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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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découvrir le motif de sa démarche alors que le père Beda Atzlhuber vit seul dans son presbytère de Metzleinsdorf.
    — Mon Père, je suis bouleversé par ce que j’ai vu au camp de concentration de Melk. Ces hommes que l’on traite… ce sont des hommes comme vous, comme moi. On nous a dit que c’étaient des criminels, des bandits   : ce n’est pas vrai… J’ai parlé à un prêtre… Il y a des prêtres, des instituteurs, des ingénieurs, des ouvriers…
    — Je sais.
    — Ils meurent de faim. On les assassine.
    — Je sais.
    — Le prêtre, un Français, m’a demandé des hosties consacrées.
    Ce même soir, l’abbé Deswarte, après l’appel, se confiait à l’abbé Domaigné   :
    — J’ai été changé de Kommando. Demain, et sans doute les jours qui vont suivre, je vais travailler hors de l’enceinte du camp.
    L’abbé Deswarte raconta sa conversation avec le menuisier, la promesse de ce dernier.
    — J’ai (8) pris le relais, mais j’avais beaucoup plus de difficultés car j’ignorais la langue. L’abbé m’avait donné le signalement précis du menuisier, son lieu de travail habituel   ; il l’avait également prévenu qu’au cas où lui-même serait empêché de se rendre au rendez-vous qu’ils s’étaient fixés, il lui adresserait un autre prêtre. Le 29 juin, jour de la fête de Saint-Pierre-Saint-Paul, donc de l’abbé Pierre Deswarte, je repère le menuisier. Furtivement, il me tend un petit paquet enveloppé dans un journal et me dit un seul mot   : « Demain. » Je glisse le paquet dans ma poche. Je travaillais ce jour-là à la construction d’un mur de briques. Je tenais à la main une truelle et un marteau. J’ai ramassé une planche abandonnée par terre et je me suis dirigé vers les casernes S.S. où nous campions. J’ai repéré un trou dans le mur. J’y ai caché ce que je croyais être des hosties consacrées et j’ai scellé à l’aide de ciment une pierre pour fermer la cachette. Le soir, en présence de l’abbé Deswarte rentré au camp, j’ai retiré la pierre et ouvert le paquet. Il contenait un morceau de pain et un bout de papier sur lequel était inscrit   : « Demain. »
    — Le lendemain 30 juin, j’ai attendu dès le matin mon menuisier. En arrivant, il se mit au travail après avoir déposé sa sacoche près de lui. Il me regardait très souvent. Je m’approchais. Il me dit   : « Aujourd’hui. » Ses mains tremblaient. Ému aux larmes, je me rendis au bâtiment central. La cachette bouchée, je m’inclinai devant ce tabernacle improvisé. Pas une seule seconde, en cette longue journée, ma pensée ne quitta ce tabernacle. Mes yeux rencontrèrent peut-être mille fois ceux du menuisier. Il me paraissait soulagé. J’ai cru, une fois, le voir pleurer. Le soir, avec l’abbé Deswarte, nous avons ouvert le paquet et nous avons trouvé deux cents hosties. Sur un billet, le père Beda Atzlhuber avait marqué   : « Hosties consacrées. » Vous imaginez notre joie. La Présence Réelle dans un camp de concentration   ! Trois mois seulement après sa fondation   !
    Les hosties sont fragmentées en minuscules parcelles, placées dans des boîtes de pastilles et réparties entre les prêtres du Kommando. Les responsables communistes sont prévenus de « la grande joie » de leurs amis catholiques. L’un d’eux confie à l’abbé Deswarte   :
    — C’est la plus importante victoire remportée jusqu’à ce jour par les déportés de Melk. Bravo   ! Il faut maintenant qu’un prêtre soit nommé comme infirmier au Revier (9) pour secourir les mourants…
    En attendant l’affectation de l’abbé École auprès du docteur Lemordant, Deswarte, Domaigné, Varnoux font jouer toutes les complicités possibles pour franchir la porte interdite du Revier. Ils réussissent. Tous les jours un prêtre passe une heure en moyenne dans le block des malades   :
    — Ceux (10) qui voulaient aller à la « visite » devaient se présenter nus, avec leurs vêtements sur le bras. J’ai très souvent utilisé ce moyen pour aller voir les malades. Je me mettais « en tenue » et au lieu de me diriger vers le Kapo, j’entrais dans les salles. J’ai pu assister de nombreux malades… Je me souviens en particulier d’un malade juif que j’ai vu chaque soir, pendant une assez longue période. Chaque soir, il me faisait ses adieux. Il était bouleversé de voir un prêtre catholique qui le respectait et lui parlait de Dieu… Un

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