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Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812

Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812

Titel: Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre De Lacretelle
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insatisfait.
À Naples, Lamartine connut les seules minutes d'apaisement et d'équilibre moral de toute sa jeunesse. Il y lut «des bêtises» et en fit pas mal ; il écrivit des vers agréables mais dans le goût du temps, et il apparaît encore ici pleinement que chez lui, les grandes choses, ne s'engendreront jamais que dans la tristesse. À ne considérer strictement que ses résultats, ce voyage d'Italie ne lui fournit que des thèmes lyriques un peu factices et dépourvus d'originalité ; il ne fut jamais fait pour chanter l'allégresse, mais la douleur.
À la fin de janvier 1812 pourtant, il en arriva à être saturé de plaisirs, «sans émulation et sans curiosité pour rien».
    «Sans l'espoir de te voir arriver, écrit-il alors à Virieu, il y a longtemps que j'aurais secoué la poussière de mes pieds. Je suis sans le sol, je viens de me mettre à jouer, j'ai gagné en deux jours une quarantaine de piastres. Je vais peut-être les reperdre ce soir en voulant pousser plus loin. Je maudis tout.» C'était la réaction habituelle ; la lassitude succédant sans transition à l'enthousiasme.
Sous l'empire d'un tel état d'esprit et dans la situation pécuniaire où il se trouvait, rien ne le retenait plus à Naples, si ce n'est l'idée de reprendre sa vie monotone à Milly. Il regagna pourtant la France, mais sans hâte, s'attardant quelques semaines encore à Florence, puis à Rome. Après un court arrêt sur les bords du lac Majeur il traversa la Suisse et arriva à Mâcon au début de mai [J. I., table des matières.].
L'accueil qu'on lui fit fut assez froid ; on en trouve la preuve tacite dans la disparition de quelques feuillets du Journal intime, feuillets qui sont cités à la table du petit cahier avec la mention : retour d'Alphonse, oisiveté, découragement. Cette mutilation, comme beaucoup d'autres, est l'œuvre de Lamartine. Lorsqu'il rédigea à la fin de sa vie le Manuscrit de ma mère, il n'hésita pas, craignant sans doute que la postérité ne les retournât contre lui, à détruire plusieurs pages où sa mère avait noté en pleurant toutes les manifestations de son caractère ombrageux et difficile.
Car le jeune homme s'accommoda mal de la petite vie régulière et simple qu'il lui fallut reprendre au retour. Après dix mois d'indépendance, le contraste fut violent et insupportable, d'autant qu'il avait pris en Italie le goût de plaisirs insoupçonnés jusqu'alors et l'habitude de dépenses qu'il ne pouvait guère satisfaire sous l'œil sévère de l'oncle de Montceau.
    Après le golfe de Naples et sa lumière, les collines de Milly lui parurent grises, sans horizon. Il devint sombre, incapable d'un effort pour se reprendre, s'enferma dans sa chambre à pleurer [J. I., 16 juin 1812.].
À traîner ainsi son désœuvrement et sa mélancolie, il finit par inquiéter même son père qui, pour l'occuper un peu et l'attacher davantage à ce pays qu'il avait pris en horreur, le fit nommer maire du village [Id., 25 juin, et archives communales de Milly. Il demeura maire jusqu'en 1815, mais s'occupa rarement des affaires du village, sauf au moment de l'invasion de 1814 où il dut fournir les réquisitions de l'armée autrichienne.]. À la fin de mai, n'y tenant plus, il se sauva à Montculot, sa retraite habituelle lorsqu'il voulait vivre avec ses souvenirs, car le brave abbé n'était pas gênant et le laissait libre [Id., 27 mai 1812.]. Là, il lui emprunta quelques louis et hanté par Paris où il pensait retrouver un peu des plaisirs de Naples, il partit s'y installer les trois premières semaines d'août. En cette saison, la ville était vide et il s'y ennuya mortellement. Le 20, on le retrouve à Milly, insupportable à tous, même à sa mère qui le trouve «nerveux et un peu dur» ; on devine ce que «un peu dur» signifie sous cette plume.
Comme toujours dans ces crises, fréquentes on l'a vu, depuis trois ans, il se réfugia dans la solitude, écœuré de cette vie «trop longue». Puis l'imagination se mit à vagabonder et lui rendit quelque force : il rêva d'un ermitage à la Rousseau où Virieu et Guichard seraient ses compagnons et, pour se distraire, il rima en quinze jours le premier acte d'un Saül, fuyant le monde non plus cette fois par timidité, mais par dégoût et mépris ; le mariage de sa sœur le «dérangeait» et le «cher beau-frère» l'ennuyait.
    Petite vanité d'adolescent qui vient de découvrir le monde et médit de sa mesquine province. Il ne faut pas

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