Les révoltés de Dieu
« paternaliste », car
les contemporains de Jésus ont oublié qu’on est juif par sa mère et non pas par
son père. Ils ont oublié également le rôle des femmes dans l’histoire des
Hébreux, qu’elles soient de haut rang ou de basse classe. Jésus ne fait aucune
différence entre les hommes et les femmes : ce sont des existants humains, ses frères et ses sœurs. La seule
doctrine qu’il ait vraiment répandue au cours de sa vie publique, c’est celle
de l’Amour : « Aime Dieu et ton prochain comme toi-même. » Tout
est dit dans cette formule. Et lorsqu’on l’accuse de mépriser ou de contourner
la Loi, Jésus répond qu’il n’est pas venu pour
détruire la Loi (sous-entendu mosaïque) mais pour l’accomplir . Cela
prouve d’ailleurs qu’à son époque, cette Loi était tenue en désuétude et se
desséchait à force d’être prise à la lettre dans des interprétations
sclérosantes dues à un conformisme quotidien.
Il en est ainsi dans l’épisode bien connu de la femme adultère.
À l’origine, c’est un piège que tendent les scribes et les Pharisiens à Jésus. Ils
lui amènent une femme surprise en flagrant délit d’adultère, lui disant
fielleusement : « Dans la Tora, Moshé nous a prescrit de lapider
celles-là. Toi, donc, qu’en dis-tu ? » Mais Jésus évite le piège en
se moquant ouvertement de ceux qui veulent l’éprouver. Il ne répond pas, se
contentant de se pencher et de tracer des signes sur le sable et la terre.
« Ils demeurent à le questionner. Il se redresse et leur dit : Celui
d’entre vous qui est sans faute, qu’il lui jette en premier une pierre sur elle.
Il se penche à nouveau et il écrit à terre. Eux entendent et sortent, un à un, commençant
par les plus vieux. Ieshoua demeure seul, et la femme est au milieu. Ieshoua se
redresse et lui dit : Femme, où sont-ils ? Personne ne t’a condamnée ?
Elle dit : pas un, Adôn [Seigneur] ! Alors Ieshoua lui dit : Moi
non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne faute plus. » ( Jean, VIII, 7-11, trad. Chouraqui .)
Une telle attitude en face de la Loi a de quoi dérouter et, de
fait, les « tentateurs » de Jésus abandonnent le terrain faute de
pouvoir lui opposer la moindre objection, ce qui ne les empêchera pas de
fomenter un complot contre lui dans l’ombre propice du « ce qui va de soi ».
Certes, la Loi est formelle : « L’homme qui adultère avec la femme d’un
homme, qui adultère avec la femme de son compagnon, est mis à mort, lui, l’adultère,
avec elle, l’adultère. » ( Lévitique, XX, 10 .)
Ou encore : « Quand un homme sera trouvé en couchant avec une femme
mariée à un mari, les deux meurent, l’homme couchant avec la femme et la femme
aussi. » ( Deutéronome, XXII, 22 .) On
remarquera en passant que, dans le texte évangélique, on présente à Jésus la
femme adultère, et non pas l’homme. Serait-il tout permis à l’homme, cela en
dépit de toutes les prescriptions de la Tora ? Après tout, l’Ancien
Testament est rempli d’adultères, volontaires ou non, de la part de l’homme, comme
en témoignent l’histoire de Jacob marié avec Rachel et retrouvant Léa dans son
lit, et celle du « saint » roi David, amant de Bethsabée dont il s’arrange
pour faire tuer le mari, sans parler de ses trois cent soixante-cinq concubines !
Et que dire de Tamar, déguisée en prostituée afin de coucher avec son beau-père
Juda, ou de l’unique rescapée de Jéricho, la prostituée qui a permis aux Hébreux
de conquérir la ville et d’en massacrer tous les habitants ? Décidément, les
catholiques avaient raison d’interdire la lecture de la Bible en français :
les textes contredisent formellement les principes essentiels de la morale
diffusés par l’Église.
L’ensemble de la Bible hébraïque, une fois étudiée in extenso (et non pas par fragments soigneusement
choisis et séparés de leur contexte), est en effet une suite ininterrompues d’épisodes
immondes et toujours scandaleux où, malgré les remontrances et les menaces de
Yahvé, se manifeste une révolte permanente contre Dieu et tous ses préceptes. Et
il faut bien admettre que l’Église romaine, soi-disant héritière de la pensée christique,
n’a pas fait mieux. Mais il ne faut surtout pas que cela se sache.
Ainsi en est-il du rôle de la femme dans les évangiles. Ce
rôle a été minimisé sinon éliminé par les Pères de l’Église qui se sont arrogé
le
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