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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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centaines de lumières qui dansaient,
tanguaient à la surface de l’eau, vœux vacillants partis au gré du courant
jusqu’au tournant de la rivière où ils disparurent.
     
    Tout cet
été-là. Jack se fit conteur pour Aliena.
    Ils se
retrouvaient le dimanche, d’abord de temps en temps, puis régulièrement, dans
la clairière, auprès de la petite cascade. Il lui parlait de Charlemagne et de
ses chevaliers, de Guillaume d’Orange et des Sarrasins. Quand il racontait,
Jack était totalement absorbé par ses récits.
    Aliena
aimait voir les expressions se succéder sur son visage. Il s’indignait en
parlant d’injustice, la traîtrise le consternait, il vibrait en évoquant la
bravoure d’un chevalier et une mort héroïque l’émouvait aux larmes ; et
ses émotions étaient contagieuses, si bien qu’elle aussi en était toute remuée.
Certains poèmes étaient trop longs pour qu’il les récitât en un seul
après-midi ; lorsqu’il devait conter une histoire en plusieurs épisodes,
il s’interrompait toujours au moment le plus passionnant, si bien qu’Aliena
passait toute la semaine dans l’impatience de connaître la suite.
    Sans bien
saisir elle-même pourquoi, elle ne soufflait mot à personne de ces rencontres.
D’ailleurs, qui aurait compris le plaisir qu’elle prenait à écouter réciter des
poèmes ? Elle laissait donc croire qu’elle partait pour sa promenade
habituelle du dimanche ; et, sans la consulter, Jack en faisait autant.
Bientôt, leurs rencontres prirent une tournure secrète. Moins ils en parlaient,
moins ils pourraient en parler. Et c’est ainsi que leurs rendez-vous devinrent
clandestins.
    Un
dimanche, pour changer. Aliena à son tour lut à Jack Le Roman d’Alexandre. Contrairement aux poèmes que disait le jeune homme, pleins d’intrigues, de
hautes politiques et de soudains trépas au combat, le roman d’Aliena évoquait
des histoires d’amour et de magie. Jack se passionna pour le genre nouveau et,
le dimanche suivant, il se lança dans un récit de son invention, inspiré du
même style.
    C’était
une chaude journée de la fin d’août. Aliena portait des sandales et une robe de
toile légère. Dans la forêt tranquille, silencieuse, on n’entendait que le
ruissellement de la cascade et les intonations variées de la voix de Jack. Le
récit commençait de façon conventionnelle par la description d’un brave
chevalier, grand et fort, redoutable au combat et armé d’une épée magique, à
qui l’on confiait une tâche difficile : voyager jusqu’à une lointaine
terre d’Orient pour en rapporter une vigne qui produisait des rubis. Mais
l’intrigue dévia bientôt de son cours habituel. Le chevalier ayant été tué, le
récit se concentra sur son écuyer, un brave jeune homme de dix-sept ans sans le
sou, désespérément amoureux de la fille du roi, une belle princesse
inaccessible. L’écuyer fit le vœu d’accomplir la tâche dont on avait chargé son
maître, bien qu’il fût jeune, inexpérimenté et ne possédât qu’un poney pie et
un arc.
    Au lieu de
vaincre un ennemi d’un formidable coup d’épée magique, comme le faisait
d’ordinaire le héros de ces histoires, l’écuyer menait des combats désespérés
qu’il ne remportait que par chance ou par ingéniosité, échappant plusieurs fois
à la mort d’un cheveu. Il était terrifié par les ennemis qu’il affrontait –
contrairement aux chevaliers sans peur de Charlemagne –, mais il ne se détournait
jamais de sa mission. Hélas ! Sa tâche, comme son amour, semblait
désespérée.
    Aliena fut
plus captivée par le personnage de l’écuyer qu’elle ne l’avait été par celui du
maître. Elle craignait pour lui quand il s’aventurait en territoire ennemi,
sursautait dès que l’épée d’un géant le menaçait et soupirait lorsqu’il
s’allongeait pour prendre du repos en rêvant à la princesse lointaine. L’amour
était constamment au centre du récit.
    Pour
finir, à la stupéfaction de toute la cour, il rapportait la vigne productrice
de rubis. « Mais l’écuyer ne se souciait guère, dit Jack avec un petit
geste méprisant, de tous ces barons et de tous ces comtes. Il ne s’intéressait
qu’à une personne. Cette nuit-là, il se glissa dans sa chambre, évitant les
gardes avec une ruse qu’il avait apprise lors de son voyage en Orient. Il
arriva auprès du lit et contempla le visage de sa bien-aimée. » En
parlant, Jack regardait Aliena dans les yeux.

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