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Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812

Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812

Titel: Les Origines et la Jeunesse de Lamartine 1790-1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre De Lacretelle
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personne qui réponde aux vôtres. Voilà du moins ce que j'ai vu jusqu'à Bologne. Quand je trouve un Français, je l'embrasserais volontiers. Je parle à tous nos soldats que je rencontre, ils sont plus aimables qu'un seigneur italien.» Il oubliait qu'être Français, à cette époque d'oppression française, n'était pas un titre de recommandation à l'étranger.
Arrivé à Livourne au début de septembre, il demeura deux mois dans cette ville anti-artistique s'il en fut, assez désabusé et regrettant comme toujours ce qu'il avait fui si joyeusement. Pendant que M. Haste s'occupait des affaires de son beau-père, il poussa quelques pointes à Florence, à Pise, à Vienne, guettant l'arrivée prochaine de Virieu pour entreprendre le voyage de Rome. Mais celui-ci se faisait attendre et un événement imprévu vint encore retarder le projet.
    M. Haste perdit son père et fut obligé avec sa femme de regagner Lyon sans retard.
«Alphonse est alors resté seul, écrit la mère le 9 novembre. Ses oncles et tantes étaient d'avis qu'il revînt aussi, mais nous avons trouvé avec mon mari qu'il serait trop cruel de ne pas le laisser aller jusqu'à Rome dont il est si près et nous lui avons permis de continuer jusque-là. Il a aussi demandé d'aller passer huit jours à Naples chez M. de Fréminville, auditeur sous-préfet à Livourne, avec qui il s'est fort lié, et nous avons accordé. Le seul obstacle à la prolongation de son voyage est l'argent : ses oncles et tantes ont donné entre eux soixante-douze louis, et nous, ce que nous avons pu, ce qui n'est pas bien considérable. Enfin, il ménagera de son mieux pour pouvoir aller plus loin ; cela l'accoutumera à l'économie dont il avait grand besoin.»
Ainsi, grâce à l'exquise bonté de sa mère, Lamartine triomphait encore ; aussitôt il quitta Livourne pour se rendre à Rome où il arriva le 1er novembre, sans Virieu retenu toujours au Grand-Lemps [Carnet de voyage.].
Ici, la documentation devient difficile ; nous avons bien plusieurs lettres de lui qui exposent sa vie et ses impressions dans la Ville éternelle, mais elles se contredisent parfaitement. Le carnet de voyage reflète le désenchantement le plus absolu ; la Correspondance est vive, spontanée, pleine d'enthousiasme : c'est que l'un fut écrit, on le sait, avec l'idée vague d'une publication future, tandis que les lettres nous donnent l'expression de ses véritables sentiments.
La description qu'il a laissée de Rome dans son carnet est sèche et soignée ; c'est un tableau banal, sans plus, mais la seule note personnelle qu'on y rencontre mérite une mention, car elle prouve une connaissance avertie de la nature perpétuellement insatisfaite qu'il possède.
    On a vu sa joie enfantine au départ de Mâcon, et tout ce qu'il a mis en œuvre à Livourne pour atteindre Rome ; une fois au but, voici ce qu'il en pense : «Je m'étais trop accoutumé, dit-il, à l'idée de voir Rome, ce nom-là avait perdu pour moi de son enchantement ; je l'avais prononcé trop souvent, l'illusion était diminuée. C'est un malheureux effet qu'avec mon caractère j'éprouve partout et pour tout. De loin c'est quelque chose, et de près... c'est moins que ne me promettait mon imagination qui va toujours trop loin et me ménage sans cesse de tristes surprises ; elle promet plus que la réalité ne peut donner et, ici comme ailleurs, elle m'avait trompé.» Il n'y a pas dans cet aveu que des souvenirs littéraires.
Le reste des impressions de voyage est quelconque, les clairs de lune, les ombres vaporeuse s'y mêlent à des souvenirs classiques et à de pompeuses réflexions ; les lettres ont un autre prix.
«Je suis à présent fou de Rome, écrit-il à Mme Haste le 15 novembre ; c'est un paradis pour moi. Le matin, je cours, et j'ai bien de quoi m'occuper, je vous assure ; je dîne à quatre heures avec d'aimables compagnons de course, et puis une longue leçon d'italien et puis des artistes à aller voir, et le spectacle et quelques converzationi ne me laissent pas une minute d'ennuy... Florence n'est rien auprès de Rome, je me pendrais si je ne l'avais pas vue. Je forme l'agréable projet d'y venir passer une bonne partie de ma vie, c'est le paradis des artistes et des oisifs [Lettre publiée par M. Doumic, dans le Correspondant (op. cit.).].»
«Poète» et «artiste», au sens assez vague qu'il donnait alors à ces mots, Lamartine ne crut jamais l'être plus sincèrement qu'à cette époque.
    Artiste,

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