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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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trouvaient le plus près de le rejoindre. Ne quittant pas le sable des yeux, Stanley espéra que Croft ne le remarquerait pas. Il y eut une pause, une attente de plusieurs minutes, puis Croft et Wilson et Martinez sortirent des broussailles et s’en revinrent le long de la plage.
    « On en a eu deux, fit Croft. Je pense pas qu’y en a eu d’autres, ou alors ils auraient laissé leur barda en foutant le camp. » Il cracha dans le sable. « Qui a été blessé ?
    – Minetta », dit Goldstein. Il se tenait agenouillé à côté de Minetta, pressant un pansement de secours sur la jambe du blessé.
    « Laisse voir », dit Croft. Il fendit le pantalon de Minetta, regarda la blessure. « C’est qu’une écorchure, dit-il.
    –  Si c’était toi, t’aurais pas dit ça », gémit Minetta.
    Croft grimaça un sourire. « T’en mourras pas, mon gars. » Il regarda les hommes qui faisaient cercle autour de lui. « Sacré nom de Dieu, fit-il, dispersons-nous. Peut y avoir d’autres Japonais qui traînent dans le coin. » Les hommes parlaient et babillaient d’abondance, soulagés mais nerveux". Croft consulta sa montre. « On n’a que quarante minutes jusqu’à l’arrivée du camion. Dispersez-vous sur la plage et ouvrez l’œil. C’est fini de décharger pour aujourd’hui. »
    Il se tourna vers le pilote de l’une des embarcations. « C’est vous autres qu’êtes de garde cette nuit, au dépôt ?
    – Oui.
    – Avec ces Japonais dans les parages, je parie que vous dormirez pas beaucoup. » Il alluma une cigarette et s’approcha de Minetta. « Toi tu bouges pas d’ici, petit gars, jusqu’à l’arrivée du camion. T’as qu’à presser ce pansement sur ta jambe et il t’arrivera rien du tout. »
    Stanley et Brown se couchèrent sur leur estomac, échangeant des phrases et regardant la jungle. Stanley se sentait épuisé. Il s’efforçait d’ignorer sa panique, mais il n’arrêtait pas de penser combien ils s’étaient tous cru en sécurité alors que des Japonais-avaient rôdé alentour. « On sait jamais quand on est à l’abri », se dit-il. Une intense horreur le gagnait, qu’il réprima avec difficulté. Ses nerfs semblaient l’avoir lâché. Il se vit sur le point de dire quelque chose d’absurde, et, obéissant à la première pensée qui lui traversa l’esprit, il proféra : « Me demande comment Gallagher a pris ça ?
    – Qu’est-ce que tu veux dire ?
    – Eh bien tu sais, les Japonais tués et lui qui pense à sa femme.
    – Eh, fit Brown, il a même pas fait le rapport entre les deux. »
    Stanley regarda Gallagher, lequel parlait paisiblement à Wilson. « Il a l’air de récupérer », dit-il.
    Brown haussa les épaules. « Ça me fait de la peine pour lui, mais si tu veux savoir, il a peut-être de la chance.
    – Tu y penses pas, dis.
    – On sait jamais comme on est bien quand on s’est débarrassé d’une femme. Je connais pas la femme de Gallagher, mais il est pas costaud lui, il est probablement pas capable de donner tout son plein à une femme. Foutre, elles te font cocu même quand tu leur en donnes qu’elles ont de quoi se rappeler, alors ça m’étonnerait pas beaucoup qu’elle a fait sa petite noce, spécialement dans les premiers mois, vu qu’il y avait pas de risque à cause du moutard qui lui venait.
    – Tu penses jamais qu’à ça », grogna Stanley. Dans ce moment il haïssait Brown. Le mépris que celui-ci affichait pour les femmes piquait la jalousie de Stanley, excitait ses craintes, qu’il refoulait d’ordinaire. Pendant un court moment il fut à demi convaincu que sa femme le cocu-fiait, et encore qu’il eût repoussé cette pensée, elle le laissa troublé et nerveux.
    « Je te dirai ce que je pense moi de ce qui vient de se passer à l’instant, dit Brown. T’es assis la à causer, et vlan ! quelque chose démarre. On sait jamais ce qui va te tomber sur le ciboulot. Te crois que Minetta n’a pas peur en ce moment ? Il apprend ce que c’est. Moi, si tu veux savoir, jusqu’à ce que j’aie pas remis les pieds en Amérique y a pas une seule seconde que j’arrêterai de penser que je sais jamais quand ça sera mon tour d’écoper un mauvais coup. Suffit d’un rien et t’es fait, voilà tout. »
    Une inexprimable anxiété s’emparait de Stanley. Il comprenait vaguement qu’elle était due en partie à sa peur de la mort, une peur devenue concrète pour la première fois, mais il savait aussi que

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