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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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le fils du Coq, jouait dehors avec deux gamins nus, dont mon propre fils Scamandride. Aretê les considéra un moment avec une certaine tristesse, me sembla-t-il.
    — Les dieux nous devancent toujours, ne crois-tu pas, Xéon ?
    C’était la première fois qu’elle confirmait tacitement ce que personne n’avait le courage de lui demander : elle n’avait pas prévu les conséquences de son action, la nuit des krypteia, quand elle avait sauvé la vie de l’enfant.
    Elle déblaya la table et y disposa les articles pour le ballot de son mari, dont la responsabilité lui revenait : la trousse de chirurgie, roulée dans un épais cuir de vache et qui pouvait éventuellement servir d’éclisse ou qui, si on l’étalait sur la peau, pouvait également servir de pansement pour une blessure. Les trois aiguilles courbes d’or égyptien, que les Spartiates appelaient des hameçons, avec la bobine de catgut et la lancette d’acier, pour recoudre des chairs. Les compresses de lin blanchi, les garrots de cuir, les « crocs de chien », des pinces à dents en aiguille pour extraire les pointes de flèches et, plus souvent, les éclats de métal qui volaient dans les chocs de l’acier sur du fer et du fer sur le bronze.
    Puis de l’argent. Une bourse d’oboles d’Égine, que les guerriers n’avaient pas le droit de porter sur eux, mais qui, lorsqu’on la découvrait par bonheur dans le paquetage d’un servant, se révélait utile dans un marché de rencontre ou derrière un chariot de vivandier, pour se procurer des denrées oubliées ou quelque nourriture roborative.
    Venaient ensuite ces articles purement personnels, petites surprises et talismans de superstition, témoins secrets de l’amour. Une figurine de femme en cire colorée, un ruban à cheveux d’une fille, une amulette d’ambre sculptée par la main maladroite d’une enfant. Elle me confia également un paquet de douceurs et friandises, des gâteaux aux grains de sésame et des figues confites.
    — Tu peux manger ta part, mais gardes-en quelques-uns pour mon mari, dit-elle avec un sourire.
    Elle me réservait toujours un cadeau et, ce jour-là, ce fut une bourse de pièces athéniennes, vingt en tout, des tétradrachmes, presque trois mois de salaire pour un rameur professionnel ou un hoplite athénien. Je fus étonné qu’elle possédât autant d’argent, fût-ce à titre personnel, et stupéfait par son extravagante générosité. Ces « chouettes », comme on les appelait en raison de l’image frappée à leur avers, n’avaient pas seulement cours dans la cité d’Athéna, mais dans toute la Grèce.
    — Quand tu as accompagné mon époux dans son ambassade à Athènes, le mois dernier, dit-elle pour rompre mon mutisme, as-tu finalement eu l’occasion de rendre visite à ta cousine Diomaque ? Car c’est son nom, n’est-ce pas ?
    Je lui avais rendu visite, en effet, et elle le savait. Mon vœu ancien avait été à la fin exaucé. C’était Dienekès qui m’avait lui-même envoyé vers Diomaque. Je devinai le propos d’Aretê, et je lui demandai si c’était elle qui avait tout mijoté.
    — Nous, les Lacédémoniennes, ne pouvons porter ni vêtements raffinés, ni bijoux, ni fards. Il serait inhumain à l’extrême, ne le crois-tu pas, de nous interdire aussi une innocente petite intrigue ?
    Et elle sourit, attendant ma réponse.
    — Eh bien ? demanda-t-elle.
    — Eh bien quoi ?
    Ma femme Thereia bavardait dehors avec les autres femmes de la ferme. Je me raidis.
    — Ma cousine est une femme mariée. Et je le suis aussi.
    Les yeux d’Aretê brillèrent de malice.
    — Tu ne serais pas le premier époux qu’uniraient à une autre les liens de l’amour. Et elle ne serait pas non plus la première épouse.
    Puis l’espièglerie déserta son regard. Elle devint grave et presque triste.
    — Les dieux nous ont joué le même tour à mon mari et à moi.
    Elle se leva, montrant la porte et la cour de la ferme.
    — Viens, allons marcher.
    Elle gravit pieds nus une petite pente qui menait à un endroit ombragé sous des chênes. Dans quel autre pays que Lacédémone les plantes des pieds d’une dame de naissance seraient-elles tellement endurcies qu’elle ne sentirait pas les pointes des feuilles de chêne ?
    — Tu sais, Xéon, que j’ai été la femme de mon beau-frère avant d’être celle de Dienekès.
    Je l’avais appris de Dienekès lui-même.
    — Il s’appelait Iatroclès. Je sais que tu connais

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