Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les proies de l'officier

Les proies de l'officier

Titel: Les proies de l'officier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
Vom Netzwerk:
déjà vu quelqu’un se faire fendre à un mètre de vous comme une bûche sous un coup de cognée ?
    Lefine s’arrêta de crier. Il s’étonna de se découvrir debout, si penché en avant qu’il s’appuyait des deux mains sur la chaise de son ami.
    — Excuse-moi, Fernand. Allez, viens, on va se trouver de jolis quartiers pour la nuit. Et de quoi manger, aussi.
    Lefine se redressa lentement.
    — Comme une bûche, oui.

 
    18.
    Le 4 e corps avait reçu l’ordre de prendre ses cantonnements dans les faubourgs de Smolensk. Tout le monde se disputait maintenant les meilleures places. Le logement de Lefine et Margont dépassait leurs espérances. Piquebois, Saber et un certain capitaine Fanselin, des lanciers rouges de la Garde, s’étaient tout bonnement emparés d’un palais. Lefine se tenait en extase devant cette façade jaune décorée de stuc blanc. Les frontons des fenêtres étaient surchargés d’élégantes arabesques. De larges colonnes à feuilles d’acanthe encadraient la porte. D’autres colonnes antiques, plus petites, s’élevaient du balcon pour soutenir une avancée du toit. Ce dernier était surmonté d’une coupole. En dépit de son originalité, ce palais respectait les règles traditionnelles des maisons seigneuriales russes. Le bâtiment central était relié à deux ailes par des galeries en arc de cercle, aménageant ainsi une élégante place au pied de l’édifice. L’aile droite avait malheureusement brûlé. Saber, ivre de joie d’avoir trouvé demeure à sa mesure, se montrait intarissable.
    — C’est la résidence d’une famille d’aristocrates russes d’origine polonaise, les Valiouski. Ils sont restés, je vais vous les présenter. Ils adorent les Français ! Le comte n’a qu’une idée, que l’Empereur ampute la Russie du Niémen jusqu’à Smolensk pour reconstituer la Grande Pologne. Il m’a même dit : « Sachez qu’il y aura toujours assez de terre en Pologne pour ensevelir tous les Russes qui s’y trouvent, qu’ils soient morts ou encore vivants. » Il est en train de nous faire préparer un festin.
    — Un festin ? répéta Margont, sceptique face aux bonheurs qui s’annonçaient.
    — Et leur fille ! Une beauté d’une noblesse...
    Saber se voyait déjà général comte de la Grande Pologne passant ses étés dans « son » palais de Smolensk et ses hivers à Paris.
    — Mais ça ne s’est pas fait comme ça, croyez-moi. Le bâtiment fourmillait de cuirassiers lorsque nous sommes arrivés. Je m’en vais trouver leur lieutenant pour lui expliquer poliment que ce quartier a été attribué au 84 e régiment et il m’envoie paître. Moi, le lieutenant Saber !
    — Impensable ! s’exclama Margont en prenant un air scandalisé.
    — Je te jure que c’est vrai ! Je suis revenu avec Piquebois et un lancier rouge qui voulait aussi s’installer ici : tu aurais vu comment Piquebois s’est occupé d’eux. Il y avait dix cuirassiers dans le salon, eh bien Piquebois se campe avec assurance au milieu de la pièce et s’exclame : « Par Dieu ! Voilà que mon logement pullule de scarabées à coquille argentée ! » Alors il attrape le lieutenant par la manche comme... comme s’il avait ramassé un véritable scarabée par la patte ! Et il l’entraîne dehors avec une telle assurance que l’autre se laisse faire sans broncher. On a quand même frôlé le duel quand Piquebois a ajouté : « Grande gueule, mais petit sabre. »
    — Aïe aïe aïe. Je déteste quand il reprend ses manies de hussard.
    — Un cuirassier commence à protester, mais notre lancier rouge se met à hurler : « Vous n’avez rien à foutre là, les caparaçonnés ! Dehors ! Obéissez aux consignes ! » alors que lui-même n’avait rien à y foutre non plus.
    Le lancier s’approchait justement. Il s’inclina poliment. Il avait une étrange façon de se tenir, les jambes arquées comme s’il était en permanence à cheval, avec ou sans cheval. Un « cavalier à jamais ». Ses cheveux châtains pendaient en petites nattes et sa moustache s’enroulait sur elle-même à ses deux extrémités.
    — Permettez que je me présente : capitaine Edgar Fanselin, 2 e régiment des chevau-légers lanciers de la Garde sous les ordres du général baron Édouard de Colbert-Chabanais. Dix ans de bons et loyaux services et le moral toujours excellent. Vive l’Empereur !
    — Vive l’Empereur ! s’exclamèrent Saber et Margont avec un temps de

Weitere Kostenlose Bücher