Les refuges de pierre
pour vérifier leur état et choisir une
bonne position afin de lancer leurs sagaies. Un hurlement de loup – une
assez bonne imitation, jugea Ayla – donna le signal que tout était
prêt. Prévenue, elle gardait un bras autour de Loup pour lui imposer silence au
cas où il aurait été tenté de réagir. Un croassement de corbeau servit de
réponse.
Le reste des chasseurs avait encerclé le troupeau en s’efforçant
de ne pas trop l’inquiéter, tâche difficile pour un groupe aussi nombreux. Ayla
et Jondalar étaient restés à l’écart, de peur que l’odeur de Loup ne précipitât
les choses. Au signal, ils montèrent sur leurs chevaux et partirent au
galop ; Loup courait derrière eux. Tout rapides et puissants qu’ils
étaient, les aurochs n’en étaient pas moins des animaux grégaires et comptaient
de nombreux jeunes parmi eux. Les cris et les gesticulations, les objets
inconnus agités devant eux suffirent à les effrayer et, quand l’un d’eux se mit
à courir, d’autres suivirent. Affolé par l’odeur du loup et la vue de deux êtres
humains montés sur des chevaux étonnamment proches, le troupeau se rua bientôt
dans la gorge.
Le goulet ralentit les bêtes, qui se bousculèrent pour passer.
Dans la poussière soulevée par la masse meuglante, quelques-unes essayèrent de
se détacher et de prendre une autre direction, n’importe laquelle. Mais les
chasseurs, les chevaux et le loup étaient partout, les renvoyant vers le
défilé. Finalement, un vieux mâle résolu en eut assez. Il fit front, frappa le
sol du sabot, baissa les cornes et fut atteint par les traits de deux
lance-sagaies. Il tomba à genoux, bascula sur le côté. La plupart des autres
aurochs étaient passés, la barrière avait été refermée derrière eux. La tuerie
commença.
Les bêtes prises au piège s’écroulaient, frappées par des lances
de toutes sortes, longues ou courtes, à pointe de silex, d’os ou d’ivoire. Les
chasseurs se relayaient derrière les barrières qui les protégeaient des cornes
puissantes et des sabots tranchants. Les projectiles provenaient parfois de
lance-sagaies qui n’étaient pas ceux de Jondalar et d’Ayla. Certains chasseurs
entreprenants s’étaient entraînés et essayaient maintenant la nouvelle arme là
où quelques coups manqués n’auraient que peu d’importance puisque les aurochs
ne pouvaient fuir nulle part, excepté sur le sein de la Grande Terre Mère, dans
le Monde des Esprits.
En une matinée, le groupe s’était procuré assez de viande pour
nourrir tous les participants à la Réunion d’Été pendant quelque temps, et de
quoi organiser en plus un grand festin de Matrimoniales. Dès que les aurochs
avaient pénétré dans le piège, un messager avait été envoyé au camp, d’où un
second groupe partit pour aider les chasseurs, et, quand le dernier animal fut
abattu, les renforts se précipitèrent pour le dépeçage.
Il existait plusieurs façons de conserver la viande. Du fait de
la proximité des glaciers et de la couche gelée en permanence qui se trouvait
sous la surface, on pouvait transformer le permafrost en chambre froide en
creusant simplement un trou dans le sol. On pouvait aussi conserver la viande
fraîche au fond d’un lac ou d’un étang, dans les eaux profondes des rivières.
Lestée de pierres, attachée à de longues perches qui permettaient de la
retrouver plus tard, la viande pouvait se conserver un an sans trop se
détériorer. On pouvait aussi la sécher pour la conserver plusieurs années. L’inconvénient
était que le début de l’été correspondait à la saison des mouches, qui
pouvaient gâter la viande mise à sécher au soleil. Des feux dégageant beaucoup
de fumée éloignaient le gros des insectes, mais il fallait constamment
surveiller l’opération, dans une pénible atmosphère enfumée. Il restait
cependant indispensable de faire sécher une partie de la viande pour se nourrir
en voyage.
Outre la viande, la peau de l’aurochs était précieuse. On l’employait
pour fabriquer de nombreux objets, allant des outils et des récipients aux
vêtements et aux abris. La graisse permettait de se chauffer et de s’éclairer ;
les poils servaient de fibres, de doublure pour les vêtements chauds ; les
tendons et les nerfs étaient utilisés comme liens. Avec les cornes, on obtenait
des coupes, des gonds de panneau et même des bijoux. Les dents étaient aussi
souvent transformées en bijoux qu’en outils. Les
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