Les panzers de la mort
endroit convenable !
– Qu’est-ce qui vous prend ? balbutia Heide qui nous regardait, perplexe, tour à tour.
– Ce qu’il y a ? gronda Bauer. Que penses-tu qu’il y ait, dégoûtant ?
Heide, comme un tigre qui va bondir, recula lentement, le nagan pointé vers le petit légionnaire qui s’approchait pas à pas du bureaucratique et élégant sous-officier.
– N’avance pas, clown marocain, ou tu vas éternuer rouge ! siffla Heide en fixant éperdu, le petit homme aux yeux venimeux.
Nous avions tous vu le sous-officier retirer le Cran de sûreté et nous attendions le crépitement sec du nagan. Mais personne n’eut à bouger. Plus rapide que la pensée, le pied du légionnaire atteignit la main qui tenait l’arme. Heide eut un cri de douleur et se plia en deux tandis que le nagan tombait sur le sol. Petit-Frère le ramassa, arracha le chargeur et le jeta dans un coin.
Le sous-officier se redressa et fit un mouvement vers le légionnaire, mais celui-ci, avec la violence d’un ressort, lui cassa d’un coup de pied, le nez et plusieurs dents.
– Ah ! ricana Kalb, tu voulais tirer… quelle horreur ! Les écritures c’est moins dangereux, hein ?
Heide reprenait un peu ses esprits et à demi relevé sur le sol, essuyait le sang qui inondait sa figure.
– Qu’est-ce que vous insinuez ? Je suis venu ici pour boire tranquillement et vous m’attaquez sans raison.
Le légionnaire se rasseyait : – Brave type ! Bien innocent, n’est-ce pas ? Lève-toi, salopard, ou tu vas prendre un couteau de tranchée dans la gueule.
Heide se hissa péniblement sur le banc et Porta lui tendit un verre de bière. Il regarda avec gratitude le rouquin en haut-de-forme, dont les yeux bleus porcins animaient seuls l’impassible visage ; mais, au moment où il allait boire, Porta d’un coup sec envoya d’un seul coup le verre à l’autre bout de la pièce.
Petit-Frère se mit à rire bruyamment. Fou de rage, le sous-officier sauta par-dessus la table et pourchassa à travers la pièce le géant qui ricanait.
– C’est pas moi… c’est Portal
IL s’arrêta brusquement et d’une ruade de cheval, envoya Heide voler contre le mur où Illuiadministra un passage à tabac en règle. On entendit des cris étouffés. Quelques seaux d’eau ranimèrent le sous-officier qui finit par s’écrouler sans connaissance sur la table.
– Infect gratte-papier ! Cracha Pluto à son adresse.
Le cuistot émergea de derrière son comptoir et nous convia à une tournée générale de vodka.
Il serrait plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille, assura le légionnaire, qu’à Petit-Frère d’entrer dans le jardin d’Allah.
En outre, sa ligne de vie, prophétisa Porta, est particulièrement courte !
Ces deux nouvelles désolèrent le naïf géant qui se lança dans une confession générale destinée à lui ouvrir les portes du Paradis.
Mais une attaque ennemie interrompît cette pieuse tentative.
PETIT-FRÈRE REÇOIT L’ABSOLUTION
V INGT et un ! cria Porta.
Il abattit les cartes sur la caisse à munitions qui nous servait de table. Incrédule, nous vérifiâmes le jeu graisseux et Petit-Frère alla même jusqu’à compter les points sur ses doigts. Mais il n’y avait pas l’ombre d’un doute : le total était bien vingt et un.
Porta, enchanté, attira prestement ses gains, les fit tomber dans un casque d’acier et souleva son chapeau haut-de-forme.
– On continue les gars ?
C’était la 37 e fois que Porta gagnait. Petit-Frère qui avait tout perdu renâcla, bien que Porta, grand seigneur, offrit de lui prêter à 100 %.
– Faudrait être dingo, dit Stege. Autant aller trouver « 60 % de bénef » et lui emprunter 100 marks. Mais de toute façon on perdra quand même.
Petit-Frère réfléchit un instant, puis se pencha confidentiellement vers Porta.
– Tu ne triches pas, Porta, n’est-ce pas ?
Porta glissa une paupière aux cils incolores, nettoya son monocle et le vissa fermement dans son petit œil porcin.
– Non, Joseph Porta ne triche pas, Petit-Frère.
– Tu parles ! Ce serait pas croyable, répondit le géant qui respira, soulagé. Un doute terrible venait de disparaître.
Alte entra au même moment dans l’abri : – Les enfants, cette fois, c’est la fin ! La deuxième section doit couvrir le décrochage du 104 e régiment lorsqu’il va déguerpir. C’est en train. Pas un seul d’entre nous n’en sortira
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