouïr leur défense.
    — Ils ont agi bien tard… À quoi bon vivre ainsi ? J’aurais dû trépasser sur le pont du Christophe… Et ce roi qui m’a condamné sans savoir ! Il n’est rien qu’un chevalier médiocre et le plus mauvais capitaine du royaume… Ah ! Guillaume, vous étiez trois cents, m’a-t-on dit. Trois cents contre cette poignée d’hommes vils qu’il vous fallait détruire… Et vous n’avez rien fait ! Ils sont saufs, prêts à recommencer.
    — C’est vrai, convint Guillaume nullement affecté par ce reproche. Mais crois-tu que je suis resté inactif ? J’ai essayé de rallier des hommes à notre cause. J’ai échoué tant ils craignent et le roi et Blainville.
    — Jamais je n’oublierai, Père, sanglota Ogier en replongeant sa lame dans son étui. Je devine quelle vergogne est la vôtre, mais vous adjure de vivre… Pour mère, pour Aude et pour moi ! De plus, il faut vous revancher du mal qu’on vous a fait !
    Blanquefort et Rechignac aidèrent le seigneur de Gratot à se mettre debout, tandis qu’Ogier continuait :
    — Le traître, c’est ce suppôt du diable… Je prie Dieu qu’il me vienne en aide.
    Il se signa, imité par son oncle et tous leurs compagnons, puis continua, désolé :
    — Je ne peux, hélas, le prouver… Père, et vous aussi, messires qui nous entourez… Sachez-le : la nuit même de la bataille, je l’ai vu, une lanterne à la main, faire des signaux aux Goddons.
    Le jouvenceau épiait tous les visages autour de lui pour y trouver de l’ébahissement sinon de la colère. Il n’y vit que de l’incrédulité, sauf sur celui de son père.
    — Ce n’est pas tout, messires, dit-il avec une fureur à laquelle Blanquefort parut compatir. Tandis que vous vous battiez encore avec l’espérance de vaincre et que je gagnais la terre, j’ai vu Blainville dans un fustereau que j’ai suivi.
    — Il fuyait ! s’exclama Lancelot de Longval.
    — Il est vrai, dit Guillaume de Rechignac, que je ne l’ai pas vu dans la presse… Dis-nous-en davantage, mon neveu.
    — C’était au plus fort de votre infortune, quand je gagnais la côte à la nage… Entouré d’Anglais, Blainville allait voir Artevelde, et sans doute Édouard… La capture de mon père a retardé ses desseins.
    — Comment sais-tu cela ? demanda Ernauton de Penne.
    — Ils parlaient… Blainville a d’ailleurs, peu après, estoqué son compagnon… Le gars en savait trop et devenait effronté.
    — Sais-tu son nom ? demanda Évrecy.
    — Regnault.
    — Regnault ! répéta Lancelot de Longval. Par Dieu, il est vrai qu’un de ses serviteurs s’appelle ainsi.
    — Il devait avoir vingt ans… Ce qui est certain, c’est que je ne l’ai jamais rencontré en Normandie.
    — Regnault logeait au petit hôtel que Blainville habite lors de ses séjours à Paris… près de la porte Barbette.
    — On devait les attendre à terre, continua Ogier, car lorsqu’il nous a trouvés, mon père et moi, avec sa maudite herpaille [109] , ce malandrin, sans être vêtu de neuf, avait un plastron de fer sur le corps… Il n’en portait jamais sur le Christophe…
    —  Cordieu ! soupira Godefroy d’Argouges. Maintenant que tu dis cela, mon fils, je pense qu’à part ce sergent, Ramonnet, les autres ne pipaient pas… C’étaient sûrement des Flamands !
    — Mais leurs livrées, Père ?
    — Préparées depuis longtemps en quelque endroit convenu. Blainville devait avoir un sauf-conduit pour galoper sans crainte sur ces terres.
    — Mais les quatre Anglais !… Ils étaient leurs alliés !
    — Blainville et Ramonnet n’ont que faire d’en occire. S’il le

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