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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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    — Et crois-tu aussi toujours en Jésus et en son Église   ?
    — Bien sûr. Oui   !
    Le S.S. baisse les yeux, joint les mains   :
    — Alors prie pour moi   ! D’accord   ?
    — D’accord.
    Deux secondes de silence. Il prend le colis le jette à la figure du prêtre, retrouve sa voix, ses cris, ses hurlements (158) .
    *
    — C’est aujourd’hui   ?
    — Oui   !
    — Des pommes de terre à midi   ?
    — Oui   !
    Une fois par semaine Hinzert est en fête. Le cuisinier prépare le « Pellkartoffel » … Chaque déporté peut espérer dans sa gamelle dix petites pommes de terre et une cuillère de sauce. Certains se précipitent   ; d’autres, au contraire, préfèrent conserver pour le soir ou même le lendemain un certain nombre de pommes de terre. Mais il faut les sortir du block et le sous-officier de garde a l’habitude de fouiller les détenus. L’abbé de la Martinière a conservé les pantalons de golf qu’il portait sous sa soutane.
    — Vous voulez bien m’en cacher trois…
    — Bien sûr   !
    — Vous voulez bien   ?…
    Les pommes de terre disparaissent dans le pantalon de golf… Dix, vingt, trente, trente-deux.
    Ils quittent le block.
    Sur la place d’appel   :
    — Déshabillez-vous   ! Placez vos vêtements en tas devant vous.
    L’abbé de la Martinière pâlit, hésite et d’un pas décidé quitte la place sous le regard « stupéfait » des S.S., des Kapos et de tous les déportés.
    *
    — Quelques (159) semaines après mon arrivée au camp, une grande agitation se manifesta parmi les prisonniers luxembourgeois. Beaucoup d’entre eux étaient là avec leurs fils et l’un des innombrables bobards qui circulaient – mais celui-là, hélas   ! était vrai – leur fit croire qu’ils allaient partir pour Lublin, camp de très mauvaise réputation où l’on exécutait facilement les prisonniers. Craignant de connaître ce sort, après les fusillades qui s’étaient perpétrées au Luxembourg, ils se préparaient courageusement à mourir, mais déploraient de ne pouvoir obtenir les dernières consolations de la religion. Ils firent demander aux quelques prêtres que nous étions dans le camp de leur procurer la confession et la communion.
    — L’un de ces prêtres était l’admirable abbé Keup, que nous appelions tous « Papa Keup », ou « Oncle Keup ». Étant seul avec moi, il réussit à soudoyer un S.S. qui nous avait révélé après une bonne cuite, qu’étant catholique et nanti d’une femme énergique, fermement attachée à sa foi, il avait refusé d’apostasier, ce qui faisait qu’on le maintenait dans le grade d’Unterscharführer, ou caporal-chef, au lieu de lui donner les galons d’Oberscharführer, ou sergent. En effet, pour monter en grade dans la S.S., il était indispensable de rejeter toute appartenance à une confession quelconque, mais, soutenu par son épouse, ce brave homme avait résisté à la tentation.
    « — Puisque vous avez fait cela, lui dit Papa Keup, je vais vous demander quelque chose qui peut vous coûter la vie, comme à moi. Mais si nous atteignons tous deux l’heure de la libération, je témoignerai pour vous. Procurez-vous des hosties et du vin de messe. » Notre S.S. hésita, mais finit par accepter. Grâce à une pharmacie de Trêves tenue par d’excellents chrétiens, qui risquaient ainsi leur liberté, et peut-être plus encore, notre bon S.S. nous apporta à plusieurs reprises des hosties et un peu de vin. On décida que la première messe serait célébrée dans la nuit de Noël…
    — … Ces hosties et ce vin que nous devions aux bons offices de ce brave S.S. (160) , il s’agissait de les cacher jusqu’au moment opportun, ce qui n’était pas simple. Un petit ouvrier communiste luxembourgeois s’en chargea. Ayant le privilège d’être Kapo, il avait secrètement aménagé une petite cambuse dans le plafond de sa baraque, et c’est là qu’il tint à l’abri, pendant une huitaine de jours, nos hosties et notre vin, que nous étions, pour notre part, dans l’incapacité absolue de dissimuler.
    — Tout d’abord, nous avions pensé avertir nos camarades français chez qui nous comptions plusieurs prêtres. Mais l’expérience nous avait démontré que s’il était question de « faire un coup », les Français se laissaient emporter par un enthousiasme qui les laissait parfois oublier les règles de la prudence. En fin de compte, nous nous sommes dit que, moins nous

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