Les panzers de la mort
précises, tout commença… La colline explosa dans un ouragan noir projeté vers le ciel. Pendant une seconde régna un silence absolu, puis des tonnes de terre et de pierres retombèrent en grêle sur nos abris. En même temps l’artillerie russe se déchaînait sauvagement et une pluie de grenades, arrosa ce qui avait été, hier encore, nos positions sur la hauteur. Leur tir fut court mais terrible, Il pulvérisa les antennes et les communications téléphoniques sans toutefois nous causer des pertes sérieuses. Une fumée âcre, étouffante, nous enveloppait, lorsque tout à coup, à travers elle, nous vîmes surgir d’énormes masses d’infanterie russe à l’assaut des tranchées que nous venions d’abandonner.
L’ennemi ne prévoyait sûrement aucune résistance et ne visait qu’à occuper le sommet de la cote 268,9, avant que les Allemands fussent revenus de leur surprise.
– Bataillon d’assaut en avant ! hurla von Bar-Ring, qui bondit hors de la tranchée en balayant tout devant lui des rafales de son fusil-mitrailleur. Ce fut électrique ! Comme des fous, nous nous ruons à l’assaut du Cratère colossal où nous arrivons quelques minutes avant les Russes, et, du sommet, nous les arrosons d’un feu meurtrier.
Un combat à dix mètres, fusils-mitrailleurs aux hanches et à coup de lance-flammes à de quoi faire verdir de peur le diable en personne !
Les Russes, transformés en torches vivantes, jetaient leurs armes et tournoyaient dans une panique grandissante sous le pilonnage de nos canons portés au rouge. Certains cependant s’étaient accrochés de l’autre côté de la colline, à 25 mètres de nos trous et voila que leur artillerie entrait dans la danse, coiffant pendant vingt-quatre heures, d’une cloche de feu, la cote 268,9.
Des prisonniers nous apprirent que nous avions en face de nous une troupe d’élite, la 21 e brigade de pionniers de la Garde. Lorsque le tir de l’artillerie se déplaça sur nos arrières, le combat prit un caractère sauvage. Petit-Frère couvert de sang des pieds à la tête, brandissait comme deux massues sa mitraillette et sa pelle aiguisée. Porta se battait avec rage, son lance-flammes depuis longtemps vide, lui servant de fléau, le haut de forme en tête et poussant des hurlements d’assassin.
Le petit légionnaire, armé d’une mitraillette russe, ne le quittait pas, tandis qu’heure après heure, le corps à corps continuait et que les vagues d’assaut succédaient aux vagues d’assaut dans l’étroite tranchée. Parfois les camarades en arrivaient à s’entretuer. A la fin Il fallut plier et par des prodiges insensés, abandonnant morts et blessés, rejoindre nos positions de départ pendant que notre artillerie stoppait la poursuite ennemie.
Haletants, nous tombâmes sur le sol boueux. Bauer avait la moitié de la joue emportée et ne s’en aperçut qu’au moment où les infirmiers arrivèrent ; Möller le nez écrasé, Petit Frère un doigt arraché, mais, chose étrange, celui-ci refusa d’être évacué bien qu’il fût dans un état voisin de la folie : – Je reste chez les bandits… ! C’est ici que je veux crever ! vociféra-t-Il en frappant l’infirmier. Soudain, il s’élança sur le talus de la tranchée et envoya une rafale vers les Russes en mugissant littéralement des injures folles. Une violente fusillade lui répondit, mais lui, complètement à découvert, pris d’un fou rire insensé et le fusil-mitrailleur à la hanche, continuait à balayer les tranchées russes.
Bauer s’accrochait à lui, essayant de ramener ce dément à la raison. Peine perdue. Comme un roc, sur ses jambes écartées, Il était inébranlable et peu à peu sa folie gagnait les camarades. Porta, avec haut de forme et lance-flammes, ainsi que le petit légionnaire bondirent à ses côtés en riant hystériquement et ouvrirent un feu d’enfer sur l’ennemi assaisonné d’injures sans nom.
– En avant ! Vive la Légion ! hurla Kalb.
Il partit à l’assaut à coup de grenades. Porta jeta en l’air son chapeau, le rattrapa au vol, l’enfonça sur sa tête et cria : En avant !
Petit Frère et Pluto tiraient déjà comme des furieux et les restants du bataillon, ivres de la même démence, bondirent comme des fauves derrière eux. Les Russes furent, à la lettre balayés. On tuait, on assommait, on mordait, on éventrait, on vociférait… la cote 268,9 fut enlevée par une lame de fond. Pendant trois semaines, Il
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