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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Josèphe t’en apporterait la preuve si tu lisais l’hébreu… Ses Antiquités judaïques…
    —  Messire, je me moque de ce Flavius Josèphe ! Sa vérité n’est pas bonne !
    — Vas-tu dire qu’elle n’est pas bonne parce qu’il était Juif ?
    — Non… Elle est mauvaise parce qu’elle…
    — Dis-le donc : parce qu’elle te trouble ! Sache que de lignée davidique et royale, Jésus voulut régner sur Israël. C’était son droit… C’était même son devoir. Or, s’il fut crucifié la tête en haut, c’est en tant que rebelle et maufaiteur…
    Ogier voulut se lever ; la main du vieillard s’agrippa à sa manche et le contraignit à se rasseoir.
    — Cette vérité te brûle comme elle m’a brûlé, moi aussi… Je ne te demande pas de la faire tienne ! Je ne veux même pas décrier ton Jésus… Il faut que tu saches, pourtant, que les Templiers se réservaient le droit de révéler leur découverte, preuves à l’appui, quand le monde serait digne de la recevoir ; quand l’Ordre aurait suffisamment triomphé partout pour accomplir en Occident et en Orient l’unité du genre humain… Car tu penses bien que si nous avions professé et révélé la Vraie Doctrine, nous nous serions condamnés à périr sous les tourments de l’Inquisition !
    — C’est ce qui s’est produit ! J’y vois là une volonté divine.
    Benoît Sirvin haussa les épaules :
    — Dieu n’intervient pas dans la vie aussi aisément que tu le crois… ou veux le croire. C’est parce que nous étions riches que Philippe IV décida de nous anéantir…
    — J’en conviens, mais il vous savait hérétiques !
    — C’est ta vérité, c’est la vérité des clercs qui est mensongère !… L’Église a exploité les textes, combattu les réalités, falsifié les évidences… Quant à Philippe IV, l’excommunié, cela lui allait bien, cette sainte colère !… Il osait punir un Pape qui se regimbait contre lui et s’instaurait le défenseur de l’Église !… Moi, je sais que Jésus n’était pas d’essence divine, qu’il n’est pas né d’une vierge et qu’il fut crucifié comme faux prophète pour ses propres péchés, à commencer par celui de se prétendre fils de Dieu !
    — Votre hérésie, messire, m’épouvante !
    — Hérésie ? Nous avons combattu pour la foi catholique, nous maintenions la sainte Communion, nous suivions assidûment les offices… Nous avons servi Dieu, mais nullement Jésus !
    — Cela revenait au même : servir le Père ou le Fils…
    — Non !… Le crucifié fut un homme comme nous… Que ton esprit s’éclaire, Ogier ! Qu’il admette que les Romains ne permettaient pas aux peuples asservis de rendre leur justice… Jamais Pilate ne se serait lavé les mains d’une exécution ordonnée par le Sanhédrin… La Croix est un supplice romain ; les Juifs lapidaient. S’ils avaient voulu châtier Jésus, ils l’auraient lapidé comme Étienne… Jamais, enfin, un procurateur romain n’aurait condamné un homme pour une raison religieuse si celle-ci ne pouvait nuire à Rome… Il se moquait qu’on blasphémât Yahvé… Jésus ne fut pas crucifié comme prophète et blasphémateur, mais comme malandrin : il s’était rebellé contre Rome ; il descendait de David : c’était un roi des Juifs en quête d’un royaume !
    — C’était le fils de Dieu !
    Bras croisés, Ogier défiait le vieillard. Il s’était dit, en l’accompagnant, qu’il allait apprendre un secret – d’espèce tangible – or, il était en butte à des mots sacrilèges ; il les pouvait contester, mais ses réfutations, si véhémentes qu’elles pussent être, reposaient sur une foi reçue sans atermoiements et vérifications, parce que cela devait être ainsi : on ne réfute pas les Évangiles. L’ancien Templier s’appuyait lui aussi sur des textes anciens et sur deux siècles de travaux patients, indécents. « Jésus, un malandrin ! » Il eût dû s’ébaudir de cette assertion sacrilège ; au contraire, il était accablé, pantelant. Furieux de se sentir et de paraître pitoyable, il se leva si brusquement que le vieillard ne put le retenir, et traversa le pré pour rejoindre Marchegai, toujours aussi quiet, et qu’il dessella. Il soulagea ensuite Plantamor. Il avait souhaité, par ces quelques mouvements, éteindre ou apaiser les feux de ses pensées. Il n’en fut rien. « Cet homme est le diable !… Je crois en Vous, Jésus !  Je crois

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