Les panzers de la mort
à mon capitaine, j’en ai attrapé pour un mois de compagnie de discipline. Après, je te jure, je les regardais dans le dictionnaire les mots avant de les dire !
Une grenade interrompit la conversation et nous précipita à l’abri. Derrière nous, quelqu’un se mit à pousser des cris aigus et d’autres grenades clapotèrent dans le marais, nous aspergeant d’eau croupie.
– Pour un établissement de bains… ! ragea Stege.
– C’est ça qu’on appelle le bain russe, demanda le légionnaire au milieu d’un Rire enroué.
– La 2 e section prend ses positions ici, commanda le lieutenant. Sa voix tremblait un peu, Il n’avait pas encore l’habitude du front. Pluto se battait avec son lourd fusil-mitrailleur et jurait en poussant les sacs de sable pour arriver à s’installer. Un projectile claqua comme une gifle à peu de distance de sa tête : – Fumiers ! Cria le grand docker, on va vous en envoyer, tas de dégoûtants !
Furieux, il jeta une grenade vers les postes russes pour souligner sa menace.
– Ainsi les gars, attention ! prévint Alte. Fins tireurs comme vous voyez, et Ils tirent avec des explosives.
Un autre projectile arriva, en sifflant et s’écrasa sur le front d’un tirailleur de blindés, dont la cervelle éclaboussa l’épaule du légionnaire : celui-d fit la grimace et la gratta avec sa baïonnette.
Les tirailleurs de la 104 e nous dirent au revoir et nous confièrent qu’ils nous laissaient dans la mélasse.
– Méfiez-vous surtout le matin vers 7 heures et ensuite vers 17 heures, au moment où Ivan se déchaîne. Le reste du temps vous n’avez guère que des fusils-mitrailleurs et des grenades, et aussi des amusettes de fins tireurs, mais pour le reste, Ils suivent les horaires syndicaux !
Nous allumâmes les lanternes Hindenbourg dans les abris que la 2 e section essayait de rendre confortables. Porta avait sorti de vieilles cartes Crasseuses et arborait un haut-de-forme tout bosselé, ramassé je ne sais où et posé élégamment de biais. La soie noire en était toute râpée, et pour cacher cette misère, Il avait peint un cercle rouge et bleu autour du tube qui ressemblait à la cheminée d’un cargo. Le monocle, venant de Roumanie, était comiquement vissé dans son œil, mais la guerre l’avait gratifié d’une profonde fêlure qui donnait à cet œil une expression absolument idiote au travers du verre cerclé d’écaillé brune, que fixait à l’épaulette un gros cordon noir provenant des dessous d’une fille !
Il plaça les cartes à l’envers sur une table et cria :
– Venez ici, les enfants et faites vos jeux, mais je vous préviens, pas de crédit ! J’ai déjà trinqué après une attaque où des imbéciles ont eu le culot de se faire bousiller avant de me payer leurs dettes ! Mise minimum : dix marks ou 100 roubles.
Il fit douze paquets et retourna le treizième : c’était un as de pique. Impassible, Il ramassa les mise et les fit tomber dans un étui de masque à gaz pendu à son cou. Il gagna huit fois de suite ce qui finit par nous rendre plus circonspects dans nos mises. Aucun de nous n’osait avouer ce que nous pensions tous : Porta triche. Mais il avait, sous chaque bras, une mitraillette et derrière lui, le petit légionnaire caressait un P 38 au cran de sûreté relevé…
Alte lisait un livre que sa femme lui avait donné au départ de la garnison. De temps en temps, Il posait le livre et sortait de son vieux portefeuille quelques photos de sa femme et de ses trois enfants. Nous savions, bien qu’il n’en parlât guère, qu’il souffrait terriblement de la séparation et on le voyait parfois pleurer sur les photos des siens.
Le capitaine von Barring, accompagné du lieutenant Halter entra dans l’abri et se mit à bavarder à mi-voix avec Alte.
– D’après les dires d’un déserteur, Il faut s’attendre à une attaque vers 15 heures, confia Alte à von Barring.
– Bon, veille à ce que tout soit prêt. Le chef de la compagnie de tirailleurs que nous avons relevée dit que l’endroit est mauvais. Les ordres sont de tenir coûte que coûte sur la cote 268,9. Elle commande la région, mais, si Ivan s’y installe, toute la division doit filer ou être prise comme dans un étau et Ivan le sait.
– Ce qui veut dire, constate Alte, en réfléchissant, que tôt ou tard on aura le grand jeu, et les blindés sur le dos ?
– Non, pas tant que le marais n’est pas gelé, mais lorsque
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