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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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mères, leurs frères, leurs sœurs, leurs tantes et leurs cousins, tous les dieux et les héros de leurs lignées, sans parler de leurs chiens, chats, moutons et chèvres et même les rats dans les granges de leurs hilotes, qui pencheraient la tête de consternation et devraient partir en catimini à Athènes ou dans une autre ville où il y avait de vrais hommes, capables de foutre vraiment un arbre.
    Cet arbre est l’ennemi ! Il faut baiser l’ennemi !
    Et l’épreuve durerait toute la nuit et, à la seconde veille, les garçons en auraient été réduits à vomir et à chier par incontinence, leurs corps complètement brisés d’épuisement. Viendraient l’aube et les sacrifices du matin, et avec eux la clémence et le pardon, et les garçons devraient affronter une autre journée d’exercices sans avoir eu une minute de sommeil.
    C’était donc le tourment qui les attendait alors que Polynice leur lacérait le visage. Tous leurs nez avaient été cassés. Tous les visages des garçons étaient ensanglantés. Polynice faisait une pause, pour se reposer le bras après ces coups, lorsque Alexandros se passa inconsciemment la main sur le visage sanglant.
    — Qu’est-ce que tu es en train de faire, petit enculé ? lui cria Polynice en se précipitant immédiatement sur lui.
    — J’essuie le sang, seigneur.
    — Pourquoi ?
    — Pour y voir clair, seigneur.
    — Et qui t’a dit que tu avais le droit d’y voir clair ?
    Et Polynice reprit ses sarcasmes. Pourquoi Alexandros croyait-il donc que la division s’entraînait de nuit ? N’était-ce pas pour apprendre à se battre sans y voir clair ? Est-ce qu’Alexandros croyait qu’il aurait pendant le combat le loisir de s’arrêter pour essuyer le sang ? Ce devait être ça. Alexandros ferait signe à l’ennemi, qui s’arrêterait poliment pour que le garçon pût se tirer une crotte du nez ou essuyer un caillot sur son front.
    — Je te le demande de nouveau : est-ce que c’est un pot de chambre ?
    — Non, seigneur, c’est mon bouclier.
    Et Polynice cingla une fois de plus le visage d’Alexandros avec le trépied.
    — Mon… ? demanda-t-il avec fureur. Mon bouclier ?
    Dienekès regardait d’en haut, mortifié. Alexandros n’était que trop conscient de ce que son mentor voyait tout ; il parut rassembler toute son énergie pour garder son calme. Il avança d’un pas, portant le bouclier en garde. Il se redressa devant Polynice et récita de la voix la plus forte et la plus claire :
    Ceci est mon bouclier.
    Je le porte devant moi dans la bataille,
    mais il n’appartient pas qu’à moi.
    Il protège mon frère à ma gauche.
    Il protège ma ville.
    Je ne laisserai jamais mon frère
    ni ma cité
    hors de sa protection.
    Je mourrai mon bouclier devant moi,
    face à l’ennemi.
    Clamé d’une voix forte, le dernier mot du garçon résonna dans la vallée. Deux mille cinq cents hommes écoutaient et observaient. Ils virent Polynice hocher la tête, satisfait. Il aboya un ordre. Les garçons se remirent en formation, chacun portant son bouclier de la façon réglementaire et le posant contre son genou.
    — Levez les boucliers !
    Les garçons se penchèrent pour les saisir. Polynice balança son trépied. Avec un claquement qu’on entendit du fond de la vallée, les baguettes heurtèrent le bronze du bouclier d’Alexandros. Puis il frappa de la sorte les autres boucliers l’un après l’autre. Tous les boucliers étaient en place et la ligne était protégée. Il recommença de la droite, puis de la gauche. Il fit signe à l’ eirenê du peloton et recula d’un pas. Les garçons se tenaient au garde-à-vous, les boucliers hauts tandis que le sang se coagulait sur leurs nez cassés et leurs joues.
    Polynice répéta son ordre àl’ eirenê : ces fils de putes devraient baiser un arbre jusqu’à la fin de la seconde veille, puis s’entraîner jusqu’à l’aube. Il passa une fois de plus la ligne en revue, regardant chaque garçon dans les yeux et il s’arrêta devant Alexandros.
    — Ton nez était trop joli, fils d’Olympias, lui dit-il en jetant le tripode à ses pieds. C’était un nez de fille. Je le préfère maintenant.

2
    L’un des garçons mourut cette nuit-là. Il s’appelait Hermion et on le surnommait « Montagne ». À quatorze ans, il était aussi robuste que n’importe quel garçon de sa classe d’âge, voire de la classe au-dessus, mais la déshydratation combinée à l’épuisement eut

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