Les refuges de pierre
ainsi que son
frère Jondalar.
Entamer le sol dur avec des pioches de pierre s’avéra très
pénible. Le soleil était haut dans le ciel ; ils avaient chaud, ils
transpiraient. Ils étouffaient sous leur cagoule de cuir mais aucun ne songea
un instant à la retirer. Ils étaient capables d’affronter la charge d’un
rhinocéros et de l’esquiver d’un pas de côté au dernier moment, mais il fallait
bien plus de courage pour braver les dangers invisibles du site sacré.
Aucun ne tenant à rester plus longtemps que nécessaire dans l’enclos
hanté par les Esprits, ils travaillaient vite, ramassant la terre ameublie par
les pioches à l’aide de pelles taillées dans les os plats de gros animaux – omoplates,
os pelvien – ou la partie plate des bois palmés d’un mégacéros. Une
extrémité avait été aiguisée puis sablée pour obtenir un tranchant qui
facilitait le travail : l’autre était attachée à un long manche. Ils
déposaient la terre sur des peaux semblables à celles qu’ils portaient afin de
pouvoir déblayer ensuite les bords de la fosse et donner de la place aux
nombreux Zelandonii qui se presseraient alentour.
Joharran adressa un signe de tête aux trois autres quand les
dernières pelletées de terre furent jetées hors du trou. C’était assez profond.
Ils rassemblèrent leurs outils et se hâtèrent de partir. Toujours sans échanger
un mot, ils s’éloignèrent des zones habitées pour se rendre en un lieu qu’ils
avaient choisi auparavant et qui était peu fréquenté.
Ils y creusèrent un autre trou, plus petit que le premier, y
firent tomber les peaux et les cagoules puis le rebouchèrent. Les pelles et les
pioches seraient replacées à l’endroit précis où on les gardait et les
fossoyeurs prenaient garde à ce qu’aucune partie des outils ne touchât leur
corps nu, excepté leurs mains rougies par l’ocre.
Ils allèrent dans une petite grotte vers le fond de la vallée,
devant laquelle était planté un poteau sculpté portant l’abelan Zelandonii et d’autres
marques. Ils remirent les outils à leur place puis repartirent aussitôt,
étreignant le poteau à deux mains au passage et murmurant à mi-voix quelques
mots pour demander la protection de la Mère. Ils empruntèrent ensuite un
sentier sinueux menant à une autre grotte, sur les hauteurs, utilisée
principalement par les Zelandonia pour les cérémonies rassemblant les hommes et
les jeunes garçons.
Les six Zelandonia des Cavernes qui avaient pris part à la
chasse tragique les y attendaient avec plusieurs acolytes. Ils avaient préparé
de l’eau très chaude, presque bouillante, et diverses variétés de plantes
contenant de la saponine. La mousse devint rouge en se mêlant à l’ocre quand
les fossoyeurs se lavèrent les mains. Puis ils les rincèrent à l’eau chaude,
au-dessus d’un trou creusé dans la terre, et les lavèrent de nouveau. Ils
curèrent même le dessous de leurs ongles avec de petits bâtons pointus. Après
une troisième ablution, les mains furent inspectées et relavées au besoin,
jusqu’à ce que chaque Zelandonii fût satisfait.
Une fois leurs mains purifiées, ils prirent des paniers d’eau
chaude, d’autres racines de saponaire et se lavèrent entièrement le corps,
cheveux compris. Ce ne fut qu’après avoir été autorisés à remettre leurs
vêtements qu’ils respirèrent mieux. Celle qui Était la Première leur donna une
coupe d’un breuvage brûlant et amer, leur demanda de se rincer d’abord la
bouche, de cracher dans un trou spécialement creusé, puis d’avaler le reste.
Ils s’exécutèrent et partirent, soulagés que leur rôle fût terminé. Personne n’aimait
se trouver au contact d’une magie aussi puissante.
En pénétrant chez Joharran, Jondalar et les autres
fossoyeurs parlaient à voix basse, encore ébranlés d’avoir rôdé à proximité des
Esprits.
— Ayla est passée, elle te cherchait, dit Proleva à
Jondalar. Elle est partie puis elle est revenue avec une infusion délicieuse.
Nous avons bavardé un peu, ensuite les autres sont venus discuter de l’organisation
du repas. Elle a proposé son aide mais j’ai répondu que Zelandoni avait sans
doute d’autres projets pour elle. Il n’y a pas longtemps qu’elle est partie. Je
dois y aller, moi aussi. J’ai laissé de la nourriture et de la tisane chaude
pour vous dans la pièce à cuire.
— Ayla t’a dit où elle allait ? demanda Jondalar.
— Chez ta
Weitere Kostenlose Bücher