Les refuges de pierre
par la tendresse de son regard. Elle se demanda si Zelandoni avait
voulu des enfants. Ayla était sûre qu’avec sa connaissance des remèdes la
doniate aurait su mettre fin à une grossesse, mais il était plus malaisé de
savoir en provoquer une ou éviter une fausse couche. Comment pense-t-elle qu’une
nouvelle vie commence ou qu’on peut l’empêcher ? s’interrogea Ayla.
Lorsque Proleva reprit l’enfant dans ses bras pour l’emmener,
Loup les suivit mais Ayla le rappela.
— Tu dois retourner chez Marthona, Loup, dit-elle, ajoutant
le signe « retour à la maison ».
La maison, pour l’animal, c’était l’endroit où Ayla avait étendu
ses fourrures.
Tandis qu’une obscurité froide enveloppait la région au-delà du
cercle lumineux du feu, un grand nombre de convives quittèrent le lieu
principal de la fête. Certains, en particulier ceux qui avaient de jeunes
enfants, se retirèrent chez eux. D’autres, de jeunes couples pour la plupart,
mais aussi des gens plus âgés, gagnèrent les endroits sombres pour se livrer à
des activités plus intimes, bavardant ou s’enlaçant. Il n’était pas rare, lors
de telles fêtes, de partager un partenaire, et tant que tous étaient
consentants cela ne donnait lieu à aucun ressentiment.
Cela rappela à Ayla les fêtes pour Honorer la Mère, et si c’était
L’honorer que partager Son Don du Plaisir, Elle fut particulièrement honorée ce
soir-là. Les Zelandonii ne diffèrent pas des Mamutoï, des Sharamudoï ni des
Losadunaï, pensa-t-elle, et même leur langue est identique à celle des Lanzadonii.
Plusieurs hommes tentèrent de convaincre la belle étrangère de
partager le Don de la Mère. Ayla fut flattée de leur attention mais leur fit
clairement comprendre qu’elle ne désirait personne d’autre que Jondalar.
Lui-même éprouvait des sentiments mêlés quant à l’intérêt qu’elle
suscitait. Il était content qu’elle fût si bien accueillie par son peuple, et
fier qu’autant d’hommes admirent la femme qu’il avait ramenée, mais il aurait
préféré qu’ils ne montrent pas si ouvertement leur désir de l’étendre sur leur
fourrure – en particulier ce nouveau venu, Charezal. Il se
réjouissait qu’elle ne manifestât aucune inclination pour qui que ce fût.
La jalousie n’était pas très bien tolérée chez les Zelandonii. Elle
pouvait conduire aux discordes et aux conflits, voire aux batailles, et en tant
que communauté ils plaçaient l’harmonie et la coopération au-dessus de tout.
Dans une région qui n’était guère plus qu’une terre gelée une grande partie de
l’année, l’entraide était indispensable pour survivre. La plupart de leurs us
et coutumes visaient à maintenir une bonne entente et à décourager tout ce qui,
comme la jalousie, menaçait leurs rapports amicaux.
Jondalar savait qu’il lui serait difficile de dissimuler sa jalousie
si Ayla choisissait quelqu’un d’autre : il ne voulait la partager avec
personne. Après des années d’union, quand le confort de l’habitude céderait
parfois à l’excitation d’un partenaire nouveau, ce serait peut-être différent,
mais pas pour le moment, et au fond de lui il doutait d’avoir jamais envie de
la partager.
Plusieurs Zelandonii s’étaient mis à chanter et à danser. Ayla
tenta de se rapprocher d’eux, mais de nombreuses personnes lui barraient le
passage pour lui parler. Un homme en particulier, qui s’était tenu à la lisière
de leur groupe une bonne partie de la soirée, semblait déterminé à lui adresser
la parole. Ayla avait vaguement remarqué la présence d’un personnage insolite
mais chaque fois qu’elle avait essayé de concentrer son attention, quelqu’un d’autre
lui avait posé une question ou fait un commentaire qui l’avait distraite.
Elle leva les yeux quand un homme lui tendit une autre coupe de
barma. Bien que le breuvage fermenté lui rappelât la bouza de Talut, il était
plus fort. Un peu étourdie, elle décida qu’il était temps d’arrêter. Elle
connaissait les effets que ces boissons avaient sur elle et ne voulait pas se
montrer trop « amicale » le jour où elle rencontrait les amis et les
parents de Jondalar.
Elle sourit à l’homme qui lui offrait la coupe et s’apprêtait à
la refuser poliment, mais le choc qu’elle éprouva en le découvrant figea son
sourire.
— Je suis Brukeval, dit-il, hésitant et timide. Un cousin
de Jondalar. Il avait une voix grave et sonore, très
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