Les Piliers de la Terre
cela ! cria-t-elle à l’assemblée. N’oubliez
jamais le sort d’un homme qui insulte les Hamleigh ! » Elle promena
autour d’elle un regard de défi et William sentit son cœur se gonfler
d’orgueil. L’honneur de la famille était retrouvé.
Mère se
détourna et Père reprit la parole. « Conduisez-le à sa chambre, dit-il.
Gardez-le bien. »
Bartholomew
se releva.
« Emmène
la fille aussi », dit Père à William.
William
prit d’une main ferme le bras d’Aliena. Il aimait la toucher. Il allait la
conduire jusqu’à sa chambre. Et qui savait ce qui pourrait arriver là-haut.
S’il restait seul avec elle, il pourrait faire d’elle ce qu’il voulait. Il
pourrait déchirer ses vêtements et regarder sa nudité. Il pourrait…
Le comte
dit : « Que Matthew l’intendant vienne avec nous, pour s’occuper de
ma fille. »
Père jeta
un coup d’œil à Matthew. « Avec lui, dit-il en souriant, elle ne risquera
rien. Entendu. »
William
dévisagea Aliena. Il la trouva pâle, mais plus belle encore quand elle avait
peur. C’était si excitant de la voir ainsi vulnérable. Il aurait voulu écraser
sous le sien ce corps généreux et voir la peur sur son visage tandis qu’il la
forçait à écarter les cuisses. Dans un brusque élan, il approcha son visage
tout près de celui de la jeune fille et dit à voix basse : « Je veux
toujours vous épouser. »
Elle
s’écarta. « M’épouser ? dit-elle d’une voix forte et vibrante de
mépris. Je préférerais mourir plutôt que de vous épouser, méprisable crapaud
gonflé de vanité ! »
Les
chevaliers échangèrent de grands sourires et quelques serviteurs ricanèrent.
William sentit son visage s’empourprer.
Mère fit
brusquement un pas en avant et gifla Aliena. Bartholomew s’avança pour la
défendre, mais les chevaliers le retinrent.
« Taisez-vous,
dit Mère à Aliena. Vous n’êtes plus une noble demoiselle. Vous êtes la fille
d’un traître et bientôt vous serez pauvre et affamée. Vous n’êtes plus assez
bonne pour mon fils maintenant. Éloignez-vous de ma vue et que je n’entende pas
un mot. »
Aliena
tourna les talons. William lui lâcha le bras et elle suivit son père. En la regardant
partir, William comprit que le goût suave de la vengeance avait pris dans sa
bouche une saveur amère.
Une
véritable héroïne, tout comme une princesse de poème, songea Jack, pétrifié
d’admiration en la voyant gravir l’escalier, la tête haute. Toute la salle
resta silencieuse jusqu’à ce qu’elle eût disparu. Jack fixait l’endroit où elle
n’était plus. Un des chevaliers s’approcha et dit : « Qui est le
cuisinier ? »
Le
cuisinier était trop prudent pour se porter volontaire, mais quelqu’un d’autre
le désigna.
« Tu
vas aller préparer le dîner, s’entendit-il ordonner. Prends tes aides et va à
la cuisine. » L’homme choisit dans la foule une demi-douzaine de gens. Le
chevalier haussa le ton. « Vous autres, déguerpissez. Quittez le château.
Faites vite et n’essayez pas d’emporter plus que vos propres biens, si vous
tenez à la vie. Nous avons déjà tous du sang sur nos épées. Allez ! »
Les
malheureux se bousculèrent pour sortir. La mère de Jack lui prit la main et Tom
saisit celle de Martha. Alfred les suivait. Ils portaient tous leur manteau et
ils n’avaient d’autre bien que leurs vêtements et leurs couteaux. Ils
descendirent les marches, traversèrent le pont, l’enceinte inférieure, le poste
de garde, fuyant le château sans s’arrêter. Lorsqu’ils débouchèrent dans le
champ de l’autre côté de la douve, la tension cessa comme une corde d’arc qu’on
coupe et ils se mirent à parler de leurs épreuves avec beaucoup d’agitation.
Jack les écoutait vaguement. Chacun évoquait ses actes de bravoure. Lui n’avait
pas été brave : il s’était tout simplement enfui.
Aliena
était la seule à avoir fait montre de bravoure. Quand elle était arrivée au
donjon et qu’elle avait découvert qu’au lieu d’un abri c’était un piège, elle
s’était occupée des serviteurs et des enfants, en leur disant de s’asseoir, de
se taire et de ne pas se mettre sur le chemin des combattants, interpellant les
hommes des Hamleigh lorsqu’ils brutalisaient leurs prisonniers ou brandissaient
leurs épées sous le nez des gens désarmés, comme si elle était absolument invulnérable.
La mère de
Jack lui ébouriffa les cheveux. « A quoi
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