Les refuges de pierre
porterait au Champ de Rassemblement, assez vaste pour que
tous les habitants des six Cavernes qui avaient pris part à la chasse s’y
réunissent.
Jondalar partit avec son frère et quelques autres peu après l’arrivée
de leur groupe. Marthona et Willamar, qui connaissaient leur rôle dans les
rites, s’empressèrent de prendre leur place. Ayla ne savait pas quoi faire et
se sentait perdue. Elle décida de rester à l’écart et d’observer, en espérant
qu’elle ne commettrait aucune bévue.
Folara présenta à quelques-uns de ses amis – plusieurs
jeunes filles et deux jeunes garçons – la femme étrangère que son
frère avait ramenée. Ayla bavarda avec eux, ou du moins essaya. Ils avaient
déjà entendu tant d’histoires sur son compte qu’ils étaient fort impressionnés.
Soit ils avaient la langue liée de timidité, soit ils jacassaient pour
compenser. Elle n’entendit pas tout d’abord qu’on l’appelait.
— Ayla, je crois qu’ils ont besoin de toi, dit Folara en
voyant Zelandoni se diriger vers eux.
— Il va falloir l’excuser, lança la doniate un peu
sèchement au groupe d’admirateurs. Elle doit être devant avec les Zelandonia.
Ayla suivit Zelandoni, laissant derrière elle des jeunes gens
plus impressionnés encore. Quand les deux femmes furent à quelque distance, la
doniate dit à voix basse :
— Les Zelandonia ne mangent pas pendant les funérailles. Tu
marcheras avec nous, mais tu rejoindras ensuite Jondalar et Marthona pour le
repas.
Ayla ne demanda pas pourquoi elle marcherait avec les Zelandonia
et mangerait ensuite avec la famille de Jondalar. Elle n’avait aucune idée de
ce qu’on attendait d’elle. Elle se contenta de suivre quand le cortège traversa
le pont menant à En-Aval et poursuivit en direction du Champ de Rassemblement.
Les doniates ne mangeaient pas parce qu’il fallait jeûner pour
communiquer avec le Monde d’Après, et la Première savait qu’elle devrait y
faire une longue incursion pour prendre contact avec l’esprit de Thonolan. C’était
toujours difficile mais elle était désormais habituée. Le jeûne faisait partie
de la vie des Zelandonia, et elle ne s’expliquait pas pourquoi elle continuait
à grossir alors qu’elle se privait souvent de repas. Peut-être compensait-elle
le lendemain mais elle n’avait pas l’impression de manger plus que d’ordinaire.
Elle n’ignorait pas qu’aux yeux de beaucoup sa corpulence contribuait à sa
présence imposante et à son ascendant spirituel. Le seul inconvénient, c’était
qu’elle avait de plus en plus de mal à se mouvoir. Se pencher, gravir une
pente, s’asseoir par terre, ou plutôt se relever ensuite, tout devenait
difficile, mais la Mère voulait apparemment qu’elle soit énorme, et si c’était
Sa volonté, la doniate s’y pliait.
A en juger par la quantité de nourriture disposée le long de la
paroi rocheuse, au fond, loin de l’endroit où se trouvait le corps, de nombreux
Zelandonii avaient participé à la préparation du repas.
Ayla entendit quelqu’un dire : « c’est comme une
petite Réunion d’Été », et pensa : Si c’est « petit », à
quoi ressemble une vraie Réunion d’Été ? Avec près de deux cents personnes
rien que pour la Neuvième Caverne, et presque toutes celles des cinq autres,
fortement peuplées elles aussi, elle ne se souviendrait jamais de tout le
monde. Elle n’était même pas sûre qu’il y eût assez de mots pour compter autant
de gens, et elle ne pouvait en concevoir le nombre qu’en termes de grand
troupeau de bisons.
Lorsque tous les Zelandonia et chefs des Cavernes se furent
placés autour de l’abri funéraire – qu’on avait démonté, transporté
jusqu’au Champ et remonté –, les autres s’assirent par terre et
observèrent le silence. Quelqu’un avait rempli un grand plat de morceaux de
choix, notamment un jarret entier de bison. Celle Qui Était la Première le prit
et l’éleva pour le montrer à l’assistance, puis le posa près de la dépouille de
Shevonar.
— Les Zelandonii font ce festin en ton honneur, Shevonar,
dit-elle, s’adressant au mort. Rejoins-nous par la pensée pour que nous
puissions souhaiter Bon Voyage à ton esprit.
Les autres se mirent en file pour aller se servir. La plupart du
temps, lors d’une fête, le regroupement se formait au hasard, mais il s’agissait
ce jour-là d’une cérémonie funèbre, une des rares fois où l’on respectait un
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