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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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tendit le cou pour boire directement au
ruisseau ; alors Hernando prit son visage entre ses mains et s’abandonna
au chagrin.
    Ils passèrent la nuit à la belle étoile, près du ruisseau.
Azirat broutait l’herbe. Hernando pleurait, inconsolé ; les images de
Fatima, de Francisco et d’Inès dansaient devant lui. Il frappa la terre à s’en
écorcher les mains, croyant entendre leurs voix et leurs rires innocents ;
il hurla de douleur au souvenir de leur odeur, de la chaleur et de la douceur
de leurs petits corps près de lui, tentant de chasser la scène inimaginable de
leur mort entre les mains d’un Ubaid qui lui apparaissait triomphant,
brandissant le cœur palpitant de Gonzalico.
    Il continua à pied la journée suivante. Tous ceux qui les
croisèrent, Azirat et lui, se demandèrent si c’était l’homme qui tirait le
cheval ou l’animal qui traînait une ombre humaine accrochée à sa bride.
Hernando attendit l’aube du troisième jour pour se risquer à monter de nouveau,
et ce fut seulement deux jours plus tard, alors que l’animal montrait des
signes évidents de récupération, qu’il passa la Calahorra et franchit le pont
romain.
     
    Hernando n’obtint pas plus de résultats qu’Abbas lorsqu’il
voulut s’informer plus amplement auprès de sa mère.
    — Pourquoi veux-tu le savoir ? finit-elle par
crier le soir même de l’arrivée de son fils à Cordoue quand, après
d’incessantes visites de condoléances, ils se retrouvèrent seuls tous les deux.
Je les ai vus ! Je les ai tous vus mourir ! Tu veux que je te raconte ?
J’ai réussi à m’échapper ou peut-être… peut-être qu’ils ne voulaient pas me
tuer. Ensuite j’ai erré toute la nuit dans la montagne avant de trouver un
sentier et de rentrer à Cordoue. Je te l’ai déjà dit.
    Aisha se laissa tomber sur une chaise, tête basse, épuisée.
Elle avait dû mentir mille fois au long de la journée ; à chaque question
des visiteurs, chaque témoignage de sympathie, chaque silence, elle avait
hésité à avouer toute la vérité à son fils devant la terrible douleur qu’elle
percevait sur son visage. Non ! Il ne le fallait pas. Hernando se
précipiterait à Tétouan. Elle le connaissait ; elle en était sûre. Et elle
perdrait le seul fils qui lui restait…
    — Pourquoi ? gronda Hernando, qui faisait les cent
pas dans la galerie, les mains crispées. J’ai besoin de savoir, mère !
J’ai besoin de les enterrer ! J’ai besoin de retrouver le fils de pute qui
les a assassinés et… !
    Aisha leva le visage en entendant l’effroyable colère
contenue dans la voix de son fils. Elle ne l’avait jamais vu ainsi ! Pas
même… dans les Alpujarras ! Elle faillit dire quelque chose, mais se tut,
épouvantée, en voyant Hernando s’érafler cruellement le dos de la main.
    — Et je jure que je le tuerai, termina-t-il, alors que
de profonds sillons de sang apparaissaient sur sa main.
     
    — Ubaid !
    Le cri brisa le paisible silence de cette matinée de la fin
août et résonna dans la montagne.
    — Ubaid ! hurla encore Hernando en direction des
bois accidentés qui s’étendaient à ses pieds.
    Il s’était arrêté tout en haut d’une colline de la Sierra
Morena, debout sur ses étriers, comme s’il prétendait se dresser sur le sommet
le plus élevé, s’offrant au regard de celui qui aurait pu être caché parmi la
végétation. Seul le bruit des animaux surpris, s’ébrouant, battant des ailes,
lui répondit.
    — Sale chien ! continua-t-il à hurler. Viens ici.
Je te tuerai ! Je te trancherai l’autre main, je te découperai en
morceaux, que je distribuerai moi-même à la vermine !
    Ses cris se perdirent dans l’immensité de la Sierra Morena.
Et le silence revint. Hernando s’affaissa sur sa monture. Comment allait-il
trouver le Manchot dans ces montagnes ? pensa-t-il. C’était le monfí qui
devait répondre à ses provocations ! Il dégaina son épée et la leva au
ciel.
    — Porc répugnant ! hurla-t-il encore.
Assassin !
     
    Sur le dos d’Azirat, il avait quitté Cordoue dès qu’il avait
pu. Il avait dit au revoir à sa mère après avoir tenté, une fois de plus, de
lui soutirer un renseignement, le plus petit indice pour commencer sa
recherche. En vain.
    — Où vas-tu ? lui avait demandé Aisha.
    — Accomplir ce que tout homme digne de ce nom doit
accomplir, mère : me venger d’Ubaid et retrouver les corps des miens.
    — Mais…
    Hernando l’avait

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