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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur
Autoren: Pierre Naudin
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quelques menus présents, notamment des tahorotes 359 dont Charles, qui ne chassait pas, n’avait que faire ; mais l’intention suppléait la valeur du présent, et la morale de l’audience se résumait à :
    – Je vous passe la casse, passez-moi le séné.
    Le casseur connaissait son homme. Il ne fut qu’un condottiere commandant à des malandrins, et pour qui l’honneur – sauf l’idée spécieuse, outrancière et fétide qu’il se faisait du sien – était peu de chose. Il avait misé sur le Trastamare que les vertus n’étouffaient point ; il fallait que celui-ci triomphât. Ce fût lui qui intervint en sa faveur dans le combat qu’Henri était en train de perdre et qu’il eût perdu s’il avait eu lieu « à la loyale ».
    Les faits
    Que dit Cuvelier de cette rixe ? Lisons-le et disséquons ensuite ce texte bourré d’invraisemblances.
    Voici les mouvements de don Henri après que le Bègue eut vitement désarmé Pèdre de son poignard :
    De Pèdre le félon se va tôt approcher.
    D’une dague qu’il tint lui va trois coups payer.
    Au viaire l’alla férir et estiquier.
    Quand Pèdre se sentit ainsi appareillé,
    Roi Henri embrassa et le prit à lutter
    Tellement que tous deux allèrent trébucher,
    Et Henri l’estiquait de sa dague d’acier ;
    Mais aimé le trouva d’un beau haubert d’acier.
    Le roi Pèdre s’alla tellement efforcer
    Que Henri fut dessous ; en lui n’eut qu’airer,
    Si Pèdre eût eu une dague à ermier,
    Jamais au roi Henri mire n’eut métier.
    De sa dague tollir s’efforçait le meurtrier
    Et le prit des genoux moult fort à pestilier,
    Bertrand du Guesclin en est au tref entré.
    Olivier de Mauny qui tant fut aduré,
    Et Henri de Mauny et Alain le mains-né,
    Et Guillaume Boistel, le chevalier loué ;
    Si fut Karenlouet et des autres assez,
    Bertrand parla en haut et dit : « Or, entendez ;
    Laissez-nous roi Henri occire à tel vilté
    Par un faux renié, traître, parjuré »,
    Dit au bâtard d’Arnières qui était son privé ;
    « Allez aider Henri, bien faire le pouvez ;
    Prenez-le par la jambe, au-dessus le mettez ».
    Et le bâtard le fit, qu’il n’y est arrêté :
    Par la jambe saisit Henri dont vous œz
    Et le tira amont et dit : « En sus levez ;
    Déportez-vous à tant, fait en avez assez ».
    Sur Pèdre fut Henri, ainsi comme vous œz ;
    Lors se leva Henri, plus n’y est demeuré,
    Et voir Pèdre gésir qui a mort fut navré,
    Lors s’écria Henri qui fut bien écouté :
    « Avant seigneurs barons ! faites n’y demeurez.
    Or tôt, descobilas ce traître mortel. » etc.
     
    Cette scène, on le voit, empeste le complot. Elle n’est pas à l’honneur des Français qui s’en mêlèrent.
    Cuvelier atteste que le meurtre de Pèdre eut lieu dans le tref (la tente) de Guesclin où Villaines avait conduit le roi légitime en prenant la précaution de le désarmer. Sans doute ne se soucia-t-il que de son épée, puisque Pèdre avait conservé un poignard.
    Le haubert ? Ce fut plutôt un haubergeon, sans guère d’intérêt défensif et passé pour se rassurer.
    Froissart qui décrit la scène avec une brièveté qui n’est pas dans sa nature (fut-il gêné de raconter un meurtre prémédité ?) prétend que Henri souleva le haubert du roi afin de lui porter un coup dans la chair. C’est impossible.
    Le haubert descendait aux jarrets. On ne le pouvait retrousser, pas plus que le haubergeon (entre 12 et 15 kg de mailles serrées pratiquement indémaillables). Une fois endossés, ces habits de fer adhèrent au corps tout entier souplement mais si étroitement du col aux jambes et pèsent tellement sur toutes ces surfaces que tout retroussis est impossible.
    C’est donc parce qu’il fut frappé par tous les témoins de la rixe après que don Henri lui eut porté le premier coup que Pèdre succomba.
    Qui furent ces témoins ? Cuvelier les cite en partie après avoir consigné l’initiative de Guesclin :
    –  Allez aider Henri, bien faire le pouvez ;
    Prenez-le par la jambe, au-dessus le mettez.
    Il dut y avoir une hésitation collective à l’annonce de cette déloyauté. Guesclin passa de la parole aux actes.
    Les preux chevaliers
    Selon Froissart, c’est le vicomte de Roquebertin (Rocaberti) qui saisit le pied de Pèdre et renversa le roi. Ce geste eut pour conséquence d’indigner deux fidèles hommes liges du roi de Castille : Raoul Elme (ou Helmehade), un Anglais dit aussi le Vert Écuyer, et Jacques
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