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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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s’est-il passé, Aisha ? Et Fatima, et les
enfants ?
    Aisha se retourna. Abbas se tenait là, près de la grille en
fer forgé.
    — Je…, balbutia-t-elle en ouvrant les mains. Je ne
sais…
    — Les gens disent que cette nuit, Ubaid et ses hommes…
    Aisha n’en écouta pas davantage. « Ne lui dis
rien ! Il le tuera ! » La supplique de Fatima ressurgit à sa
mémoire. On lui avait volé un autre garçon. Elle n’avait plus que ce fils aux
yeux bleus qui réclamait tant sa tendresse à Juviles, la nuit, à l’abri des regards.
Quelle allait être leur existence désormais ? Elle n’était pas prête à
mettre en danger la vie du seul enfant qui lui restait ! Fatima elle-même
l’avait implorée du regard. Pendant la nuit, à l’auberge, Aisha avait entendu
les commentaires des hommes du marquis au sujet de Brahim. Tous savaient
pourquoi ils étaient là. Par eux, elle avait appris que son mari était devenu
l’un des plus importants corsaires de Tétouan ; qu’il vivait dans une
forteresse, embellie par l’imagination des hommes, et possédait une véritable
armée à ses ordres. Il ne laisserait jamais Hernando s’approcher à nouveau de
Fatima !
    — Ils les ont tous tués ! Ubaid et ses hommes, ils
les ont tous tués ! cria-t-elle à l’attention d’Abbas. Mon Shamir, Fatima
et Francisco… La petite Inés !
    Aisha se laissa tomber par terre et éclata en sanglots. Elle
n’eut pas besoin de se forcer pour pleurer, tant la douleur la tenaillait. En
réalité, peut-être… Peut-être aurait-il mieux valu qu’ils soient tous morts
plutôt qu’aux mains de Brahim. Elle hurla vers le ciel en pensant à Shamir. Que
deviendrait son petit ? Et Fatima ? Quels malheurs leur avait
réservés Dieu ?
    Abbas ne put la consoler. Son corps robuste fléchit et il
dut s’agripper à la grille pour rester debout, s’efforçant de trouver l’air qui
lui manquait soudain. Il avait promis à son ami que le monfí ne lui causerait
aucun problème, pour eux, pour les Maures. Mais il lui avait également promis
de veiller sur sa famille pendant son séjour à Séville. Hernando le lui avait
demandé avant son départ, et le maréchal-ferrant lui avait répondu presque
sèchement :
    — Que peut-il arriver ? se rappelait-il avoir dit.
    Pendant quelques instants, seule la rumeur permanente de
l’eau qui coulait et tombait dans la fontaine de ce beau patio cordouan, à
présent désolé, accompagna Aisha et Abbas.
     
    Abbas suivit le même chemin que le troupeau de juments en
direction de la réserve royale du Lomo del Grullo : une journée jusqu’à
Ecija avec une pause à l’auberge Valcargado ; une autre jusqu’à Carmona,
en s’arrêtant à Fuentes ; une troisième jusqu’à Séville, où il se reposa à
l’auberge de Loysa, et une dernière ensuite de Séville à Villamanrique. Il
s’obligeait à marcher. Il forçait ses jambes à avancer, pas à pas, et observait
ses pieds se rapprocher tristement et douloureusement d’un destin qu’il ne
voulait pas aborder. Qu’allait-il dire à Hernando ? Comment lui annoncer
que son épouse et ses enfants avaient été assassinés par Ubaid ? Comment
lui avouer qu’il avait failli à sa parole ?
    Il avait essayé de se mettre en contact avec le Manchot
lorsqu’il attendait l’autorisation de l’écuyer royal pour partir vers le Lomo
del Grullo : il aurait voulu savoir pourquoi, il aurait même voulu
l’affronter, le tuer, mais aucun des intermédiaires qu’il utilisait
habituellement pour communiquer avec le monfí n’avait obtenu de renseignements
positifs : le Manchot et sa bande avaient disparu. Peut-être s’étaient-ils
enfoncés davantage dans la montagne et réapparaîtraient-ils un jour, mais
personne ne semblait avoir la moindre nouvelle d’Ubaid. Pour quelle raison
avait-il tué Fatima et les enfants ?
    — Mais pourquoi ? s’était également exclamé don
Diego quand il avait remis à Abbas le sauf-conduit lui permettant de se
déplacer jusqu’à Séville. N’est-il pas maure lui aussi ?
    — Hernando et lui ont eu des problèmes dans les
Alpujarras, avait précisé Abbas.
    — Au point de tuer une femme et trois enfants sans
défense ? avait répliqué le noble en agitant le document qu’il tenait à la
main. Sainte Vierge !
    Abbas avait seulement pu hausser les épaules. Don Diego
avait raison. Et il n’avait même pas été capable de retrouver les corps pour
les enterrer dignement, puisque Aisha

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